Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, mes chers collègues, les années et les textes législatifs se suivent, mais la gestion des gens du voyage reste une problématique récurrente pour les élus, notamment ceux de Haute-Savoie – je l’ai vécu en tant que maire.
Malgré les nouveaux outils que nous avons mis à leur disposition en 2018, les communes sont encore le plus souvent impuissantes face aux installations illicites.
Pas un mois ne passe sans que je sois sollicité par des élus de ma circonscription à ce sujet. Je ne peux qu’attester de leur désespoir, provoqué par leur absence de moyens pour faire respecter la loi, alors même qu’ils se conforment aux obligations mises à leur charge par le schéma départemental d’accueil des gens du voyage, mais également de leur désarroi face à certaines décisions de justice aberrantes.
Nous avons réussi à faire un premier pas en 2018 pour aider les élus, mais les mesures que nous avons alors adoptées ne suffisent pas, force est de le constater. Les collectivités territoriales n’ont toujours pas en main les outils nécessaires pour lutter contre le fléau – je pèse mes mots – des installations illicites. Nous ne pouvons pas continuer à laisser agir en toute impunité ces individus faisant fi de la loi, qui menacent, intimident et invectivent les élus, qui s’installent sans aucune notification préalable ou en méconnaissance des dates de réservation, qui dégradent des terrains communaux ou privés en ne respectant pas les règles les plus élémentaires d’hygiène, et qui laissent de surplus le soin aux collectivités de nettoyer derrière eux.
Les frais engagés pour la remise en état des terrains s’élèvent souvent à plusieurs milliers d’euros, payés par les impôts des contribuables, et pèsent considérablement sur les budgets des collectivités, qui ne peuvent pas les déployer pour des projets qui bénéficieraient pourtant à l’ensemble de leur population.
Comment est-il possible de laisser impunis ces agissements absolument contraires au vivre ensemble, au seul motif qu’ils sont commis par une communauté spécifique ? La loi n’est-elle pas la même pour tout le monde ? Le fait d’appartenir à une minorité empêche-t-il d’être responsable de ses actes et d’en assumer les conséquences, fussent-elles pénales ? La réponse est non, et je soutiens fermement qu’il est absolument indispensable que nous arrêtions de nous cacher derrière les particularités de cette communauté pour renoncer à prendre les mesures nécessaires.
La situation est tout simplement insoutenable, et il est de notre devoir d’y remédier, pour le bien des élus et du reste de la population, qui n’a pas à supporter le poids de ces agissements.
En 2018, lorsque notre proposition de loi a été examinée à l’Assemblée nationale, une grande partie du texte voté au Sénat a été détricotée. Nous étions nombreux à l’avoir déploré. On nous avait dit que cela suffirait. Mais, aujourd’hui, deux ans plus tard, nous devons de nouveau examiner une nouvelle proposition de loi, qui reprend en grande partie les dispositions qui avaient été supprimées à l’Assemblée nationale.
En effet, le texte que nous examinons reprend plusieurs des dispositions qui avaient été adoptées au Sénat : prise en compte des terrains dans la comptabilisation des logements sociaux, suppression de la consignation de fonds, saisie des véhicules d’habitation et déplacement forcé de ces derniers vers un autre terrain en cas d’installation illicite… Quelle perte de temps !
La majorité, arguant du risque de stigmatisation des gens du voyage, n’avait à l’époque pas eu le courage d’ouvrir les yeux sur l’étendue des lacunes de notre législation. J’espère de tout cœur, madame la ministre, qu’il en ira autrement cette fois, afin d’éviter un nouveau débat sur cette problématique dans deux ans.
Je l’avais dit à l’époque, je le répète aujourd’hui : les dispositions que nous proposons ne cherchent absolument pas à stigmatiser les gens du voyage, qui respectent la loi dans leur grande majorité, mais à donner aux élus les moyens nécessaires pour se défendre face à la minorité qui persiste à s’enfoncer dans l’illégalité.
Tout comme Loïc Hervé, je tenais à attirer votre attention sur l’absence de mise en œuvre réglementaire de certains dispositifs que nous avions adoptés, notamment l’amende forfaitaire. Il est tout bonnement aberrant qu’un dispositif voté ne soit pas appliqué, et je ne peux qu’inviter le Gouvernement à rectifier cette lacune le plus rapidement possible.
Je le souligne encore une fois, ce texte comble un vide législatif important. Il apporte des réponses concrètes aux problèmes rencontrés par les élus locaux, et sera encore enrichi par notre débat d’aujourd’hui. Il serait malhonnête d’avancer que les dispositifs actuels sont suffisants.
Ce texte est donc une véritable nécessité pour renforcer les outils dont disposent les collectivités. Tous les acteurs concernés par ce sujet espèrent un vote au Sénat et une lecture rapide à l’Assemblée nationale, en vue d’une application dans les meilleurs délais.
Madame la ministre, vous avez exprimé votre opposition à cette proposition de loi au début de votre intervention. Mais alors, faites-nous des propositions ! Nous sommes prêts à travailler avec vous. Nous reconnaissons tous l’existence d’un problème, et nous ne pouvons pas nous résoudre à laisser les choses en l’état. Les élus n’en peuvent plus, ils appellent à l’aide !