Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je vais le dire à mon tour : à l’issue de ce travail législatif, nous regrettons que l’on n’ait pas réfléchi à un code plus global traitant de l’enfance en danger dans son ensemble, du civil au pénal, comme nous y invite d’ailleurs le comité des experts des Nations unies.
À l’issue de nos débats, au regard des conclusions de la commission mixte paritaire, un certain nombre de questions demeurent sur les motifs qui ont conduit à cette réforme de la justice des mineurs. Je l’ai déjà dit, je le redis ici ce soir : on a parfois l’impression qu’elle n’a été guidée que par le souci de gagner du temps, mais aussi parfois de l’argent.
Alors, oui, on réaffirme collectivement les grands principes, à condition, finalement, que ceux-ci n’aient pas d’effets sur la hauteur des piles de dossiers en attente.
Alors, oui, on va plus vite, et c’est parfois nécessaire, mais on ne le fait pas toujours dans l’intérêt de l’enfant, plutôt dans celui de la justice, dont les moyens limités ne sont bien évidemment pas extensibles, en tout cas pas autant qu’on le voudrait.
Certes, comme vous le rappelez depuis cet automne, monsieur le garde des sceaux, le budget de la justice a augmenté de 8 %, mais nous savons que ces deniers publics supplémentaires sont principalement alloués à l’administration pénitentiaire et qu’ils ne viennent pas soulager les capacités d’instruction ou désengorger la justice des mineurs.
Comme nous l’avions dit lors du débat en première lecture, nous avons le sentiment que la justice des mineurs est de plus en plus calquée sur celle des majeurs. Finalement, tel était déjà le leitmotiv des derniers projets de loi d’organisation de la justice : aller un peu plus vite, toujours plus vite, avec des effectifs réduits. Malheureusement, ce texte n’y échappe pas.
Or le seul moyen d’accélérer les délais de jugement sans augmenter les effectifs est finalement de rogner le principe de la primauté de l’éducatif sur le répressif et le principe de l’atténuation de la responsabilité du mineur.
Nous proposions dans le débat d’inscrire le caractère irréfragable de la présomption de non-discernement au-dessous de 13 ans. Cela n’a pas été retenu.
Nous proposions également la restauration de la remise à parents ou ce que l’on qualifie d’admonestation. Cet amendement, qui avait été adopté au Sénat, a été rejeté par la commission mixte paritaire. La disparition pure et simple de ce dispositif n’est remplacée par aucune autre mesure.
Contrairement à ce qui a pu être dit, il s’agit non pas d’un « simple » entretien, mais bien du premier niveau des sanctions pénales pour un enfant. Il permet une meilleure graduation des condamnations, surtout pour ce qui concerne les plus jeunes. Vous l’avez d’ailleurs rappelé avec humour, le fait de ne pas être remis à leurs parents peut être considéré par certains comme une liberté.
À l’issue de cette commission mixte paritaire, nous avons un autre regret : la spécialisation des juridictions. Il est en effet dommage que nous n’ayons pas pu obtenir satisfaction à la suite du travail mené par le Sénat.
Vous l’aurez compris, nous ne voterons pas le texte issu de la commission mixte paritaire.