Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’ordre du jour est ainsi fait que nous continuons nos travaux aujourd’hui par l’examen d’une proposition de loi visant l’amélioration des relations entre les collectivités et les gens du voyage. Il est proposé d’appréhender et de réguler les flux des gens du voyage, tout en renforçant la lutte contre les occupations illégitimes.
Cet objectif se traduit essentiellement – hélas ! – par un durcissement des conditions d’accueil et par l’extension des possibilités d’expulsion au nom de la lutte contre les occupations illégales. Je le rappelle, la raison d’être prioritaire des textes adoptés en 2017 et en 2018, qui sont encore incomplètement mis en œuvre et que les auteurs de la présente proposition de loi souhaitent modifier, est la pacification des relations entre les gens du voyage et les communes les accueillant. L’adoption d’un texte maintenant, en particulier de celui qui nous est proposé, n’y contribuera pas.
Sur la forme, ce texte participe d’une inflation législative, d’une course sans fin pour encadrer les conditions de vie et de domiciliation des gens du voyage, et contribue, certes involontairement, à leur stigmatisation.
Depuis trente ans, il y a eu beaucoup de lois sur les gens du voyage, beaucoup de commissions représentatives, beaucoup de schémas directeurs. Mais le constat a été fait par vous tous, mes chers collègues : seule la moitié des places en aires permanentes d’accueil prévues par les schémas départementaux avaient été créées en 2009, et ce chiffre s’élevait à peine 75 % en 2020. Seuls vingt-quatre schémas départementaux sont pleinement respectés aujourd’hui !
Je salue le travail de modération de notre rapporteure et de notre commission sur certains points édifiants, comme la suppression, demandée par la commission, de l’article 8, qui prévoyait la possibilité d’une astreinte solidaire pour les occupants en infraction, et celle de l’article 6, consacré aux craintes liées à des inscriptions massives et ciblées sur les listes électorales de gens du voyage au sein de communes peu peuplées.
Je regrette toutefois l’ajout d’un article sur les méthodes d’expulsion et de renforcement des sanctions pénales en cas d’infraction. Comment justifier de la saisie d’un véhicule qui est aussi l’habitation des gens du voyage ?
Pareillement, le changement de lieu qui pourrait être imposé d’une aire à une autre ne prendrait pas en compte l’ancrage local, même embryonnaire, qui peut exister, en particulier par des tentatives de scolarisation des enfants. Cela va à l’encontre de la possibilité d’une intégration et d’une non-stigmatisation des gens du voyage.
Dans mon département, dont parlait tout à l’heure un autre sénateur, je connais beaucoup d’associations qui s’occupent avant tout de la scolarisation des enfants des gens du voyage, aussi bien à Marseille qu’en Camargue. C’est l’un des moyens d’arriver à une intégration et à une amélioration des relations.