S'agissant de la dernière réunion de la conférence interparlementaire, le 22 février dernier, la séance plénière d'ouverture était dédiée aux priorités politiques des investissements à réaliser pour relancer l'économie. Les différentes interventions ont relayé des constats déjà avancés lors de la conférence du mois d'octobre.
Le président du Parlement européen, David Maria Sassoli a introduit les échanges en rappelant que les citoyens européens n'étaient pas tous égaux face à la crise de la covid-19. Il a déclaré que l'accord sur le plan de relance européen était historique car, pour la première fois, des transferts budgétaires massifs allaient être mis en oeuvre entre les États membres.
Par la suite, le président du Parlement portugais, Eduardo Ferro Rodrigues, a estimé que si l'accord sur la mise en oeuvre du plan de relance européen constituait en effet un premier pas, l'introduction de nouvelles ressources propres, l'évolution du pacte de stabilité et de croissance et l'achèvement de l'union bancaire étaient indispensables pour surmonter la crise actuelle. Il a appelé à éviter l'austérité qui pourrait entraîner un effet contracyclique préjudiciable à la reprise, et a souligné, comme tous les intervenants, le caractère crucial des investissements publics et de la recherche et développement pour renouer avec la croissance potentielle.
Plusieurs intervenants ont particulièrement insisté sur les conséquences sociales de la crise sanitaire. Ainsi, le secrétaire général des nations unies, Antonio Guterres, est brièvement intervenu pour rappeler que la crise sanitaire avait accentué les inégalités à travers le monde. Face à ce constat, il a estimé que l'instrument de relance européen constituait une réponse intéressante. De son côté, le président du Conseil européen, Charles Michel, a considéré que la crise constituait une opportunité pour changer de modèle économique et social, et a appelé les parlementaires nationaux à veiller à ce que chaque euro national et européen serve à relancer l'économie et la cohésion sociale. Enfin, la présidente de la commission européenne Ursula Von der Leyen, après avoir longuement détaillé des exemples de financements pouvant être apportés par l'instrument de relance, a rappelé que l'objectif de la commission était de soutenir une croissance plus inclusive. Après avoir estimé que le moment d'apporter une dimension sociale à la relance était venu, elle a annoncé la présentation du plan d'action pour la mise en oeuvre du socle européen des droits sociaux.
Enfin, la présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, a réaffirmé que la BCE continuerait à soutenir les économies européennes, tout en soulignant que la capacité politique de l'Union européenne à répondre à la crise dépendait aussi de l'articulation des politiques nationales.
J'ai ensuite assisté aux débats de la commission des budgets du Parlement européen, dont le thème était celui de l'implication des parlements nationaux et du Parlement européen dans la relance économique et la mobilisation du budget européen.
Le président de la commission, Johan Van Overtveldt, a rappelé l'importance du dialogue entre le Parlement européen et les parlements nationaux dans la réponse à la crise, en estimant qu'il fallait éviter qu'une carence de celui-ci n'alimente les dissensions entre les États membres.
Dans son propos liminaire, le commissaire européen au budget, Johannes Hahn, a présenté les prochaines étapes de la mise en oeuvre de l'instrument de relance. Une fois la décision « ressources propres » ratifiée par l'ensemble des États membres, la Commission européenne pourra lever les ressources nécessaires sur les marchés financiers. En parallèle, la Commission a déjà entamé un dialogue avec les États membres sur leur plan national de relance et de résilience, qu'ils doivent formellement transmettre avant fin avril. L'objectif de la Commission est de pouvoir émettre 150 à 200 milliards d'euros d'obligations sur les marchés d'ici à la fin de l'année, ce qui nécessitera une ingénierie financière et opérationnelle considérable.
Plusieurs parlementaires européens et nationaux ont exprimé une vive inquiétude quant au calendrier de la mise en oeuvre du plan de relance européen. Ainsi, les députés européens Jan Olbrycht et Pierre Larrouturou ont rappelé que tout retard dans la ratification de la décision « ressources propres » augmenterait le délai pour engager les fonds dédiés à la relance et que l'introduction de nouvelles ressources propres ouvrait la perspective d'alléger le coût de la relance pour les budgets nationaux.
Enfin, plusieurs interventions, dont celle du rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, Laurent Saint-Martin, ont déploré le manque d'association et d'information des parlements nationaux, mais également des autorités locales, sur la mise en oeuvre du plan de relance européen. Un parlementaire allemand a appelé de ses voeux une meilleure prise en compte de l'échelon régional dans la mise en oeuvre du plan de relance européen, en particulier pour les enjeux frontaliers.
En conclusion, mes chers collègues, je dirais que sur le fond, ces échanges ont été utiles en ce qu'ils ont permis de « prendre le pouls » de la conjoncture européenne à la fin de l'année 2020 et en ce début d'année 2021, et de mieux cerner les difficultés rencontrées par nos homologues européens dans ce contexte de crise sanitaire.
Sur la forme, comme c'est le cas malheureusement dans la plupart des conférences internationales, la portée des échanges a cependant été limitée par la succession d'interventions en « silo », et les aléas de la traduction. L'organisation en visioconférence de ce type d'évènement ne contribue pas à l'améliorer. En particulier, il est regrettable que certaines interventions entières n'aient pas été traduites, en raison de la qualité médiocre du son.
Ces conférences sont pourtant une opportunité unique pour les parlementaires nationaux d'échanger sur les enjeux budgétaires et financiers de l'Union européenne. Nous pouvons également nous réjouir que cette conférence soit devenue, au fil des ans et malgré ses défauts, un rendez-vous incontournable.
Le Président du Sénat a récemment saisi les présidents des commissions permanentes en vue de l'organisation du volet parlementaire, et notamment sénatorial, de la présidence française de l'Union européenne, qui se déroulera au premier semestre 2022. Une réunion se tiendra tout à l'heure sur ce sujet. Je lui ai d'ores et déjà indiqué que la conférence de l'article 13 qui aura lieu en février 2022 devrait être le cadre pour échanger sur les sujets au coeur des compétences de la commission des finances, et que pourrait notamment y être abordée la réforme des règles budgétaires européennes, compte tenu de l'importance de ce débat pour la sortie de crise économique ; l'introduction de nouvelles ressources propres permettant de soulager les budgets nationaux face au remboursement du plan de relance européen ainsi qu'un premier bilan de la mise en oeuvre du plan de relance européen. Nous devons également nous saisir de cette opportunité pour apporter des améliorations techniques à cette conférence, afin de favoriser les débats.