Nous y sommes donc, à cet article 24, qui a tant défrayé la chronique !
Mes chers collègues, je vous le dis d’ores et déjà : qu’il s’agisse de l’écriture initiale, de sa réécriture – pour le moins controversée – par le Gouvernement ou de la nouvelle rédaction proposée par la majorité sénatoriale, aucune ne modifie notre opinion.
Le débat n’oppose pas ceux qui voudraient protéger les policiers et ceux qui ne le voudraient pas.
Mes chers collègues, oui, nos forces de l’ordre doivent être protégées quand elles sont attaquées ou menacées, et les familles de leurs membres encore plus. Nous partageons cette préoccupation. Nous n’avons aucune mansuétude envers ceux qui incitent à la haine contre les agents qui font l’honneur de la République.
Cependant, je relève qu’ils sont déjà protégés légalement par la loi de 1881 et par le code pénal. Les policiers disposent d’un arsenal législatif pour lutter contre les menaces, le harcèlement, les atteintes à la vie privée, etc., et c’est heureux.
Aucun élément sérieux ne démontre que ces qualifications juridiques seraient insuffisantes. La protection des policiers exige d’abord que ces lois soient appliquées sans faillir. Elle passe aussi par le renforcement du lien de confiance entre la police et la population, et c’est là que le bât blesse.
En réalité, ce texte traduit la faiblesse du Gouvernement, qui ne parvient pas à contenir le phénomène alarmant de la multiplication des violences policières. Le problème réside dans le fait que, en s’attaquant aux « simples » images, on ne voit pas les raisons profondes de ce malaise. Selon la formule consacrée, ce n’est pas en cassant le thermomètre que l’on fait baisser la température.
La moindre professionnalisation ainsi que la réduction brutale des effectifs spécialisés ont conduit à une augmentation massive de la violence. Cette orientation doit être modifiée. Il y a eu 2 500 blessés chez les gilets jaunes, 1 800 chez les policiers, 122 journalistes blessés ou entravés dans l’exercice de leurs fonctions. Ces chiffres ne plaisent à personne – encore moins peut-être aux membres de notre Haute Assemblée…
Ce que nous disons, c’est que la police française se replie sur elle-même, sur ses techniques, sur sa doctrine. Or, dans une démocratie, le niveau de monopole de la violence légitime est établi par l’État. Dès lors que l’État revendique ce monopole, il se doit d’être exemplaire. En démocratie, la liberté, c’est aussi le contrôle citoyen sur celles et ceux qui exercent l’autorité. Je n’invente rien : c’est l’article XV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen !
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas l’article 24. Nous demanderons même sa suppression.