Intervention de Bernard Jomier

Réunion du 3 février 2021 à 15h00
Bioéthique — Article 7 bis, amendements 25 17

Photo de Bernard JomierBernard Jomier :

Comme monsieur le secrétaire d’État l’a rappelé, cette disposition, dont l’introduction a été rendue possible par une directive européenne, a été adoptée par l’Assemblée nationale puis par le Sénat lors de la première lecture du projet de loi relatif à la bioéthique. La commission spéciale de l’Assemblée nationale a confirmé ce vote en deuxième lecture, mais, suivant les arguments du Gouvernement, les députés ont supprimé cette disposition en séance publique.

Ces arguments ne me semblent pas très fondés.

Le premier argument, technique, repose sur l’idée qu’il pourrait y avoir plus d’effets secondaires à l’âge de 17 ans qu’à celui de 18 ans. Monsieur le secrétaire d’État, si j’ai bien noté les remarques formulées par l’Établissement français du sang, aucune étude précise ne nous a été fournie attestant d’un taux plus élevé de malaises vagaux à l’âge de 17 ans qu’à l’âge de 18 ans. En revanche, la prise en compte de ce critère entraînerait des discriminations, car, par exemple, les hommes et les femmes ne sont pas également sujets aux malaises vagaux lors d’un prélèvement de sang, ce qui montre la non-recevabilité de ce critère.

De plus, la survenue d’un malaise vagal n’est pas de nature à compromettre dans la durée l’adhésion à la pratique du don de sang. Certaines personnes sont d’ailleurs sujettes à des malaises vagaux lors de la réalisation d’une simple prise de sang, bien au-delà de l’adolescence ou de l’âge de jeune adulte.

Par ailleurs, les critères de carence martiale – en clair, de manque de fer – n’ont pas été objectivés de façon nette. Les prélèvements sanguins sont limités, notamment pour éviter ces phénomènes de carence. Si carence il y a, elle ne peut être liée au prélèvement sanguin, mais celui-ci peut éventuellement révéler une carence ayant une autre origine.

En revanche, les jeunes sont sensibilisés à partir de l’âge de 16 ans au don du sang lors de la journée nationale défense et citoyenneté. À quoi bon sensibiliser un jeune à une pratique altruiste s’il doit attendre deux ans – ce qui, quand on a 16 ans, est une éternité ? Faut-il alors reporter l’âge auquel a lieu cette journée ? Il ne paraît pas cohérent de déconnecter l’encouragement à pratiquer l’acte de don du sang et le droit de pratiquer cet acte.

Vous avez également soulevé des objections liées au consentement du représentant légal. Or, conformément à la directive, ce dernier peut donner son consentement par écrit sans accompagner le jeune lors du don.

Un dernier argument est apparu dernièrement, comme s’il fallait à tout prix nourrir l’opposition à cette mesure : il a trait aux réticences que les jeunes pourraient avoir à évoquer leur vie sexuelle, notamment lorsque leurs parents ne sont pas au courant ou que ces relations sexuelles pourraient les exclure du don du sang, parce qu’elles seraient par exemple de nature homosexuelle ou avec des partenaires multiples. Mais tout don du sang est précédé d’un questionnaire et d’un entretien avec un professionnel de santé soumis au secret médical. Les professionnels de santé, qui savent gérer ce type de situation, pourront suggérer au jeune qui ne peut se faire prélever pour des raisons liées à sa vie sexuelle et qui ne souhaite pas en informer ses parents de prétendre que sa tension était trop basse par exemple.

Tous ces arguments ne nous paraissant pas très fondés, la commission spéciale émet un avis défavorable sur l’amendement n° 25 rectifié. Pour ma part, je ne comprends toujours pas pourquoi le Gouvernement s’oppose ainsi à l’abaissement de l’âge à 17 ans.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion