Intervention de Roland Courteau

Réunion du 30 septembre 2010 à 9h30
Nouvelle organisation du marché de l'électricité — Article 9

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

L’article 9 de ce projet de loi vise à transposer dès à présent l’article 3 de la directive 2009/72/CE, constitutive du troisième paquet énergie adopté en juillet 2009. Or, un an après cette adoption, lors du conseil « Énergie » du 6 septembre 2010, les États membres ont fait un constat pour le moins inquiétant sur la qualité de la protection des consommateurs dans le processus d’ouverture à la concurrence des marchés de l’énergie.

Certains des ministres de l’énergie ont effectivement observé que cette libéralisation poussée n’avait pas conduit à plus de transparence dans le secteur énergétique ni, surtout, à une baisse des prix pour les consommateurs. Or il s’agissait de l’objectif principal revendiqué par les défenseurs de la concurrence totale pour les marchés de l’énergie.

Sur la base du rapport sur le marché intérieur présenté, à cette occasion, par l’ancien commissaire européen, M. Mario Monti, ces mêmes ministres ont reconnu que les intérêts des consommateurs étaient insuffisamment pris en compte en matière de facturation, comme de capacités à faire appel à un médiateur indépendant en cas de litige.

Les États membres ont également débattu, une fois n’est pas coutume, de la pauvreté énergétique, et des chiffres officiels ont été enfin avancés : ainsi, selon l’estimation la plus basse, plus de 50 millions de citoyens européens se trouvent aujourd'hui dans l’incapacité de maintenir un niveau adéquat de confort dans leur logement, ont des factures énergétiques impayées ou ne peuvent réaliser les investissements minimaux en matière d’efficacité énergétique.

Le rapport Monti est, à ce titre, éclairant : « Il y a eu lieu de prendre des mesures supplémentaires pour permettre à tous les consommateurs, en particulier les plus vulnérables, de tirer pleinement profit de la concurrence et de prix justes en commençant par renforcer les normes minimales communes. »

La Commission européenne présentera d’ailleurs un rapport au Conseil de l’énergie du 2 décembre prochain, qui permettra à la fois : d’élaborer une définition-cadre du consommateur vulnérable ; d’harmoniser au niveau européen les méthodes statistiques pour mieux quantifier l’ampleur de la précarité énergétique ; de lister les politiques énergétiques européennes existantes susceptibles de contribuer directement ou indirectement à la prise en compte des intérêts des consommateurs ; enfin, de favoriser l’échange de bonnes pratiques entre États membres et de créer une table ronde des médiateurs de l’énergie leur permettant d’envisager des synergies en matière de protection des consommateurs.

Mes chers collègues, il était temps, après trois étapes de libéralisation des marchés de l’énergie, que les États membres se préoccupent enfin des consommateurs et de la pauvreté énergétique !

Il était temps, aussi, qu’il soit enjoint à la Commission de faire un rapport reconnaissant que la libéralisation a non pas conduit à une baisse des prix pour les consommateurs, mais bien plutôt à la précarisation de ces derniers.

Nous remercions vivement la présidence belge du Conseil de l’Union européenne, et en particulier le ministre M. Magnette, d’avoir porté ces inquiétudes au plus haut niveau européen.

Ces préoccupations n’ont cessé d’être les nôtres pendant de nombreuses années. Rappelons que, à l’occasion du Conseil européen de Barcelone, en mars 2002, le Premier ministre Lionel Jospin avait déjà fait part de ses doutes sur les bénéfices d’une libéralisation, en particulier pour les consommateurs. J’ai déjà cité ses propos à plusieurs reprises ; je n’y reviens donc pas.

Telle n’a jamais été, en revanche, la préoccupation des gouvernements qui se sont succédé depuis 2002. La position française sur le rapport Monti ne fait aucune référence à ces inquiétudes. Seule est actée l’approbation du renforcement des informations des consommateurs européens sur leurs nouveaux droits en matière d’énergie. Seuls sont approuvés les compteurs intelligents, qui semblent avantager les opérateurs plus que les consommateurs. Le projet de loi NOME initial a du reste prévu une transposition sans imagination des dispositions consacrées aux consommateurs de la directive 2009/72/CE.

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