Intervention de Jean-Raymond Hugonet

Réunion du 16 février 2021 à 21h00
Code de la justice pénale des mineurs — Adoption définitive des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Photo de Jean-Raymond HugonetJean-Raymond Hugonet :

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, quelle joie qu’une discussion générale après une commission mixte paritaire conclusive ! Ne boudons pas notre plaisir.

L’accord trouvé en commission mixte paritaire est un double succès, dont le groupe Les Républicains se félicite.

D’une part, députés et sénateurs sont tombés d’accord sur le fond du texte, qui deviendra, demain, le nouveau code de justice pénale des mineurs.

D’autre part, les membres de la commission mixte paritaire ont accepté, sur l’initiative du Sénat, de reporter l’entrée en vigueur de la réforme, ce qui était indispensable.

À ce titre, je le rappelle, la présidente de la conférence des procureurs généraux, Marie-Suzanne Le Quéau, avait rappelé au Premier ministre, voilà quelques mois, que le refus d’un tel report serait un « non-sens ». Il s’agit donc d’un ralliement tardif, mais heureux, puisqu’il bénéficiera directement aux acteurs de cette justice singulière qu’est la justice pénale des mineurs.

Nous le disons de nouveau : ni les magistrats ni les moyens informatiques n’étaient prêts.

À l’évidence, trouver un compromis en commission mixte paritaire nécessitait de renoncer à certaines dispositions, et nous ne pouvons que regretter la disparition de deux apports du Sénat.

En premier lieu, le transfert au juge des libertés et de la détention de la compétence en matière de placement en détention provisoire d’un mineur aura bien lieu.

Le Sénat souhaitait que cette compétence soit confiée à un juge des enfants distinct de celui saisi, pour respecter l’impartialité, considérant que le juge des libertés et de la détention n’est pas nécessairement spécialisé en droit pénal des mineurs.

En second lieu, nous nous étions opposés à ce que le tribunal de police puisse juger les mineurs pour les contraventions des quatre premières classes.

Nous estimions en effet que certaines de ces contraventions sont graves – je pense aux violences volontaires, même si elles ne sont pas suivies d’une interruption totale de travail – et qu’elles pouvaient nécessiter un suivi éducatif particulier, afin d’éviter la récidive.

À cet égard, notre collègue député Jean Terlier estimait le nombre de poursuites à l’encontre de mineurs pour des contraventions des quatre premières classes à 5 000 affaires par an. Il jugeait à ce titre que, si l’on aspirait à « alléger le travail de la justice, ce n’était pas le moment de remettre dans le circuit un volume d’affaires aussi important ».

Cependant, l’on perçoit en creux que ce choix se fonde sur l’insuffisance de moyens humains. Il y a tout lieu de croire que la création d’environ 45 postes supplémentaires de juges des enfants, soit une hausse de 10 %, annoncée par Mme Nicole Belloubet lors de l’examen du budget pour 2020, ne suffit pas, pas plus que les « sucres rapides » chers à la Chancellerie, laquelle semble désormais trouver de l’inspiration dans le travail des nutritionnistes…

Néanmoins, plusieurs apports du Sénat ont été maintenus dans le projet de loi final. Ainsi, nous saluons l’interdiction du recours à la visioconférence pour la décision et la prolongation de la détention provisoire d’un mineur.

De même, nous nous félicitons de l’introduction de la définition « sénatoriale » du discernement – nous sommes des experts ! –, qui devait intervenir au niveau réglementaire et qui sera finalement inscrite dans la loi.

Le Sénat a également souhaité rendre possible la numérisation du dossier unique de personnalité et d’y donner accès au personnel du secteur associatif habilité, ce qui facilitera sans nul doute les échanges entre les professionnels chargés de la justice des mineurs.

La fluidité de la transmission des informations profite à tous, et la justice a tout à gagner quand les moyens lui sont donnés d’apporter des réponses rapides.

Enfin, une autre disposition issue du Sénat permettra l’effacement simplifié des dispenses de mesure et des déclarations de réussite dans le casier judiciaire.

Cet ajout nous semble particulièrement bienvenu, puisqu’il participe au relèvement éducatif et moral des mineurs, principe fondamental en matière de justice des mineurs, réaffirmé par le nouveau code de justice pénale des mineurs.

Alors qu’elle a régulièrement été qualifiée de « serpent de mer », cette réforme est sur le point d’aboutir. À cet égard, nous saluons la qualité des travaux préparatoires effectués en la matière, dont ceux qui sont issus de la mission d’information du Sénat sur la réinsertion des mineurs enfermés, menée par nos anciens collègues sénateurs Catherine Troendlé et Michel Amiel.

Le groupe Les Républicains du Sénat est donc favorable au texte tel qu’il est issu des travaux de la commission mixte paritaire, et appelle de ses vœux la réussite de cette réforme.

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