Intervention de Marie-Pierre de La Gontrie

Réunion du 27 janvier 2021 à 15h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Discussion générale

Photo de Marie-Pierre de La GontrieMarie-Pierre de La Gontrie :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici réunis dans cet hémicycle pour l’examen d’un sixième projet de loi relatif à l’état d’urgence sanitaire. Bien entendu, nous avons eu à débattre bien plus souvent des dispositions qui nous ont été proposées à ce titre.

Monsieur le ministre, la reconduction de l’état d’urgence sanitaire que vous nous proposez a été déjà votée par l’Assemblée nationale.

M. le rapporteur l’a rappelé avec raison, dans ce domaine, le Sénat a toujours assumé ses responsabilités. Quelles que soient nos divergences politiques, quelles que soient les contestations que vos méthodes ont pu nous inspirer, nous avons toujours considéré que notre devoir était d’être aux côtés des Français, pour faire en sorte que les décisions du Gouvernement soient aussi adaptées que possible à la crise qui s’abat sur notre pays.

Depuis l’origine de ces travaux, nous tentons pourtant, avec un succès que je qualifierais de « modéré », de convaincre le Gouvernement d’encadrer davantage les restrictions apportées aux libertés publiques. Le fait que vous ayez vous-même annoncé la mise à l’écart du projet de loi de pérennisation de l’état d’urgence nous permet de délibérer aujourd’hui du texte qui nous occupe.

La suppression de l’article 3, lequel instaurait un régime de sortie d’état d’urgence presque similaire aux dispositions dudit projet de loi, opérée à l’Assemblée nationale et sur laquelle vos amendements indiquent que vous n’avez pas l’intention de revenir, laisse penser que nous serons amenés à nous revoir dans les prochains mois. Toutefois, les dates prévues sont encore trop éloignées.

Nous insistons sur ce point – j’y viens après le rapporteur et M. Bonnecarrère, d’autres suivront – parce que, ainsi que vous l’avez sans doute relevé, nos compatriotes se trouvent dans un état qu’un journal du soir a qualifié de « fatigue de la démocratie », une lassitude extrême. Nous n’avons jamais été destinataires d’autant de messages, de courriers, de mails nous demandant de ne pas voter le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui, alors même que, selon nous, il faut avancer dans son sens.

Les Français, eux, sont ambivalents. Ils sont impatients, car le vaccin leur a donné une lueur d’espoir, et prêts aux sacrifices, comme ils le démontrent depuis maintenant des mois. Pourtant, je crains qu’ils ne soient gagnés par un sentiment non de révolte, mais de refus.

C’est la raison pour laquelle nous vous adjurons de vous appuyer sur les élus et sur les collectivités locales. Nous avons cette proximité avec les Français que vous n’avez pas parce que vous êtes ministre, membre du Gouvernement ; nous pouvons accompagner les mouvements. C’est aussi pour cela que nous faisons des propositions, qui seront détaillées par notre collègue Jean-Pierre Sueur tout à l’heure, afin de mieux adapter ces mesures, au-delà de l’encadrement des limitations des libertés publiques.

Un exemple : nous souhaitons que vous acceptiez une différenciation de ces mesures selon les territoires en fonction de la circulation du virus, comme ce fut un temps le cas. Aujourd’hui, il n’est plus l’heure de tenir le même raisonnement. En revanche, la population, le taux d’urbanisation, les données démographiques nous conduisent à nous interroger : faut-il imposer les mêmes contraintes, de couvre-feu, par exemple, à des villes denses et à des villes de 2 000 habitants dans lesquelles les prises de risque ne sont pas comparables ? Je suis moi-même élue de Paris, autant vous dire que j’applique ces mesures, mais nous demandons plus de finesse dans leur mise en œuvre.

D’autres évolutions seront soumises à notre assemblée. Notre groupe entend le besoin de cet état d’urgence sanitaire, approuve la position de la commission des lois d’en restreindre la durée et le champ, s’agissant d’atteinte aux libertés publiques. Il fera néanmoins, par la bouche de notre collègue Jean-Pierre Sueur, des propositions complémentaires pour que ces dispositions soient mieux adaptées au besoin de vivre des Français.

In fine, nous ne nous opposerons pas à ce texte, mais nous nous abstiendrons, sauf si certains de nos amendements étaient adoptés par le Sénat. Vous avez fait montre d’ouverture à cet égard dans votre intervention, monsieur le ministre.

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