Intervention de Esther Benbassa

Réunion du 2 avril 2021 à 14h45
Respect des principes de la république — Article 20

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

L’article 20 prévoit, par dérogation à l’article 397-6 du code de procédure pénale, que les procédures de comparution immédiate sont applicables pour les auteurs présumés de provocations à la haine et de délits de provocation prévus à l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881.

Selon le Conseil national des barreaux, user des procédures rapides de jugement dans le cadre de ces délits revient à méconnaître la technicité de ces dossiers et les garanties procédurales de la loi de 1881. Les infractions de provocation à la haine, notamment en ligne, requièrent une expertise de la part des enquêteurs. Les magistrats rencontrent également plus de difficultés à matérialiser des faits de cyberharcèlement et à qualifier pénalement les infractions du champ virtuel. Dans la pratique, ce type de contentieux se heurte à un manque de personnel formé au sein des services enquêteurs. L’exploitation du matériel informatique et les investigations techniques sont confiées à des experts privés. Ce manque de moyens allonge considérablement les délais d’analyse des données recueillies.

Nous partageons donc le constat que la procédure de comparution immédiate, qui présente un caractère expéditif, n’est pas adéquate pour juger ce type d’infractions.

Enfin, il convient de ne pas nier la spécificité et le caractère sensible des délits mentionnés par la loi du 29 juillet 1881, dont la définition repose sur un équilibre entre la liberté d’expression, la liberté d’opinion et les abus commis. La France, pays très attaché à la liberté d’expression, doit maintenir un cadre spécifique pour ce type de contentieux.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires demande la suppression de cet article.

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