Au niveau local, l'une des limites est que nous n'arrivons pas à croiser les données épidémiologiques avec les données d'exposition. Santé publique France n'est pas de mauvaise volonté, et ce n'est pas qu'une question de moyens. Ce qui sera important dans le Green Data Hub, c'est de croiser les données. À cet égard, l'observation locale est très importante. La logique actuelle est très descendante. Nous avons voulu promouvoir une logique ascendante, en insistant sur les observatoires régionaux de la santé et de la santé environnementale.
Sur Lubrizol, les représentants de l'administration semblaient très satisfaits. Nous avons essayé de leur expliquer qu'il y avait une question de culture d'État, en santé environnementale comme sur beaucoup d'autres sujets, notamment dans la crise sanitaire actuelle. La question est de savoir comment modifier cette culture d'État. J'ai été très étonné d'entendre il y a quelques jours un responsable important de la majorité présidentielle dire que, sur ce sujet, ils avaient échoué, comme les gouvernements précédents. De fait, modifier cette culture d'État dans notre pays est très compliqué. En matière de santé environnementale, une part de décentralisation nouvelle est nécessaire, bien sûr. Mais il y a aussi une question d'articulation. Si on ne fait que de la décentralisation, on reproduira les mêmes erreurs au niveau des territoires, les mêmes modes de pensée et de fonctionnement.
Vous avez évoqué la manière dont fonctionnent les agences, au-delà de la question des moyens. L'ANSéS réunit autour de la table cinq ministères différents et des industriels, des parties prenantes, des personnes et des organisations qui mettent sur le marché ou qui vendent des produits soumis à autorisation par l'agence. Est-ce problématique ? Nous disons que non. On ne peut pas faire de la santé environnementale uniquement avec le ministère de la santé. Si l'on reconnaît que l'urbanisme est important, que l'alimentation est importante, on ne peut pas écarter d'autres acteurs, sous peine de manquer complètement l'articulation entre les différents enjeux. Il est indispensable, notamment, que le monde de l'agriculture soit partie prenante de la politique de santé environnementale. Mais il faut empêcher qu'on puisse être juge et partie.
Le champ de la santé mentale est très vaste. Si tout est dans tout, comment concevoir une gouvernance ? On peut dire qu'une personne décide de tout... Nous avons opté pour un exercice très réformiste, en cherchant comment améliorer les articulations du système actuel, la participation des parties prenantes, etc. Si nous n'avions pas restreint le champ, il nous aurait fallu dix ans !