Intervention de Guy Fischer

Réunion du 6 mai 2008 à 16h00
Modernisation du marché du travail — Question préalable

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

En effet, Nicolas Sarkozy a satisfait en partie ses promesses électorales, celles qui avaient été faites au patronat. Et, dans ce domaine, votre gouvernement est prolixe.

Progressivement, projet de loi après projet de loi, vous redessinez un modèle social qui n’a rien à voir avec celui qui fonde notre République, établie sur notre pacte social tel que les législateurs de 1945 l’ont créé.

Il y a eu la recodification du code du travail : elle devait se faire à droit constant, elle s’est faite, au contraire, au détriment des salariés, qui perdent là une de leurs protections. Elle s’applique à compter du 1er mai.

Il y a eu la fermeture annoncée de 63 juridictions prud’homales, la fusion forcée des ASSEDIC et de l’ANPE, qui vient s’ajouter aux différentes lois antérieures visant à réduire les droits des travailleurs privés d’emploi.

Pas à pas, vous redessinez sans le dire un modèle global de société ne répondant plus – dans tous les domaines – qu’à une exigence, celle de rentabilité dictée par la logique libérale.

Et il y a aujourd’hui ce projet de loi, dont le Président de la République, dans sa lettre du 31 mai 2007 aux organisations patronales et syndicales, a fixé la feuille de route et au sujet duquel les pouvoirs publics ont affirmé à plusieurs reprises leur volonté de légiférer rapidement en l’absence d’accord. Il ne fait pas de doute que ce contexte a pesé sur les négociations, d’ailleurs délimitées et en partie commandées par votre gouvernement ! À n’en pas douter, ce texte est l’une de vos étapes fondamentales dans le démantèlement progressif, mais certain, de la relation de travail telle que nous la connaissons aujourd’hui.

Je m’étonne de voir combien ce projet de loi est profondément déséquilibré.

Ainsi, les citoyens noteront que les mesures favorables aux employeurs, celles qui facilitent notamment le droit et les conditions de licencier, de précariser encore plus, sont inscrites dans la loi. Or, comme convenu dans l’accord national interprofessionnel, les mesures favorables aux salariés exigent un certain nombre de décrets et de négociations futures, en particulier la portabilité des droits, l’indemnisation des demandeurs d’emploi, la formation professionnelle, ce qui n’est pas sans nous inquiéter.

Et cela fait dire à Jacques Freyssinet, professeur émérite à l’université Paris-I : « Il convient de rappeler que le mode de construction de l’accord engendre un degré élevé d’incertitude sur la nature et l’ampleur de ses effets prévisibles. ». Il y a donc, dans ce texte, une règle à deux vitesses : la certitude pour les employeurs, le doute pour les salariés.

Ce doute persiste également face à la proposition, aux apparences généreuses, de réduire à un an la durée nécessaire pour bénéficier de l’indemnisation chômage. Simultanément, le Président de la République, Mme Lagarde et M. Wauquiez relancent le débat engagé lors de l’examen du projet de loi fusionnant l’ANPE et les ASSEDIC et les négociations débutent sur ce texte dans un contexte là encore bien délimité.

Ainsi, les salariés privés d’emploi se verraient contraints d’accepter non plus « une offre valable d’emploi », mais, au choix, selon à qui l’on s’adresse, « une offre raisonnable d’emploi » ou « une offre acceptable d’emploi ». Toutefois, derrière ce vocable se dissimule une diversité de conception que votre gouvernement ne veut pas préciser aujourd’hui, jouant avec l’ambiguïté.

Une chose est sûre, cependant, la logique sera au durcissement et les salariés ont tout à y perdre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion