Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, ce texte contient bien sûr des points positifs. Le seul fait qu’il sera adopté en est déjà un. Néanmoins, nos objections subsistent et font que, en toute honnêteté intellectuelle, nous ne pourrons l’approuver, et ce pour cinq raisons, que je vais expliquer au cours de ce débat démocratique.
Premièrement, nous pensons, et cela a d’ailleurs été dit à plusieurs reprises au cours du débat, que la spécialisation de la justice des mineurs est un principe qui doit être absolument respecté. Or tel n’est pas le cas dans ce texte. Je pense à deux dispositions que vous connaissez par cœur, madame la rapporteure.
Tout d’abord, la compétence du tribunal de police a fait sa réapparition, alors que le Sénat avait jugé qu’elle était totalement contraire au principe de spécialisation. Personne ne peut dire le contraire.
Ensuite, et cela vient d’être dit par Mme Vérien, le JLD réapparaît également et se voit confier un office qui devrait être celui du juge des enfants.
Il est clair que, sur ces deux points importants, le principe de spécialisation de la justice des mineurs n’est pas respecté.
Deuxièmement, le Sénat avait adopté un amendement visant à intégrer le secteur associatif habilité dans le code de la justice pénale des mineurs. Cet amendement a été supprimé en CMP. Je ne comprends pas pourquoi. Je ne sais pas qui, ici, pourra défendre l’idée selon laquelle cette loi ne doit pas prendre en compte le secteur associatif habilité. Il n’y a pas de raison. Comme il n’y a pas de raison, je comprends mal la position de la CMP.
Troisièmement, cette réforme ne permet pas de faire face au problème majeur du manque de moyens matériels et humains auquel sont confrontés les professionnels judiciaires et de la protection de l’enfance.
Monsieur le garde des sceaux, nous avons déjà salué ici l’augmentation de 8 % de votre budget, mais, concrètement, les moyens alloués à la justice des mineurs restent ce qu’ils sont, hélas ! et ce pour longtemps.
Quatrièmement, et c’est un point auquel nous avons été très sensibles, tous les amendements – je dis bien : tous les amendements – que nous avons proposés visant à faire primer l’éducatif sur le répressif et à faire du mineur délinquant un mineur à protéger n’ont reçu que des avis défavorables. Je ne comprends pas pourquoi ! Ces amendements auraient pourtant enrichi le texte et s’inscrivaient strictement dans la logique de l’ordonnance de 1945.
J’en viens à mon cinquième point, monsieur le garde des sceaux, que vous connaissez par cœur : la présomption irréfragable de non-responsabilité pénale d’un mineur de 13 ans, laquelle n’a pas été adoptée.
Nous avons beaucoup argumenté sur ce sujet, sur lequel nous avons remarqué votre ouverture d’esprit lorsque nous avons discuté ici même de la proposition de loi visant à protéger les jeunes mineurs des crimes sexuels – nous nous en souvenons tous – et réfléchi à l’instauration d’un seuil d’âge de 13 ou 15 ans. Un certain nombre d’entre nous ont voté pour un seuil de 15 ans. Vous relirez avec intérêt la réponse que vous avez faite.