Intervention de Jean-Yves Leconte

Réunion du 19 janvier 2021 à 14h30
Outils des collectivités permettant d'assurer un meilleur accueil des gens du voyage — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le confinement a été une épreuve pour tous, mais il a été particulièrement compliqué pour les personnes itinérantes. Il leur était impossible de bouger, alors que cela fait partie de leur identité, leurs activités économiques étaient atteintes – je pense en particulier aux fêtes foraines, aux marchés, aux cirques –, et elles n’étaient pas toujours éligibles aux aides de l’État.

Les difficultés sanitaires et de scolarisation de ces populations ont été démultipliées en fonction de leurs conditions de vie et de leur accès ou non à internet.

Compte tenu de cette situation, les interventions des restaurants du cœur et des banques alimentaires se sont multipliées sur les aires d’accueil pour répondre à ces situations de détresse.

Quelques évacuations ont eu lieu également, dans des conditions qui se sont parfois révélées dramatiques pour la santé de ces personnes.

Les communes ont souvent dû faire des efforts, en diminuant ou en supprimant le forfait d’usage des branchements dans les aires d’accueil.

Rappelons aussi que les règles en matière de circulation, d’identité et de vote de ces personnes dérogeaient au droit commun jusqu’en 2017. On a commencé à sortir de ce régime en 2012, et la loi de 1969, qui établissait ces discriminations – en particulier le carnet de circulation –, n’a été totalement abrogée que par la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.

Mes chers collègues, les voyageurs de nationalité française sont entre 300 000 et 500 000. La loi Besson fixe des objectifs aux communes, transférés ensuite aux EPCI, pour que ces personnes puissent s’établir de manière temporaire et circuler.

En 2016, 76 % des EPCI remplissaient leurs obligations, 79 % en 2019. Il reste donc encore plus de 20 % des EPCI qui ne respectent pas les règles. C’est pire au niveau des départements : 50 % des aires de grand passage ne sont pas réalisées, et seuls vingt-quatre départements – ils étaient dix-neuf en 2016 – remplissaient leurs objectifs en matière de schéma départemental d’accueil.

Cela pose des problèmes, en particulier lors des grands déplacements d’été ou des regroupements religieux de plusieurs milliers de caravanes.

Comment voulez-vous que le système fonctionne s’il existe un tel décalage entre les besoins des gens du voyage, leur nombre, et les places prévues ? C’est un vrai sujet, et l’on doit constater que la loi relative à l’accueil des gens du voyage n’est pas respectée aujourd’hui, alors que cela devrait être notre priorité.

Au cours des dernières années, des procédures simplifiées d’évacuation des occupations illicites ont été prévues pour les EPCI qui respectent leurs obligations, mais, compte tenu du nombre de schémas non respectés, les préfets ne peuvent pas toujours trouver une alternative lorsqu’ils constatent des occupations illicites. Celles-ci peuvent donc durer faute de solution, parce que 25 % des départements seulement remplissent leurs obligations.

Se pose aussi la question de la sédentarisation progressive des gens du voyage, accélérée cette année avec le confinement. Il faut trouver des solutions pour permettre l’usage de terrains dont ils sont parfois propriétaires, mais qui ne sont pas destinés à un usage d’habitation. Rien n’est proposé sur ce sujet dans ce texte, alors que c’est aujourd’hui la priorité de ces populations en matière d’évolution de leur mode de vie.

Madame la ministre, je dois comme d’autres dénoncer la nonchalance, voire la désinvolture du Gouvernement sur ces sujets. Il a fallu attendre trois ans pour que les dispositions réglementaires relatives à la procédure de consignation mise en place par la loi Égalité et citoyenneté soient prises ! Cette procédure permet pourtant, de façon plus douce que le pouvoir de substitution du préfet, d’obliger les EPCI à remplir leurs obligations. Trois ans d’attente également entre le vote de la loi Carle – non pas que nous la soutenions – et sa mise en œuvre !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion