Intervention de Anne-Marie Payet

Réunion du 9 juillet 2008 à 21h30
Modernisation de l'économie — Articles additionnels après l'article 28, amendement 261

Photo de Anne-Marie PayetAnne-Marie Payet :

Contrairement à la publicité indirecte, la publicité directe n’est pas définie dans la loi Évin. Selon les alcooliers, cette absence de définition créerait une insécurité juridique.

En réalité, ce n’est pas le cas, puisque les jurisprudences successives, dont l’orientation est constante, ont permis de préciser les contours de la publicité directe, en garantissant une sécurité juridique et en permettant une adaptation aux évolutions des pratiques des industriels.

Par ailleurs, la loi Evin énumère limitativement les supports sur lesquels la publicité en faveur de l’alcool est autorisée. Les alcooliers souhaiteraient qu’Internet en fasse désormais partie.

Les cas d’ivresse chez les jeunes sont de plus en plus fréquents. Or Internet est un média dont ils se servent plus que leurs aînés. C’est pourquoi il est impératif d’en encadrer strictement l’utilisation.

Pour être acceptable, la promotion de l’alcool sur la toile devrait respecter un certain nombre de règles. En particulier, les sites faisant la promotion de l’alcool ne devraient être accessibles qu’à la suite d’une démarche volontaire de la part de l’internaute. Il est donc essentiel de bannir des techniques telles que les fenêtres pop-up, le spam ou les liens sponsorisés. Cette sécurisation doit également se limiter aux sites de vente.

Si l’amendement n° 261 rectifié était adopté, les publicitaires pourraient utiliser toutes les possibilités technologiques présentes sur Internet, notamment les messages promotionnels qui s’imposent à l’internaute et ne respectent donc pas les intérêts de la santé publique, en dépit d’une mention relative à l’interdiction de la promotion de l’alcool sur les sites destinés à la jeunesse.

En outre, le dispositif que cet amendement vise à instituer favoriserait probablement plus les alcooliers que la filière vitivinicole. La libéralisation large, ou trop peu encadrée, de la publicité en faveur de l’alcool sur Internet profiterait sans doute bien plus aux grands groupes industriels producteurs d’alcool, qui ont des moyens publicitaires importants et des techniques de marketing développées, qu’à la filière vitivinicole.

L’amendement n° 261 rectifié a causé beaucoup d’émoi dans le milieu des associations de prévention et de lutte contre l’alcoolisme, qui condamnent cette initiative visant à définir la publicité uniquement comme un achat d’espaces.

Nous le savons, selon certains sénateurs originaires de régions viticoles, les annonces en faveur du vin relèveraient non pas de la publicité, mais plutôt de la « pédagogie » ou de l’« éducation à la consommation ». Cela a d’ailleurs été évoqué dans cet hémicycle. Nous savons également, mes chers collègues, que beaucoup ne considèrent pas le vin comme de l’alcool.

Pourtant, comme les récentes campagnes de publicité l’ont appris aux Français, il y a la même quantité d’alcool pur dans un verre de vin que dans un verre de bière ou dans un verre de rhum. Même si la consommation a baissé en France au cours de ces dernières années, le vin, qui reste la boisson préférée des Français, est directement responsable des deux tiers des décès liés à l’alcoolisme. Ce sont les professionnels de la santé qui le disent.

Pour respecter l’équilibre entre les intérêts des alcooliers et la préservation de la santé publique, les ministères de l’agriculture et de la santé ont mis sur pied un groupe de travail. Or l’amendement n° 261 rectifié, qui favorise les alcooliers au détriment des impératifs de santé publique, ne répond pas aux objectifs assignés à ce groupe.

Par conséquent, mes chers collègues, je vous demande de voter contre cet amendement.

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