Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 27 janvier 2021 à 15h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Discussion générale

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, en premier lieu, je souhaite affirmer une nouvelle fois ma solidarité avec tous ceux, à commencer par les soignants, qui sont en première ligne face à cette pandémie qui n’en finit plus ; je tiens aussi à affirmer ma profonde solidarité avec nos concitoyens qui, loin de s’afficher en procureurs, résistent et tiennent bon dans une situation qui, semaine après semaine, devient très pénible sur les plans sanitaire, social et psychologique.

Aujourd’hui, ils veulent des résultats, ils veulent connaître les objectifs, ils veulent comprendre pourquoi la santé publique n’est pas érigée « quoi qu’il en coûte » en grande cause nationale. Transparence, cohérence de choix politiques clairs pour enfin se donner les moyens de faire face, tel est ce qui est attendu.

Monsieur Véran, nous sommes face à l’inconnu : nous sommes sous la menace des variants et nous ne savons pas combien de mois cette situation va durer. Il faut donc associer le Parlement, maintenant et à chaque étape, à l’élaboration des décisions – et, bien sûr, lui permettre d’en débattre.

Vous nous répondez : l’état d’urgence sanitaire, c’est le seul moyen d’agir. Mais, monsieur le ministre, le Parlement peut siéger jour et nuit pour décider, voter, contrôler !

Pourquoi ne pas avoir soumis le couvre-feu au vote des assemblées ? Nous ne sommes plus dans l’état de sidération de mars dernier, qui pouvait exiger de prendre des mesures dans la précipitation.

Il faut maintenant cesser de s’en remettre aux seules décisions du chef de l’État, entouré d’un conseil de défense qui n’existe, selon l’article 15 de la Constitution, que pour conseiller le chef des armées.

Les réunions qui se tiennent dans ce cadre sont soumises au secret-défense. Comment en sommes-nous arrivés là ? Après la mise à l’écart du Parlement, c’est le Gouvernement lui-même, pourtant chargé de conduire la politique de la Nation, qui est collectivement mis sur la touche !

Monsieur le ministre, vous proposez de proroger l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin, donc de quatre mois, sans retour devant le Parlement. Quant au cadre juridique de cet état d’urgence, il est maintenu jusqu’au 31 décembre de cette année.

Par ailleurs, le projet de loi prévoyait à l’origine de fixer la fin de cet « état d’exception bis » qu’est la sortie de l’état d’urgence au 31 septembre prochain. En affichant un geste à l’égard du Parlement, la majorité En Marche de l’Assemblée nationale a, avec votre accord, supprimé cette date butoir. Mais la vérité vraie, c’est que vous n’en avez plus besoin, puisque vous avez déposé en catimini, le 21 décembre dernier, un projet de loi instituant un régime pérenne de gestion des urgences sanitaires : c’est ce texte que vous entendez appliquer après le 1er juin.

Or ce projet de loi, sur le mode des lois antiterroristes qui ont intégré des mesures de l’état d’urgence de 2015 dans le droit commun, tend à graver dans le marbre du droit ordinaire des dispositions portant atteinte aux libertés institutionnelles.

D’abord, vous intégrez dans le droit un état de crise sanitaire impactant, essentiellement, les libertés individuelles. Le Parlement se verra généreusement accorder le droit d’étudier un rapport au terme de six mois d’exercice de cet état d’exception… Ensuite, l’état d’urgence sanitaire continuera d’être déclaré par décret – une validation par la loi intervenant seulement ensuite. Nous refusons cette mise à l’encan des libertés individuelles et collectives !

Pourquoi cette obstination antidémocratique ? Pourquoi ces confinements et reconfinements successifs ? Parce que vous n’avez pas fait le choix de soustraire la santé publique, la santé de notre peuple, à cette loi du marché qui place l’humanité après les profits financiers !

L’affaire des vaccins est symptomatique : pourquoi notre pays n’a-t-il pas su se doter d’un vaccin, pourquoi n’a-t-il pas été possible d’organiser le début de la campagne – ce qui a fait perdre un mois précieux ?

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