Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous partageons le constat : la situation de l’eau en Guadeloupe est un problème à bien des égards – citoyens sujets à de nombreuses coupures, dépenses trop importantes, gaspillage de la ressource, non-entretien du réseau, dette abyssale des structures gestionnaires, tarification et facturation opaques.
Il était plus qu’urgent d’agir au bénéfice des usagers, d’agir contre le gaspillage de l’eau et d’améliorer véritablement la qualité de celle-ci.
Si plusieurs initiatives se sont succédé afin de résoudre ces difficultés, rien n’avait permis, à ce jour, d’envisager une réelle restructuration pérenne, apte à résoudre les problèmes structurels du système de gestion de l’eau en Guadeloupe.
Surmontant l’échec des tentatives passées, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire, qui refond la gouvernance du service public de l’eau, est une victoire en soi.
Le Parlement a, dans son ensemble, perçu le constat de carence du système actuel, également partagé par les acteurs institutionnels locaux et par l’ensemble des habitants.
La rénovation concrète que permet ce texte est certes nécessaire, mais pas suffisante : il est urgent de réagir et de permettre un moindre gaspillage de l’eau pour les usagers, tout comme une amélioration forte de sa qualité.
Lors de l’examen de cette proposition de loi, en février dernier, nous avons eu l’occasion de rappeler les travaux du groupe régional d’experts sur le climat (GREC). Dans un rapport de novembre 2020, le GREC a pointé l’immense gâchis de l’eau : « En 2016, le volume d’eau consommé était de 26, 4 millions de m3, alors que 73, 1 millions de m3 étaient produits. » Les pertes représentent donc 177 % de la consommation.
Ses conclusions sont sans appel : pour un litre d’eau consommé, un litre et demi de perdu, ce qui entraîne une pression bien trop importante sur les ressources comme les eaux souterraines du Nord Grande-Terre.
De plus, la qualité de l’eau est « inquiétante », en raison « du très mauvais niveau d’assainissement et de l’utilisation historique de polluants » comme le chlordécone.
Pour la Guadeloupe, le GREC a aussi mis en avant de possibles problèmes de sécheresse en se fondant sur des prévisions de précipitations qui diminueront dans une large partie des zones habitées.
L’article 1er met en place une autorité unique, sous une forme proche d’un syndicat mixte dirigé par un comité syndical. Il conserve deux apports sénatoriaux majeurs.
Premièrement, la possibilité d’une future adhésion, de manière plus souple, de nouvelles collectivités au syndicat mixte, sans avoir à passer par une lourde réécriture législative.
Deuxièmement – et c’est essentiel –, l’ouverture d’une réflexion sur la tarification sociale de l’eau.
À titre personnel, je regrette toujours l’absence de personnes qualifiées et de représentants d’associations d’usagers au sein de ce comité syndical. Au regard des enjeux, ces personnes devraient pouvoir non seulement commenter les décisions de cette nouvelle institution, mais aussi y participer pleinement.
Par ailleurs, les conditions de transfert de la dette, qui font aussi l’objet de cet article 1er, ont des contours trop flous.
Si l’article 2 prend bien en compte l’apport sénatorial d’une audition annuelle obligatoire du président du comité syndical, les pouvoirs de la commission de surveillance restent trop faibles.
Cette réforme ne sera que le premier pas important d’une gestion durable de l’eau en Guadeloupe.
En ce qui concerne le financement et les modalités de transition entre les deux systèmes, notre groupe reste prudent et attend un engagement financier fort de l’État, comme nous l’avons rappelé en première lecture.
Notre groupe appelle à la plus grande vigilance sur le transfert des dettes actuelles à la nouvelle structure. Une attention particulière devra être portée au volume des dettes transférées, ainsi qu’aux dettes qui resteraient à la charge des entités actuelles.
Aussi, tout en alertant sur ces points de vigilance fondamentaux, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera ce texte.