Nous établissons le texte de la commission pour l'examen, en nouvelle lecture, de la proposition de loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification.
En raison d'un grand nombre de divergences de fond sur cette proposition de loi, dont nous avions regretté au Sénat le manque d'ambition, la commission mixte paritaire (CMP) réunie le 2 mars dernier n'est pas parvenue à établir un texte commun. La navette s'est donc poursuivie. Les députés ont examiné ce texte en nouvelle lecture le 18 mars, et ont conservé plusieurs apports du Sénat. Sur les 46 articles qui restaient en discussion, l'Assemblée nationale a adopté, ou supprimé, neuf articles conformes.
Nous pouvons ainsi saluer plusieurs points de convergence, parmi lesquels l'ouverture de la vaccination aux pharmacies à usage intérieur et aux biologistes ; le rejet du bénévolat individuel hors du cadre des associations dans les établissements de santé et l'encadrement de la participation de praticiens bénévoles ; l'autorisation, pour les professionnels hospitaliers travaillant au sein d'établissements de santé privés d'intérêt collectif (Espic), de maintenir des dépassements d'honoraires sans menacer l'accès aux soins - issue d'un amendement de Bernard Bonne ; ou, enfin, la désignation de référents handicap dans les établissements de santé.
D'autres articles introduits par le Sénat sont confirmés sous réserve de précisions, parfois seulement rédactionnelles. C'est le cas de la désignation d'une sage-femme référente ou de la prescription d'aides techniques par des ergothérapeutes.
Sur certaines des mesures phares contenues dans le texte initial, l'Assemblée nationale a maintenu plusieurs ajustements apportés par le Sénat en première lecture. C'est notamment le cas de l'article 5, qui inscrit dans la loi la fonction de chef de service hospitalier, au sein duquel le Sénat avait clarifié la répartition des compétences entre le service et le pôle, supprimé la concertation interne préalable à la nomination du chef de service et promu la collaboration de ce dernier avec le cadre de santé.
Cependant, sur le coeur des dispositions, l'Assemblée nationale a rétabli, pour l'essentiel, son texte adopté en première lecture.
Sur le volet relatif aux professions de santé, les députés ont rétabli la demande de rapport, à l'article 1er, dont nous avions souligné l'absence de portée. Sa rédaction a encore été alourdie par rapport à la première lecture. Ils ont également tenu à remettre à plat, sans attendre ce bilan, les protocoles locaux de coopération, en les ouvrant toutefois, comme nous l'avions proposé, aux services médico-sociaux et non aux seuls établissements médico-sociaux.
Les dispositions relatives aux compétences des sages-femmes, qui allaient, selon nous, à l'encontre de la cohérence du parcours de soins coordonné, ont également été rétablies dans des termes quasi identiques.
Concernant la gouvernance hospitalière, malgré les quelques convergences de vues que nous avons évoquées, nous devons reconnaître que des désaccords profonds entre nos deux assemblées subsistent.
Sur la réorganisation territoriale de l'offre de soins hospitaliers, les positions réaffirmées en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale témoignent d'une ambiguïté surprenante. Alors que l'accord est unanime sur l'urgence d'assurer, en partenariat avec les acteurs locaux de santé, un maillage plus pertinent et mieux intégré de l'offre de soins, les dispositions introduites par le Sénat allant dans ce sens ont été systématiquement balayées, sans que soit remis en cause le dispositif unanimement décrié prévu à l'article 4 sur l'attribution à l'établissement support du groupement hospitalier de territoire (GHT) d'une compétence de recrutement.
Par ailleurs, notre commission s'était efforcée de répondre, en première lecture, à l'une des demandes émises par l'ensemble des professionnels de santé et visant à faire du projet territorial de santé (PTS) un instrument déterminant dans la structuration de l'offre de soins. Nous avions ainsi rendu son élaboration obligatoire, afin de doter les projets régionaux de santé édictés par les agences régionales de santé (ARS) d'un instrument leur assurant la restitution des besoins de santé directement exprimés par les acteurs concernés.
L'Assemblée nationale, confondant curieusement la cause et la conséquence, a estimé que les PTS ne pouvaient aboutir que lorsqu'il existe déjà un certain niveau de coordination entre les différents acteurs, ce qu'ils ont pourtant précisément vocation à impulser...
Sur la gouvernance proprement dite, les députés ont adopté, après en avoir longuement débattu, une version modifiée de l'article 8 bis sur la présence des parlementaires au conseil de surveillance des hôpitaux publics, que nous avions pris soin de supprimer en première lecture. La rédaction retenue ne laisse pas de surprendre : il y est en effet prévu que la désignation du sénateur élu du département où est situé le siège de l'établissement principal de l'établissement public de santé incombera à la commission des affaires sociales du Sénat !
Importantes déjà au stade de la première lecture, nos réserves sur ce dispositif n'en sont que renforcées...
Enfin, nous ne pouvons que constater, sans surprise, la persistance des deux principaux points de blocage évoqués par Corinne Imbert au cours de la réunion de la CMP.
Les recommandations issues des concertations du Ségur de la santé et la demande exprimée par les personnels paramédicaux d'une participation accrue à la direction de l'établissement et d'une plus grande représentativité du président de la commission des soins infirmiers, bien qu'explicitement formulées par le rapport Notat et intégrées par le Sénat en première lecture, n'ont pas suscité l'adhésion de l'Assemblée nationale.
Mais c'est sur l'article 10, qui renforce la lutte contre le recours abusif à l'intérim, que nous maintenons notre circonspection. Comme l'a rappelé la présidente Catherine Deroche en CMP, nous ne saurions tolérer sur cette question le moindre malentendu : nous rejoignons nos collègues députés dans la conviction que cette lutte doit être résolument menée, mais nous craignons que l'engouement suscité par la méthode prévue à l'article 10 ne relève en grande partie du mirage.
Le transfert au comptable public du contrôle de légalité de la dépense d'intérim à l'issue de l'engagement de cette dernière exposera nécessairement l'hôpital - et son directeur - à d'importants contentieux.
Contrairement aux critiques formulées par le Gouvernement et par le rapporteur de l'Assemblée nationale sur le dispositif alternatif que nous avions proposé, le recours aux instruments budgétaires ordinaires par lesquels l'établissement de santé rend compte à l'ARS de sa gestion offre bel et bien un degré de précision suffisant pour la détection d'un recours abusif à l'intérim médical.
Ainsi, l'idée de faire figurer au compte financier de l'établissement les dépenses individuelles facturées par intérimaire et, en cas de dépassement du montant journalier évoqué, d'obliger le directeur général de l'ARS à déférer au tribunal administratif les actes contractuels irréguliers, avec recours de plein contentieux, remplissait les mêmes objectifs sans insécurité juridique.
Alors que la navette parlementaire touche à sa fin, nous sommes contraints de constater le maintien de nombreuses divergences et, en conséquence, la probabilité très faible que nous aboutissions à un accord entre nos deux chambres sur ce texte.
C'est pourquoi je vous propose, à ce stade, de procéder au rejet intégral de ses dispositions, et de soumettre à votre examen, au moment de son passage en séance publique, une motion tendant à opposer la question préalable.
Je suis très réservée, depuis le début, sur cette proposition de loi. Il y avait les oubliés du Ségur pour les parties budgétaires et là, sur les parties non budgétaires, il y aura les déçus, les frustrés. C'est d'ailleurs ce qu'avait exprimé Alain Milon dès sa première intervention sur le sujet. Il y a dans tout cela une impréparation terrible. Nous recevons des courriers nous exhortant à défendre telle ou telle profession ou telle ou telle mesure, mais nous ne pouvons pas le faire, puisqu'il n'y a aucune espérance que nos ajouts soient repris par l'Assemblée nationale. Je souscris donc à la proposition de notre rapporteur.
Pour des motifs qui ne sont pas exactement les mêmes que ceux qu'a présentés Alain Milon, nous voterons la question préalable, qui est la seule position cohérente à ce stade.
Certes, quelques avancées ont été apportées par le Sénat, comme le chef de service. Le projet territorial de santé est là pour mettre en place les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et organiser le service des premiers soins dans les départements, en relation bien sûr avec les hôpitaux. Sur l'intérim, on se rend compte qu'il y a des abus. Certains médecins travaillent à 50 % dans les services d'urgence, pour aller faire de l'intérim dans un autre établissement... Il faut trouver des solutions, mais celles qui sont proposées seront préjudiciables. Le directeur de l'hôpital peut être vraiment coincé et, pour la continuité des soins, il est parfois obligé d'avoir recours à l'intérim. Et c'est lui qui sera sanctionné... Je voterai donc la proposition du rapporteur.
Nous ne pouvons qu'être d'accord, nous aussi, sur la pertinence de la question préalable. Un amendement permettait l'accès direct aux orthophonistes, sans passer par la prescription d'un médecin, faisant écho à un accord, si j'ai bonne mémoire. La personne qui portait cette réforme a accepté cet amendement. Notre commission aussi, en précisant les modalités de facturation et en établissant la nécessité d'envoyer un compte rendu, pour respecter le parcours de soins. Et voilà qu'au dernier moment, le Gouvernement a déposé un amendement par surprise, faisant régresser même les acquis des orthophonistes ! Un amendement voté par le Sénat, validé par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, qui était entouré de solides garanties et faisait consensus, ne devrait pas être ainsi évacué. Il y a un problème de méthode, et le résultat est que la profession régresse.
Avec Laurence Cohen, nous pensons que tout cela est une grande perte de temps ! Nous avions proposé une question préalable, qui n'a pas été votée.
Nous avions dit que cela finirait ainsi. Nous savions que tous nos amendements ne seraient pas retenus par l'Assemblée nationale. Certains, que nous avions adoptés tous ensemble, étaient très pertinents. Il en est ainsi de celui concernant les infirmiers anesthésistes diplômés d'État, que le Gouvernement n'a pas voulu retenir. Nous examinerons votre question préalable, vous savez que nous ne sommes pas sectaires : même si elle vient de vous, nous pourrions la voter !
Mon groupe ne vote jamais les questions préalables. J'avais moins de désaccords que vous sur ce texte ; notamment sur l'intérim, je pense que les propositions du texte méritent d'être testées. Sur ce sujet, on a tout essayé, et rien n'a fonctionné... Nous aurons une explication sur le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale. Nous ne voterons pas la question préalable, mais cela ne changera pas grand-chose. Après ce grand Ségur, qui a suscité tant d'espoirs, ce texte manque de corps.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
L'article 1er n'est pas adopté.
Article 1er bis AA (supprimé)
Les amendements identiques COM-5 et COM-1 rectifié ne sont pas adoptés.
L'article 1er bis AA demeure supprimé.
Article 1er bis A
Les amendements identiques COM-8 et COM-12 ne sont pas adoptés.
L'article 1er bis A n'est pas adopté.
Article 1er bis
L'article 1er bis n'est pas adopté.
Chapitre II : L'évolution des professions de sage-femme et de certains auxiliaires médicaux
L'amendement COM-6 n'est pas adopté.
Article 2 bis, 2 quater, 2 quinquies AA, 2 quinquies A, 2 quinquies B et 2 quinquies
Les articles 2 bis, 2 quater, 2 quinquies AA, 2 quinquies A, 2 quinquies B et 2 quinquies ne sont pas adoptés.
Articles 2 sexies et 2 septies (supprimés)
Les articles 2 sexies et 2 septies sont supprimés.
Article 2 octies
L'article 2 octies n'est pas adopté.
Article 2 nonies
Les amendements identiques COM-10, COM-4, COM-13 et COM-3 rectifié ne sont pas adoptés.
L'article 2 nonies n'est pas adopté.
Articles 3 et 4
Les articles 3 et 4 ne sont pas adoptés.
Article 4 quater A (supprimé)
L'article 4 quater A est supprimé.
Articles 4 quater, 5, 5 bis, 6 et 6 bis
Les articles 4 quater, 5, 5 bis, 6 et 6 bis ne sont pas adoptés.
Article 7 bis A (supprimé)
L'article 7 bis A est supprimé.
Articles 7 bis et 8
Les articles 7 bis et 8 ne sont pas adoptés.
Article 8 bis
L'amendement COM-2 rectifié n'est pas adopté.
L'article 8 bis n'est pas adopté.
Articles 9 et 9 bis
Les articles 9 et 9 bis ne sont pas adoptés.
Article 9 ter A (supprimé)
L'amendement COM-7 n'est pas adopté.
L'article 9 ter A demeure supprimé.
Article 9 ter (supprimé)
L'article 9 ter est supprimé.
Articles 10 et 11
Les articles 10 et 11 ne sont pas adoptés.
Article 11 ter
L'amendement COM-9 n'est pas adopté.
L'article 11 ter n'est pas adopté.
Articles 13 quater et 14
Les articles 13 quater et 14 ne sont pas adoptés.
Articles 14 bis et 14 ter
Les articles 14 bis et 14 ter ne sont pas adoptés.
La proposition de loi n'est pas adoptée.
Conformément au premier alinéa de l'article 42 de la Constitution, la discussion en séance portera en conséquence sur le texte initial de la proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.
TABLEAU DES SORTS
Nous examinons les conclusions du rapport d'information sur les orientations et la gouvernance de la politique de santé environnementale.
Sept Français sur dix sont convaincus que l'environnement a un impact sur la santé. En Europe, d'après l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 12 % des décès et 13 % des pathologies sont liés aux expositions environnementales.
Ces chiffres, issus de différentes enquêtes, montrent à quel point les enjeux liés à la santé environnementale sont ancrés dans notre quotidien et suscitent des préoccupations croissantes, tant les facteurs de risque sont, dans certains cas, imperceptibles. La crise sanitaire sert d'accélérateur dans cette prise de conscience : elle révèle l'impact que la dégradation des écosystèmes peut avoir sur la santé humaine et met à jour nos vulnérabilités face à l'émergence des zoonoses.
Elle donne chair au concept « One Health » - « une seule santé » - qui associe santé humaine, animale et végétale et renouvelle l'approche contemporaine de la santé environnementale.
En France, un pas a été franchi par le législateur en 2016 avec l'inscription dans la loi du concept d'« exposome ». Celui-ci consiste à considérer comme un tout l'ensemble des expositions auxquelles un individu est soumis depuis sa conception et susceptibles d'influer sur sa santé : air, eau, alimentation, environnement sonore et professionnel, hygiène de vie, conditions socioéconomiques...
Toutefois, en dépit de quelques avancées, la politique de santé environnementale pâtit des mêmes carences que notre politique de santé publique : elle est l'objet d'un sous-investissement chronique dans un système de santé orienté prioritairement vers le soin. Par essence intersectorielle, elle souffre d'une gestion en silos et d'un insuffisant portage politique.
Institué par la loi « Santé » du 9 août 2004, le plan national santé-environnement (PNSE) souffre ainsi de son insuffisante articulation avec un maquis de 34 plans sectoriels : plan Chlordécone, stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, plan Écophyto II+, plan Radon, plan Micropolluants, plan d'action interministériel Amiante...
Or la logique de santé globale et d'exposome implique de ne pas se contenter d'actions ciblées sur un type d'exposition, mais bien de tenir compte des effets cocktail liés à l'exposition combinée à plusieurs substances, ainsi que du continuum des expositions tout au long de la vie. Elle plaide donc pour une cohérence renforcée entre les plans sectoriels et un interfaçage plus efficient avec les axes stratégiques du PNSE.
Dans ces conditions, nous préconisons de faire du PNSE un plan chapeau de l'ensemble des politiques publiques ayant un lien avec la santé environnementale, orientation qui semble avoir été retenue dans le projet de quatrième PNSE. Par ailleurs, nos propositions s'attachent à renforcer le caractère opérationnel du PNSE, notamment par une meilleure identification de ses moyens et des indicateurs de résultat plus exigeants.
Afin de mieux responsabiliser les pouvoirs publics dans la protection de la santé et du cadre de vie des populations, nous plaidons, en outre, pour la transformation de la commission nationale de la déontologie et des alertes en matière de santé publique et d'environnement en un défenseur des droits en santé environnementale doté de pouvoirs de mise en demeure à l'égard de l'administration centrale et déconcentrée.
Nos propositions visent également à réunir les conditions d'un portage politique proactif et d'une coordination interministérielle effective de la politique de santé environnementale.
Afin d'oeuvrer à une mobilisation collective et coordonnée de l'ensemble des départements ministériels en matière de santé environnementale, nous recommandons l'institution d'un délégué interministériel à la santé globale, qui serait chargé de porter au niveau interministériel la thématique « une seule santé ». Sous l'autorité du Premier ministre, il coordonnerait l'élaboration et la mise en oeuvre des grands plans nationaux de santé publique, dont le PNSE, mais aussi des plans de sécurité sanitaire. Il s'appuierait sur un comité interministériel de la santé rénové, dont les missions évolueraient pour inclure la coordination interministérielle de l'ensemble des politiques publiques susceptibles d'avoir un impact sur la santé humaine, animale et végétale.
Par ailleurs, la réflexion sur les priorités de la politique nationale de santé environnementale s'appuie sur le groupe santé environnement (GSE) afin d'assurer la concertation la plus large possible de l'ensemble des parties prenantes dans l'élaboration du PNSE. Toutefois, il s'agit encore d'une structure informelle, sans pouvoirs à l'égard de l'administration, et aux moyens insuffisants. Afin d'en faire un organe plus opérationnel de réflexion, de définition et de suivi des priorités de la politique nationale de santé environnementale, nous appelons à formaliser son existence dans la loi, en le transformant en conseil national santé environnement doté de prérogatives renforcées et de moyens propres de fonctionnement.
S'agissant des opérateurs de l'État, la tutelle de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSéS), éclatée entre cinq ministères, mérite également d'être clarifiée dans un sens qui fasse prévaloir la protection de la santé sur d'autres intérêts. À l'heure actuelle, l'ANSéS est financée à près des deux tiers par le ministère de l'agriculture. Dès lors, nous préconisons la reconnaissance au ministère de la santé d'un rôle de chef de file dans la tutelle stratégique de l'ANSéS. Cette reconnaissance doit mécaniquement se traduire par une augmentation significative de sa contribution au budget de l'agence, afin de contrebalancer le poids du ministère de l'agriculture.
Un autre axe de notre rapport porte sur l'indispensable territorialisation des politiques de santé environnementale.
La plupart des leviers d'actions en faveur d'un cadre de vie sain se situent en effet au niveau territorial, que ce soit à travers les politiques d'urbanisme, de mobilité, d'aménagement de l'espace ou encore de petite enfance. C'est également à cet échelon de proximité que ces enjeux transversaux peuvent apparaître les plus tangibles, ce qui facilite leur nécessaire appropriation par la population.
Nos auditions d'acteurs locaux - de Nouvelle-Aquitaine, Paris et Strasbourg - ou d'associations nous montrent que de nombreuses initiatives se mettent en place, souvent sur une base volontariste.
Le sujet est cependant investi de manière très hétérogène.
La mobilisation des acteurs locaux est ainsi pénalisée par une approche essentiellement descendante et encore trop cloisonnée de la politique de santé environnementale.
Les plans régionaux santé-environnement (PRSE), chargés de décliner en région le plan national, ont contribué à structurer des actions, fédérer les acteurs et engager le débat public au niveau régional sur ces thématiques.
Mais ces outils, peu intégrés aux autres politiques locales, peinent à insuffler une véritable dynamique. Les moyens consacrés à leur mise en oeuvre et à leur animation sont modestes, avec souvent moins d'un équivalent temps plein (ETP) mobilisé dans les agences régionales de santé (ARS). En outre, si certaines régions ont développé des outils de diagnostic territorial pour cibler les actions sur les préoccupations les plus saillantes pour la région, les plans régionaux ressemblent trop souvent au plan national. Les dispositifs de remontée de bonnes pratiques, de partage d'expériences ou de mutualisation sont perçus comme très insuffisants.
Pour les acteurs locaux, la superposition de plans sectoriels ou autres schémas nationaux comme régionaux constitue un ensemble complexe, lourd, contraignant et peu opérationnel : « c'est la jungle quand les plans arrivent dans les territoires », pour reprendre les propos de la vice-présidente de l'Eurométropole de Strasbourg.
Il n'est pas étonnant, dès lors, que l'appropriation de ces enjeux dans les territoires reste aléatoire, tant les sujets sont complexes, souvent techniques, et protéiformes.
Il faut selon nous changer d'approche. Pour ancrer les actions en santé environnementale dans les différentes politiques locales, les élus locaux doivent être outillés et accompagnés, en les sensibilisant sur les leviers d'action dont ils disposent. Il est également essentiel de fédérer le réseau d'experts et de partenaires en région en leur permettant de s'autosaisir de thématiques et de mutualiser les ressources et expériences, en appui aux décideurs locaux.
Nous proposons la mise en place d'un portail d'information et centre de ressources dans chaque région et la généralisation d'observatoires régionaux en santé environnementale, pour affiner la connaissance des réalités du terrain et des enjeux prioritaires. Des actions concrètes et ciblées permettent en effet d'agir plus efficacement sur les déterminants sociaux et environnementaux qui constituent une part prédominante des inégalités de santé.
Le portage politique de ces actions appelle, en outre, une clarification du pilotage territorial.
La santé est d'abord une compétence de l'État, même si les collectivités concourent au développement sanitaire des territoires : elles sont investies de prérogatives historiques en matière de salubrité ou d'hygiène pour les communes ou leurs groupements, ou encore d'un rôle de chef de file pour l'aménagement durable du territoire s'agissant des régions. Ces compétences sont un point d'entrée, depuis longtemps, dans la politique de santé environnementale.
Mais les collectivités ne sont pas formellement investies d'une responsabilité sur ce champ. Celle-ci mériterait selon nous d'être plus clairement affirmée.
Bien évidemment, les régions, déjà co-pilotes du PRSE avec les ARS et les préfets, ont un rôle stratégique à jouer, en particulier dans le cadre du schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires. Toutefois, les enjeux transverses de la santé environnementale impliquent également de mobiliser les différents échelons territoriaux pour gagner en efficacité.
Les outils de contractualisation souples que sont les contrats de plan État-région ou les contrats locaux de santé sont à cet égard des leviers intéressants, car ils répondent à une logique plus horizontale que descendante. Des financements pérennes pourraient y être adossés pour accompagner les collectivités dans la conduite de projets.
Nous proposons enfin de généraliser les démarches d'évaluation d'impact sur la santé pour des projets d'aménagement locaux. Suivant le concept d'urbanisme favorable à la santé, cela permet de promouvoir une approche positive et intégrée de la santé environnementale, qui ne se réduit pas à des actions techniques de réduction des risques. En ancrant ces enjeux dans le quotidien, nous sensibiliserons plus largement élus et citoyens.
La troisième partie de notre rapport plaide pour un renforcement et une meilleure diffusion de la connaissance scientifique en santé environnementale.
Nous disposons sur notre territoire d'équipes de recherche de pointe et une dizaine de laboratoires se consacrent à l'étude des interactions entre santé et environnement. On peut notamment citer l'Institut de recherche en santé, environnement et travail (Irset) de Rennes, l'Institute for Advanced Biosciences de Grenoble ou encore les alliances thématiques de recherche, qui sont utiles pour fédérer les acteurs autour de grands projets transversaux.
De tels projets sont déployés au niveau européen dans le cadre du programme « Horizon 2020 », qui comprend un axe d'étude sur l'exposome. L'Union européenne finance ainsi neuf projets de recherche, dont deux associent des équipes de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Ces deux projets, qui portent sur la contribution de l'exposome à certaines maladies respiratoires et sur les effets de multiples expositions sur la santé pendant les vingt premières années de la vie, sont respectivement soutenus à hauteur de 11 et 12 millions d'euros par l'Union européenne.
Au niveau national, le financement de la recherche est bien plus limité et fragmenté. L'Agence nationale de la recherche (ANR) finance des projets par l'intermédiaire d'appels à projets génériques ouverts à toute discipline pour lesquels peu de travaux de recherche en santé environnementale sont finalement retenus. Avec son programme national de recherche en environnement, santé et travail, l'ANSéS est également un acteur du financement de la recherche, mais ses moyens sont limités, puisque ce programme a financé 34 projets en 2020 pour un budget de 6 millions d'euros. Il existe quelques autres sources de financement en provenance d'autres agences, dont l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), de collectivités territoriales ou encore d'acteurs privés.
Au total, l'effort public de recherche est donc relativement limité et éclaté. La France consacre environ 25 millions d'euros par an à la recherche en santé environnementale, soit le quart du budget de la recherche consacré à ce domaine aux États-Unis, une fois celui-ci ramené à la population. Seuls les financements européens semblent permettre de développer des projets plus significatifs. Or, les équipes de recherche sont insuffisamment accompagnées pour s'engager dans ces appels à projets d'ampleur, qui nécessitent un important soutien administratif.
Alors que nous ne connaissons encore qu'une infime partie des interactions entre santé et environnement, il nous semble nécessaire de mieux structurer l'effort de recherche en France. Nous proposons à cette fin de créer un consortium consacré à la recherche en santé environnementale, fédérant les principaux laboratoires et instituts de recherche dans ce domaine, afin de coordonner la programmation de la recherche et d'accompagner les initiatives dans l'obtention des financements nationaux et internationaux.
Nous considérons qu'il faut également consolider les liens entre la recherche fondamentale et la recherche appliquée en santé afin de renforcer la prise en compte de la santé environnementale dans les études cliniques et les parcours de soins. Nous proposons ainsi de créer un institut hospitalo-universitaire (IHU) en santé environnementale pour faire le pont entre connaissance scientifique et pratique de soins, en fédérant soignants et chercheurs. En complément, nous considérons que le développement de centres nationaux de référence sur certaines pathologies en lien avec les expositions environnementales devrait être étudié. Ces centres, qui sont très développés pour les maladies transmissibles, assurent un rôle d'expertise scientifique et de surveillance épidémiologique fort utile.
En outre, la progression de la connaissance scientifique ne peut se faire sans observer et analyser les effets de l'environnement sur la santé de la population générale. C'est pourquoi nous proposons de renforcer la qualité des données épidémiologiques. Il existe un grand nombre d'informations sur la santé de la population générale à travers le système national des données de santé, géré par la plateforme Health Data Hub, ainsi que par le déploiement d'études de cohortes et de registres de pathologies. Ces données sont néanmoins assez rarement recueillies dans le but d'évaluer les effets des expositions environnementales, ce qui limite leur capacité d'exploitation à des fins d'analyse et d'évaluation en santé-environnement. Elles sont en outre peu interopérables, que ce soit entre elles ou avec les données environnementales, relativement limitées.
Ces difficultés techniques obèrent les possibilités de mener des enquêtes épidémiologiques afin de déterminer les causes environnementales expliquant la prévalence d'une maladie ou la survenue d'un évènement de santé sur un territoire donné. Ce fut par exemple le cas pour l'enquête de Santé publique France sur le cluster de cancers pédiatriques à Sainte-Pazanne, en Loire-Atlantique.
Pour ces raisons, nous considérons, d'une part, que des registres de morbi-mortalité devraient être développés sur des pathologies dont le lien avec des facteurs environnementaux est fortement soupçonné par la littérature scientifique, car ils permettent d'obtenir des données robustes et exhaustives sur les pathologies qu'ils couvrent.
D'autre part, nous soutenons le projet de création d'un Green Data Hub tel qu'il est prévu dans le PNSE 4. Il s'agirait d'une plateforme de données environnementales à des fins de santé. Son utilité sera conditionnée, selon nous, à la possibilité de croiser ces données avec les données de santé et à l'alimentation de cette plateforme par des données environnementales fines et exhaustives, ce qui suppose d'accroître les moyens alloués au recueil de ces données.
Enfin, la montée en puissance des informations disponibles doit s'accompagner de leur large diffusion pour sensibiliser les professionnels de santé et le grand public.
S'agissant des professionnels de santé, nous considérons que les enjeux de santé-environnement devraient être plus largement diffusés dans les communautés de professionnels, par l'intermédiaire des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS, des sociétés savantes et des ordres. Les questions de santé environnementale devraient en outre s'intégrer à la formation en santé publique dispensée aux médecins. Pour développer l'expertise médicale sur ce sujet, nous pensons également qu'un diplôme d'études spécialisées complémentaires (DESC) de médecine en toxicologie environnementale pourrait être mis en place.
Pour sensibiliser le grand public, il est nécessaire de traduire les apports de la science en recommandations de bonnes pratiques. Santé publique France a développé un site internet pour les parents, appelé « Agir pour bébé », afin de leur transmettre des recommandations concrètes pour la santé des jeunes enfants. Nous proposons qu'un portail similaire soit développé pour l'ensemble du grand public, afin de diffuser des conseils de bonnes pratiques dans la vie quotidienne.
Grâce à l'information du public et à l'éducation à la santé, nos concitoyens s'empareront davantage de ces enjeux, mis en lumière par la crise sanitaire, pour mieux maîtriser les effets de l'environnement sur leur santé. En réponse à ces préoccupations, il est essentiel que les pouvoirs publics prennent davantage en compte la santé environnementale dans l'ensemble des politiques publiques, en se fondant sur une connaissance scientifique plus robuste.
C'est un sujet important. J'ai récemment participé à des rencontres sur le cancer, qui montraient bien que le lien avec l'environnement est sous-estimé. Pour les cas de Sainte-Pazanne, en Loire-Atlantique, on ne trouve aucune explication.
Dans les années 1980, j'ai découvert la définition que donnait l'OMS de la santé : non pas une absence de maladie ou de symptômes de maladie, mais une notion plus générale de bien-être. Aujourd'hui, parler de santé environnementale sonne comme une évidence, tant mieux ! J'ai rencontré le collectif des parents d'enfants atteints de cancer la semaine dernière. Je leur ai parlé de ce rapport, et ils sont très intéressés. Vous dites que les faits sont inexpliqués. C'est vrai qu'avec les outils d'aujourd'hui, on ne trouve rien. Quand je pose la question au directeur de l'ARS des Pays de la Loire, il me répond très formellement, me dit que les analyses ont eu lieu : circulez, il n'y a rien à voir ! Or les parents sont devenus de véritables experts, dont le niveau de connaissance est impressionnant. Ils pointent surtout du doigt l'absence d'organisation telle que vous la proposez. Il n'y a pas d'observatoire local, départemental. Les observations existantes sont lissées au niveau régional, alors qu'il y a tout de même eu 24 cas de cancers pédiatriques depuis 2015 ! Or, pour poser les bonnes questions, il faut disposer des bonnes données, au bon niveau.
Il est bon que nous ayons ce temps de réflexion et d'analyse. Il l'est tout autant qu'on puisse disposer au niveau local, et au niveau régional, de données objectivées. Dans mon département, à une époque, une école maternelle était installée sur un ancien site Kodak.
Il y a eu quatre cas de cancers des testicules chez les jeunes enfants. Nous ne disposions pas, alors, des données d'aujourd'hui. J'étais en contact avec un couple de parents, qui étaient totalement désemparés. Beaucoup de temps s'est écoulé depuis, et la prise de conscience est beaucoup plus développée, tant mieux - même si elle n'est pas toujours suivie des actes nécessaires.
Parmi les recommandations, figure la volonté d'organiser des choses au niveau local. Mais il faut aussi - et le rapport le dit - une conduite nationale. Les collectivités ne doivent pas être livrées à elles-mêmes. Cela nous renvoie aux questions de budget. Il faut allouer des moyens à la santé environnementale pour organiser une véritable lutte contre ce fléau. Ne pourrait-on pas mettre à contribution les employeurs, qui sont souvent des producteurs de pollution et de nuisances environnementales ?
Vous questionnez le rôle de l'ANSéS. Notre commission des affaires sociales a souvent eu des réflexions et des échanges sur les agences. Le constat est unanime d'un manque de transparence sur le travail accompli, et surtout d'un manque de moyens humains et matériels. On a toujours tendance à charger la barque des agences, peut-être à juste titre, sans leur donner les moyens humains et matériels correspondants.
Dans le cadre du rapport sur l'incendie de l'usine Lubrizol, j'ai pu constater la lourdeur administrative qui caractérisait l'appareil d'État pour informer les Français en cas d'accident industriel. Lorsqu'on parle de santé environnementale et d'enjeux de long terme, il faut aussi penser à la culture d'anticipation pour gérer ces éléments accidentels. Force est de constater qu'aujourd'hui cette culture n'existe pas, ou peu. Quelle est la place laissée à la gestion de la survenance d'accidents industriels en matière de santé environnementale ?
Merci aux rapporteurs d'avoir demandé ce rapport. Il est important d'essayer de circonscrire l'ensemble des pathologies pouvant être liées à l'environnement. À vrai dire, je m'attendais à un rapport plus étendu. Vous vous êtes concentrés sur l'environnement physique de nos concitoyens. J'aurais aimé qu'on parle aussi de l'environnement familial, professionnel, des réseaux... On sait que ces environnements ont un effet psychologique, et parfois même physique, qui peut être dramatique. En particulier, l'absence d'environnement familial a une forte influence sur le psychisme des personnes âgées. Et l'influence de l'environnement dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ephad) sur ce psychisme serait intéressante à étudier. J'en ai discuté avec la présidente Deroche et le président Larcher, et j'espère qu'on pourra lancer un travail sur la question. Les psychiatres se sont rendu compte qu'entre 18 et 25 % des maladies psychotiques durables étaient consécutives à des gestes d'inceste ou à des viols dans la jeunesse. Le diagnostic n'étant pas fait rapidement, la psychose s'installe et il faut soigner ces patients psychotiques pendant des dizaines d'années. Si le diagnostic était fait plus tôt, grâce à la connaissance de l'environnement, on pourrait éviter ce genre de drame.
À Sainte-Pazanne, le recueil des informations est très insuffisant. Il se fait de façon ponctuelle, selon les équipes médicales, et par région, sous forme de registres. Voilà quarante ans qu'on nous demande, dans les hôpitaux, de coder les pathologies - souvent d'ailleurs pour des raisons comptables. Cela aboutit à un recueil de données assez considérable, dont on n'a jamais tiré de statistiques efficaces et cohérentes sur l'ensemble du territoire. En matière de registre, il faut aller beaucoup plus loin, et ne pas laisser l'initiative qu'à certains médecins. Pour les cancers pédiatriques, les données sont relativement structurées, mais il y a beaucoup de pathologies pour lesquelles ces registres ne sont pas utilisés. Des enfants naissent sans membres dans différents endroits du territoire, sans qu'on ait fait de lien entre les cas isolés.
Sur un ancien site industriel, le problème est la prospective. Quand on ferme un site industriel et qu'on y installe des bâtiments pour des écoles, des collèges ou autre, il faut d'emblée se préoccuper de la suite. Nous avons reçu Santé publique France à propos de Lubrizol. Je n'ai pas senti une grande appétence pour mener ces investigations... Surtout, il n'y a pas de moyens alloués. Par exemple, en tant que pédiatre, je me disais qu'on pourrait suivre la qualité du lait maternel pendant quelques mois après cet événement. Cela n'a pas du tout été envisagé. Pourtant, cela ne demanderait pas forcément des moyens financiers énormes. Bref, sur les cohortes et la prospective, il faut vraiment avancer.
Je sais bien que les pensionnaires d'un foyer d'accueil médicalisé ont, pour 90 %, d'entre eux, subi des viols dans l'enfance. Mais c'est plus un sujet de société que d'environnement. Le site « Agir pour bébé » ou le rapport consacré aux 1 000 premiers jours de l'enfant ont popularisé la nécessité de se préoccuper d'environnement dès la conception.
Au niveau local, l'une des limites est que nous n'arrivons pas à croiser les données épidémiologiques avec les données d'exposition. Santé publique France n'est pas de mauvaise volonté, et ce n'est pas qu'une question de moyens. Ce qui sera important dans le Green Data Hub, c'est de croiser les données. À cet égard, l'observation locale est très importante. La logique actuelle est très descendante. Nous avons voulu promouvoir une logique ascendante, en insistant sur les observatoires régionaux de la santé et de la santé environnementale.
Sur Lubrizol, les représentants de l'administration semblaient très satisfaits. Nous avons essayé de leur expliquer qu'il y avait une question de culture d'État, en santé environnementale comme sur beaucoup d'autres sujets, notamment dans la crise sanitaire actuelle. La question est de savoir comment modifier cette culture d'État. J'ai été très étonné d'entendre il y a quelques jours un responsable important de la majorité présidentielle dire que, sur ce sujet, ils avaient échoué, comme les gouvernements précédents. De fait, modifier cette culture d'État dans notre pays est très compliqué. En matière de santé environnementale, une part de décentralisation nouvelle est nécessaire, bien sûr. Mais il y a aussi une question d'articulation. Si on ne fait que de la décentralisation, on reproduira les mêmes erreurs au niveau des territoires, les mêmes modes de pensée et de fonctionnement.
Vous avez évoqué la manière dont fonctionnent les agences, au-delà de la question des moyens. L'ANSéS réunit autour de la table cinq ministères différents et des industriels, des parties prenantes, des personnes et des organisations qui mettent sur le marché ou qui vendent des produits soumis à autorisation par l'agence. Est-ce problématique ? Nous disons que non. On ne peut pas faire de la santé environnementale uniquement avec le ministère de la santé. Si l'on reconnaît que l'urbanisme est important, que l'alimentation est importante, on ne peut pas écarter d'autres acteurs, sous peine de manquer complètement l'articulation entre les différents enjeux. Il est indispensable, notamment, que le monde de l'agriculture soit partie prenante de la politique de santé environnementale. Mais il faut empêcher qu'on puisse être juge et partie.
Le champ de la santé mentale est très vaste. Si tout est dans tout, comment concevoir une gouvernance ? On peut dire qu'une personne décide de tout... Nous avons opté pour un exercice très réformiste, en cherchant comment améliorer les articulations du système actuel, la participation des parties prenantes, etc. Si nous n'avions pas restreint le champ, il nous aurait fallu dix ans !
J'ai contribué à l'élaboration des PRSE dans ma région et je peux témoigner qu'une prise de conscience des élus est nécessaire, sans doute plus qu'un délégué interministériel. La santé doit être le fil conducteur des politiques menées par les collectivités dans le cadre de leurs compétences respectives au niveau régional, départemental et communal.
Il faut sans doute donner plus de moyens aux observatoires afin qu'ils puissent jouer un vrai rôle.
L'environnement n'est pas que l'air et l'eau, il faut élargir la réflexion à l'urbanisme et même à l'habitat.
J'ai été un peu déçu par vos propos liminaires, je suis quelque peu rassuré par vos réponses. Attention aux usines à gaz et aux plans à rallonge ! Il faut pouvoir associer la collecte des données et leur exploitation concrète. L'IHU peut être une bonne formule, et les études observationnelles me semblent être une bonne approche.
Il faut faire du dossier médical partagé (DMP) un outil véritablement exploitable et ne pas ajouter de nouveaux documents ou « hubs » qui s'empileraient sans qu'on puisse les exploiter correctement. Je rappelle que nous ne sommes toujours pas parvenus à mettre réellement en place un carnet de vaccination électronique.
Il me semble important de développer la recherche clinique. Il me semble que l'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) pourrait apporter les éléments de nature à faire avancer les choses en la matière. Les expositions que subissent les femmes enceintes doivent faire l'objet d'un suivi particulier.
Il me semble qu'il y a eu une amélioration entre les PNSE 3 et 4, avec notamment un resserrement du nombre d'objectifs et d'actions. Il convient d'être exigeant quant à l'évaluation.
Il faut que les déclinaisons locales soient adaptées aux besoins des territoires. Dans ma région, je sais qu'il y a de vraies tensions entre l'ARS et le président du conseil régional sur la façon dont il faut organiser la gouvernance sur ce sujet.
Nous disposons de nombreuses données, il nous faut progresser dans leur exploitation. Un IHU nous semble présenter une évolution pertinente en ce sens.
Il est regrettable que le DMP ne se développe pas davantage, notamment dans le contexte actuel.
Il faut des évaluations prospectives, des suivis de cohorte sur longue période.
La période de grossesse est une période cruciale, elle doit permettre une sensibilisation sur les enjeux de santé environnementale mais il faut que la prise de conscience perdure au-delà.
Monsieur Savary, l'usine à gaz existe déjà... Nous avons auditionné tous les acteurs : ils sont tous insatisfaits. Le GSE, présidé par une parlementaire - la députée Élisabeth Toutut-Picard, que nous avons entendue -, se réunit régulièrement, avec les chercheurs et les associations, il fait des propositions mais rien n'en sort. Nous ne créons rien : nous transformons le GSE pour le rendre opérationnel, pour faire en sorte que les expertises qui y sont versées soient utiles.
Le délégué interministériel que nous proposons s'inscrit dans la continuité de celui que nous proposions dans le rapport de la commission d'enquête sur la gestion de l'épidémie de covid-19. Car nous voyons bien qu'il y a un problème de gouvernance de la santé dans notre pays, et que la solution dépasse le ministère de la santé. Que faire, dès lors ? Renforcer les pouvoirs du Premier ministre ? Aménageons simplement un échelon où se feront la coordination et le pilotage nécessaires. Et c'est tout ! Il s'appelle délégué à la santé globale car il regroupe la santé environnementale et la sécurité sanitaire. Nous avons fait attention à ne pas empiler les structures, car l'essentiel est de produire de la décision.
La question se pose aussi au niveau régional, où règne un grand flou, mais elle se pose là différemment. Nous avons auditionné par exemple des représentants de l'Eurométropole de Strasbourg, de la Ville de Paris ou encore de la région Nouvelle-Aquitaine, et constaté qu'il y avait au niveau infranational de nombreuses initiatives intéressantes. Nous pensons donc que les régions doivent avoir la compétence en santé environnementale, mais sans préjudice de ce que font les autres collectivités de proximité.
Sur le DMP, qui ne fonctionne toujours pas, bien que les pharmaciens en aient ouvert beaucoup, nous rejoignons le constat que faisaient déjà nos collègues Stéphane Artano et Pascale Gruny dans leur rapport sur la santé au travail.
L'Assemblée nationale a en effet créé une commission d'enquête dont la présidente est Élisabeth Toutut-Picard et la rapporteure Sandrine Josso. Nous avons évidemment regardé leurs travaux de près. L'intérêt de mener ces réflexions en ce moment est que le PNSE 4 est encore en cours de finalisation - il doit être publié en mai.
Je ne ferai pas de comparaison entre nos travaux et ceux de nos collègues députés. Je dirai simplement, en espérant ne pas être trop caricatural, que nous avons axé notre travail sur l'organisation de la santé environnementale, et l'Assemblée nationale le sien sur l'information et la sensibilisation du public.
J'ai reçu la semaine dernière la fédération des registres des cancers - il s'agit dans mon département de l'association épidémiologie des cancers en Pays de la Loire (Epic-PL) : eux aussi ont de gros problèmes d'accès aux données de santé. J'ai alerté le président de l'institut national du cancer (INCa) à ce sujet. Il y aura sûrement des choses à faire pour leur faciliter l'accès à ces informations.
La commission des affaires sociales autorise la publication du rapport d'information.
Permettez-moi avant toute chose de remercier Catherine Deroche de l'opportunité qu'elle me donne de vous présenter ce travail, ainsi qu'Alain Milon et René-Paul Savary, qui ont évoqué ce sujet par le passé en commission des affaires sociales.
Les phages sont connus depuis plus d'un siècle, suite aux découvertes du savant franco-canadien Félix d'Hérelle durant la Première Guerre mondiale. Ils sont les virus naturels des bactéries, présents en abondance dans notre environnement. Ils ont la capacité fantastique d'infecter la bactérie et d'ensuite se multiplier au sein de celle-ci, jusqu'à la faire éclater et la tuer.
C'est cette propriété des phages dits « lytiques » qui est intéressante sur le plan thérapeutique, puisqu'on peut ainsi traiter des patients atteints d'infections bactériennes. C'est ce qu'ont fait les pionniers de la phagothérapie à partir de 1917 et jusqu'aux années 1940, mais de manière très empirique et avec des résultats assez aléatoires.
Car la phagothérapie nécessite de la précision : il faut chercher le bon phage qui s'adapte à la bonne bactérie. En effet, les phages n'ont pas un large spectre d'action ; la phagothérapie reste une thérapie de précision.
L'arrivée des antibiotiques dans les années 1940 puis leur développement spectaculaire après la Seconde Guerre mondiale a rendu obsolète la phagothérapie, puisqu'on disposait avec les antibiotiques d'une arme peu coûteuse et à large spectre d'action, efficace contre les infections bactériennes les plus courantes. Il n'y a que dans les pays du bloc soviétique, où l'accès aux antibiotiques était restreint, qu'une connaissance et une utilisation habituelle des phages ont été conservées, notamment en Géorgie où un disciple de Félix d'Hérelle, Georges Eliava, a fondé un institut qui détient aujourd'hui une collection importante de bactériophages et soigne les patients qui y sont accueillis.
Partout ailleurs, et en particulier en Europe, nous ne disposons plus aujourd'hui de médicaments à base de phages et nous ne pouvons donc pas pratiquer la phagothérapie, même si les phages ont été utilisés en France assez longtemps : on m'a montré des pages du dictionnaire Vidal de 1978, époque à laquelle on pouvait aller en chercher à la pharmacie !
Or, avec le développement des bactéries multirésistantes (BMR), on ne peut plus faire reposer notre arsenal thérapeutique entièrement sur l'antibiothérapie. Il faut trouver des alternatives. Rappelons en effet que l'on estime à environ 25 000 le nombre de décès par an en Europe dûs à l'antibiorésistance. Et ce chiffre est appelé à augmenter. L'enjeu n'est donc pas mince.
Les avantages des phages sont nombreux.
Le traitement est rapide : une seule application peut suffire car lorsqu'un phage infecte une bactérie, il s'y reproduit jusqu'à tuer la bactérie-hôte et les phages libérés lors de cette destruction vont ensuite infecter les bactéries voisines.
Il n'y a pas d'effets secondaires et, contrairement à l'antibiothérapie, la phagothérapie est très ciblée et ne modifie pas l'ensemble du microbiome du patient.
Enfin, les phages ont la capacité de s'attaquer au biofilm bactérien dont on sait qu'il bloque l'action des antibiotiques, si bien qu'en combinant phages et antibiotiques, en particulier sur les infections de prothèses, on peut casser le biofilm et traiter les bactéries avec efficacité.
Nombreux sont les domaines où l'utilisation des phages pourrait être pertinente : infections ostéo-articulaires, mais aussi infections respiratoires, urinaires, infections cutanées.
Mais, pour le moment, l'utilisation des phages est très limitée, bloquée au stade des traitements expérimentaux à titre compassionnel.
Un traitement par phage passe par plusieurs étapes.
D'abord, l'identification du « bon phage », actif sur la bactérie qui infecte le patient, grâce à un phagogramme, qui suppose de disposer préalablement d'une bibliothèque de phages.
Ensuite, la production d'une solution contenant ces phages, suffisamment purifiée pour pouvoir être administrée au patient.
Enfin, l'administration au patient de la solution elle-même, par voie locale, intraveineuse ou autre, visant à éviter que le phage ne soit détruit par des mécanismes biologiques ou mécanique avant d'atteindre sa cible.
Nous ne disposons aujourd'hui d'aucun médicament reconnu de phagothérapie. Pour cela, il faudrait qu'un laboratoire produisant des phages ou des cocktails de phage ait fait la démonstration de l'efficacité et de la sécurité d'une spécialité pharmaceutique dont il envisage la commercialisation à travers des essais cliniques menés avec des produits respectant les bonnes pratiques de fabrication (BPF) et suivant les normes habituelles applicables aux médicaments - notamment les essais randomisés - puisque les autorités règlementaires considèrent que les phages sont des médicaments et que la réglementation s'applique à eux en totalité. À ce jour, en France, seul un essai clinique a été mené avec des résultats mitigés - Phagoburn - et un autre doit être lancé prochainement par une petite société nommée Phercydes Pharma.
La seule façon d'utiliser les phages est donc au coup par coup, de manière expérimentale, dans des établissements qui proposent à leurs patients un traitement de la dernière chance, à titre compassionnel, en fabricant des produits sous la forme de préparations magistrales pharmaceutiques et en s'appuyant sur un réseau de laboratoires et pharmacies hospitalières qui mènent des recherches sur cette question : hôpital Reine-Astrid de Bruxelles, Université de Lausanne, Hospices civils de Lyon, Assistance publique des hôpitaux de Paris.
Pendant ce temps, faute de solutions adaptées, certains patients souffrant trop, proches de l'amputation ou même des soins palliatifs, se tournent vers le tourisme médical et obtiennent des résultats, en dehors de toute validation scientifique.
Un premier blocage est économique : les phages ne sont pas brevetables en tant que tels (car issus de la nature), un traitement par phage n'est pas un traitement au long cours, et donc pas rentabilisable comme un produit destiné à un malade chronique. Ils ne semblent donc pas beaucoup intéresser les grands laboratoires pharmaceutiques.
Un autre blocage est scientifique : les phages sont très spécifiques et il est difficile de trouver beaucoup de cas similaires et donc de mener des essais randomisés contrôlés pour prouver l'efficacité et l'innocuité des phages, même si l'expérience laisse penser qu'ils sont efficaces et sûrs. Or la règlementation européenne et nationale des médicaments exige des preuves avant d'admettre un nouveau médicament sur le marché.
Trois pistes peuvent être envisagées.
La première consisterait à renforcer le cadre de recherche sur les phages, en mettant en place un registre répertoriant toutes les utilisations. Renforcer l'effort de recherche pourrait aussi conduire à se pencher sur les questions liées à la perte d'efficacité des phages du fait de la coévolution entre phages et bactéries ou encore sur l'utilisation de phages génétiquement modifiés.
La deuxième créerait un cadre facilitant la fabrication d'un large éventail de phages. Il y a la place pour un système dual avec d'un côté des phages « commerciaux » sous forme de cocktails proposés par des laboratoires pharmaceutiques, et d'un autre côté des phages « académiques », produits à façon, pour traiter des cas plus rares. Les hospices civils de Lyon viennent de mettre en place une telle structure de production.
La troisième ouvrirait un chantier, en lien avec les autorités réglementaires et notamment en France avec l'agence de sécurité du médicament (ANSM), du cadre juridique de la phagothérapie : faut-il alléger les essais cliniques pour les phages ou mettre en place un statut distinct de celui des médicaments (par exemple se rapprochant des probiotiques) pour les phages ? Il est clair que le cadre juridique applicable aujourd'hui aux phages bloque le développement de la phagothérapie.
Nous avions voté un amendement allégeant la procédure dans le PLFSS pour 2021, qui n'a malheureusement pas été retenu par l'Assemblée nationale.
Pour conclure, soulignons que l'antibiorésistance est une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes et à l'heure où certains pays comme les États-Unis investissent dans la phagothérapie, il serait plus que dommage que la France rate le coche de la renaissance d'une médecine ancienne, qui pourrait connaître un véritable regain d'intérêt en rendant un immense service à nombre de patients en situation d'impasse thérapeutique.
On se heurte une nouvelle fois à la rigidité administrative.
C'est un autre exemple de l'opposition entre les études observationnelles et les études randomisées.
Nous avons par ailleurs un système d'autorisation d'accès compassionnel aux traitements innovants qui n'est pas forcément adapté aux innovations.
Sans doute est-ce tiré par les cheveux, mais, par préférence au circuit d'accès dérogatoire des médicaments innovants, ne pourrions-nous pas plutôt considérer le phage comme un dispositif médical et lui faire bénéficier de cette qualité ?
Merci à Catherine Procaccia de sa présentation.
Je comprends qu'un patient résistant aux antibiotiques ne peut donc pas avoir accès à cette thérapie spécifique. Le professeur Jean-Damien Ricard de l'université Paris-Diderot dit qu'il faudrait modifier le statut des phages et les classer comme préparation magistrale produite en pharmacie, et non plus comme biomédicament. Les Belges ont semble-t-il procédé ainsi en 2018. Pourrait-on faire de même ?
Vous avez évoqué le chiffre éloquent de 25 000 décès par an liés à l'antibiorésistance. C'est tout de même considérable !
Nous connaissions les lenteurs de notre procédure d'autorisation de mise sous le marché, que la crise sanitaire a particulièrement mises en lumière. Je rappelle que le retard de déploiement des tests RT-PCR est en grande partie dû à l'absence de sollicitation des laboratoires vétérinaires, qui étaient pourtant en capacité de les tester. Les autorisations ont mis des semaines, voire des mois à être attribuées !
J'ai été un peu déçue à l'issue de mon travail pour proposer des solutions. L'ANSM et l'agence européenne du médicament (EMA) restent à ce jour attachées à l'attribution de la qualité de médicament au phage et, à ce titre, seule la procédure de l'autorisation de mise sur le marché d'un médicament lui est applicable.
J'ai récemment discuté avec un élu de mon département qui m'a dit qu'à l'hôpital Henri-Mondor, un chirurgien cardiologue utilisait les phages en cas d'infection nosocomiale. Quelques personnes s'en procurent donc, manifestement en passant par la Belgique, soit par les hospices civils de Lyon...
Il ne faudrait pas, si on se met à les utiliser de nouveau, que l'on provoque des résistances, similaire à celles qu'ont connues les antibiotiques. Il faudrait donc inclure leur usage dans une réflexion plus globale.
En conclusion, j'insiste sur le fait que les phages ne remplaceront pas les antibiotiques, qui continueront de soigner les patients dans 90 % des cas. Les phages ne remettent pas en cause les antibiotiques.
Je trouve la piste très intéressante et insuffisamment valorisée, sans doute pour des raisons économiques.
L'alternative privilégiée à l'antiobiorésistance a été un changement des panels d'antibiogrammes, afin de développer les synergies des antibiotiques entre eux. Ces panels spécifiques permettent des concentrations beaucoup plus importantes pour soigner les personnes atteintes de bactéries très résistantes.
Les phages seraient peut-être moins coûteux...
L'une des pistes à privilégier ne serait-elle pas de reconnaître le phage comme préparation magistrale, comme l'indiquait notre collègue Christine Bonfanti-Dossat, puis de réserver sa prescription aux seuls médecins hospitaliers ? On pourrait limiter dans un premier temps sa production à un centre national de référence et on restreindrait sa dispensation à l'hôpital. Cela me paraîtrait raisonnable.
J'ignore en revanche les conditions de conservation et de transport.
Les hospices de Lyon veulent effectivement devenir un centre national de référence et devenir une « phagotech », sans bénéficier pour l'instant de la surface nécessaire. Le Gouvernement y est pour l'heure malheureusement réticent.
Pour le moment, un phage reste coûteux, de l'ordre de 10 000 euros par phage.
Sur le blocage administratif, les États-Unis ont déjà mobilisé leurs start-ups sur le développement des phages, nous alertant sur les retards que nos procédures nous font prendre.
La commission désigne Mme Catherine Procaccia rapporteur sur la responsabilité civile de certains professionnels de santé.
La réunion est close à 10 h 35.