Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, des affaires de squat défraient régulièrement la chronique. Elles sont toutes plus invraisemblables les unes que les autres. Chaque fois, elles nous laissent sans voix. Un brin d’empathie suffit pourtant à comprendre le sentiment d’injustice qui sidère tous ces propriétaires, soudainement privés de la jouissance de leur bien.
Malheureusement, ces affaires ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Nous avons tous connu, que ce soit dans notre vie privée ou au cours d’un engagement local, des affaires de squat qui n’ont pas défrayé la chronique. Ces propriétaires se trouvent alors désemparés et ne peuvent pas compter sur l’indignation médiatique pour faire entendre leurs revendications légitimes. Dans ces cas, un constat s’impose : la loi protège, de fait, les squatteurs davantage que les propriétaires. Or ce sont eux que nous devons ici défendre.
Nous sommes très nombreux sur ces travées, je crois, à considérer que cette situation n’est pas acceptable. C’est chose normale au Parlement, puisque les affaires de squat remettent en cause le droit inviolable de la propriété, consacré par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. C’est d’ailleurs ce qu’a très justement rappelé notre collègue Dominique Estrosi Sassone en présentant sa proposition de loi, dont je salue l’initiative au nom de mon groupe.
Ce texte, tendant à garantir le respect de la propriété immobilière contre le squat, répond à des attentes fortes, alors que nombre de nos concitoyens se désolent de l’impuissance publique face à de telles situations d’injustice. Il faut dire que le droit actuel se révèle inopérant en la matière, soit par manque de clarté sur les protections offertes aux propriétaires dont les biens sont squattés, soit par une mauvaise application des dispositions prévues. En tout état de cause, je partage le diagnostic établi par l’auteur et confirmé par la position de la commission : un renforcement du droit actuel s’impose. C’est notamment le cas avec l’article 1er, qui augmente la peine encourue en cas de violation de domicile. Comme cela a été rappelé, le Sénat a déjà adopté cette mesure dans le cadre du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique. J’espère qu’une nouvelle adoption permettra enfin d’aboutir à des résultats concrets.
Toutefois, notre action de législateur ne saurait se concentrer sur le cas de violation de domicile, et pour cause : compte tenu de la jurisprudence, la définition du « domicile », quoiqu’elle soit très large et ne distingue pas les résidences principales des résidences secondaires, ne permet pas de couvrir efficacement l’ensemble des cas de figure justifiant cette initiative législative. C’est notamment le cas pour les appartements vides, les locaux professionnels ou même les terrains non construits. C’est pourquoi la création d’un délit autonome d’occupation frauduleuse d’un immeuble, telle que prévue par l’article 2, me paraît opportune. Cette mesure élargit le champ des cas qui seront couverts par la loi.
Les articles suivants de la proposition de loi s’inscrivent dans la même logique. Ils renforcent les pouvoirs de sanction contre les squatteurs et assouplissent les conditions d’application, ce qui devrait rendre le droit applicable plus opérationnel.
Il en est de même des sanctions frappant toute communication visant à inciter au squattage. Nous avons tous à l’esprit certains collectifs et certaines associations qui ont fait de ces actions leur marque de fabrique, voire leur raison d’être. Je ne leur fais pas de procès d’intention, car je sais qu’il s’agit souvent de militants animés par de bons sentiments. Mais force est de le constater : ils alimentent le phénomène des squats, que nous dénonçons, et ils réduisent au silence de nombreux propriétaires dont les biens sont spoliés.
Nous devons être fiers de défendre le droit de propriété, qui se trouve au fondement de notre démocratie. À cet égard, M. le rapporteur a utilement précisé le champ d’application du délit afin de ne pas créer de confusion malvenue.
Pour terminer, j’évoquerai plus généralement la position de la commission sur cette proposition de loi.
Les précisions et restrictions apportées au dispositif permettent de mieux cibler les cas particuliers des squats. Elles adaptent ainsi la lettre de la loi à son esprit. Cela devrait limiter les risques d’interprétation excessive, et c’est heureux. Toutefois, cette focalisation laisse sans réponse bon nombre des cas problématiques rencontrés par nos concitoyens : c’est tout le débat sur l’opportunité d’expliciter, dans le texte de la loi, la façon dont les occupants sans droit ni titre se sont introduits dans l’immeuble. Cette précision limite le dispositif en même temps qu’elle le rend plus opérant dans les cas visés. Cependant, elle exclut du champ de cette proposition de loi un large pan des cas d’occupation illicite. Les problèmes liés aux locataires défaillants ne sont donc pas résolus.
Mes chers collègues, en conclusion, les élus du groupe Les Indépendants approuvent largement ce texte, qui apporte des réponses concrètes aux problèmes de nos concitoyens.