Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 16 février 2021 à 14h30
Réforme du courtage — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié, amendement 2

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui reprend un amendement porté par notre collègue Richard Yung et l’ensemble de notre groupe lors de l’examen de la loi Pacte, amendement qui avait également été soutenu par Jean Bizet et des membres de son groupe. Le Sénat l’avait alors très largement adopté, avec le plein soutien du rapporteur Michel Canevet et du Gouvernement. L’Assemblée nationale l’avait ensuite repris à l’identique, moyennant quelques aménagements rédactionnels. Finalement, le Conseil constitutionnel, à l’issue de la navette parlementaire, avait choisi de le censurer comme « cavalier législatif ».

C’est ainsi que nous nous retrouvons, deux ans plus tard, à examiner la proposition de loi de notre collègue députée Valéria Faure-Muntian, qui reprend cette disposition. Je ne doute pas qu’elle sera accueillie au Sénat avec le même enthousiasme qu’en 2019. Comme le rappelait Richard Yung dans son amendement initial, cette disposition tend à répondre à une situation qui n’a fait que s’aggraver au cours des dernières années et à laquelle il est urgent de remédier.

Les marchés d’intermédiation bancaire et assurantielle se sont fortement développés dans un contexte historique de taux bas et d’essor de l’offre de produits financiers. Le contrôle exercé sur cette offre est assuré par l’ACPR, mais n’est plus tout à fait adapté à ces nouvelles structures et à un marché d’intermédiation de plus en plus éclaté. C’est pour cette raison que la proposition de loi écarte l’option d’une surveillance directe par l’ACPR, pour confier cette mission à des associations agréées.

En effet, l’ACPR réalise un peu moins d’une centaine de contrôles par an, face à un marché de près de 13 000 courtiers et mandataires en opérations bancaires et services de paiement et de plus de 40 000 courtiers en assurances. L’ACPR n’est manifestement pas en mesure d’assurer seule l’encadrement du secteur du courtage. Cette proposition de loi présente donc une solution équilibrée qui prend exemple sur le dispositif existant pour les conseillers en investissements financiers, fondé sur l’intervention d’associations agréées et qui permet un contrôle efficace du secteur.

Les associations agréées auront un rôle complémentaire de ceux de l’ACPR et de l’Orias. Il ne s’agit nullement de retirer des compétences à ces organismes, comme certains semblent s’en inquiéter, mais au contraire de les seconder et de les renforcer.

J’aimerais ici reprendre un exemple qui avait été cité lors de l’examen de la loi Pacte et qui se produit malheureusement encore trop souvent, celui d’un client de bonne foi qui aurait souscrit une assurance construction auprès d’un courtier installé en France. Mais lorsqu’il souhaite déclarer un sinistre et faire jouer son assurance, la société, curieusement domiciliée à Chypre, Malte ou Gibraltar, a disparu et n’est plus là pour honorer son engagement.

Nous le voyons bien, il est urgent d’améliorer les conditions de commercialisation des produits d’assurance et de services bancaires et il est essentiel de responsabiliser les courtiers sur les produits qu’ils vendent. C’est au fond l’objectif de l’amendement n° 2 du Gouvernement, qui tend à mieux encadrer les démarchages téléphoniques et à interdire les ventes « en un temps », qui se transforment encore trop souvent en escroqueries visant les personnes âgées ou les plus vulnérables.

Vous venez de le préciser, madame la secrétaire d’État, à ce jour, huit associations professionnelles ont déjà indiqué être prêtes à déposer leur dossier d’agrément. C’est une excellente réponse à ceux qui demandent de retarder de nouveau l’entrée en vigueur de la proposition de loi.

Cette réforme est attendue par les professionnels et par les consommateurs. La date du 1er janvier 2022 prévue pour son entrée en vigueur me semble être un bon compromis entre le temps qu’il faudra laisser aux acteurs pour s’adapter à la nouvelle réglementation et la nécessité d’encadrer au plus vite les mauvaises pratiques de certains.

J’aimerais enfin répondre à ceux qui relevaient à juste titre en commission que les acteurs étrangers exerçant des activités en France ne seraient pas obligatoirement soumis à ces nouvelles obligations, en raison d’un droit européen qui ne permet pas de les y contraindre.

Il ne faut pas oublier l’effet d’entraînement d’une telle mesure sur l’ensemble du secteur, car l’adhésion à une association agréée constituera pour les clients français un gage de fiabilité. C’est un cercle vertueux qui permettra d’assainir peu à peu le marché et de rétablir la confiance en responsabilisant les acteurs.

Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI soutiendra cette proposition de loi.

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