Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 8 mars 2021 à 16h00
Droit au respect de la dignité en détention — Article unique

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Je vois que M. Frassa s’en souvient très bien.

Il est écrit dans le texte que le juge ne peut pas enjoindre à l’administration pénitentiaire de prendre des mesures déterminées pour mettre fin aux conditions indignes de détention. J’ai été un peu surpris de lire cela…

Je me suis vu aussitôt rétorquer que, s’agissant de l’administration pénitentiaire, le juge judiciaire ne peut faire aucune injonction, prérogative du seul juge administratif. J’ai bien entendu cet argument. Vous pouvez me le répéter si cela vous fait plaisir, pour reprendre ce mot, il ne me convaincra pas.

Le présent amendement tend à ouvrir la possibilité au juge d’enjoindre à l’administration pénitentiaire de prendre des mesures déterminées. En effet, la réserve formulée dans la proposition de loi est problématique, puisqu’elle prive le magistrat de pouvoir intervenir réellement sur les conditions de détention et laisse l’administration – pour laquelle j’ai le plus grand respect – seul maître, alors même que, consciente de la situation, elle n’a pas agi ou, le plus souvent, n’a pas eu la possibilité ni les moyens d’agir.

L’intervention rapide du juge judiciaire, ainsi que de véritables pouvoirs d’instruction sont essentiels pour l’effectivité de ce nouveau recours.

L’amendement vise un objectif d’intérêt général – la sauvegarde de la dignité humaine –, qui permet parfaitement de déroger au principe selon lequel seules les juridictions administratives peuvent agir par rapport aux réalités de l’administration – vous le savez très bien, monsieur le garde des sceaux.

De plus – je ne vais pas vous l’apprendre, monsieur Frassa, car vous le savez très bien vous aussi –, il est déjà prévu dans notre droit que le juge judiciaire adresse des injonctions à l’administration en cas de voies de fait. Je pourrais m’étendre bien plus longuement sur ce sujet, si vous le souhaitez…

Il ne vous a pas non plus échappé que l’alinéa 3 de l’article 803-8 de la proposition de loi comprend déjà une injonction à l’administration de faire connaître, dans un délai déterminé, les mesures qu’elle entend prendre pour mettre fin aux conditions de détention qu’elle estime indignes.

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