Intervention de Stéphane Artano

Mission d'information Conditions de la vie étudiante — Réunion du 15 avril 2021 à 8h45
Audition de M. Maël Disa délégué interministériel pour l'égalité des chances des français d'outre-mer et la visibilité des outre-mer

Photo de Stéphane ArtanoStéphane Artano, président de la délégation sénatoriale aux outre-mer :

Au nom de la délégation aux outre-mer, j'adresse nos sincères remerciements à la mission d'information sur les conditions de la vie étudiante, et en particulier à son président Pierre Ouzoulias et à son rapporteur Laurent Lafon, pour cette invitation qui me tient particulièrement à coeur.

La situation actuelle des étudiants ultramarins a toute sa place dans vos travaux du Sénat, non pas au nom d'un « réflexe outre-mer » passé dans le langage courant de façon un peu incantatoire, mais bien en raison de difficultés profondes et spécifiques que la crise sanitaire a encore accentuées. Nous sommes convaincus que votre mission peut aider à une prise de conscience des problèmes et des enjeux que cette situation soulève. Il en va en effet non seulement de l'intégration dans l'Hexagone, mais aussi de l'avenir de nos territoires qui ne pourront se développer sans les forces vives qui la composent et la qualité de leur formation.

Je ne souhaite pas empiéter sur les sujets qui seront abordés sans aucun doute par le délégué interministériel, M. Maël Disa, à qui j'adresse mes très cordiales salutations. Notre délégation a eu l'opportunité de l'auditionner il y a tout juste un mois sur la représentation et la visibilité des outre-mer dans l'audiovisuel public. Cette table ronde a été largement reprise dans les médias et a fait l'objet d'engagements précis de la part de France Télévisions, ce qui montre l'utilité de telles réunions.

Comme vous l'avez souligné, monsieur le président, la délégation tient à votre disposition un dossier d'information - que je crois en effet assez complet -, composé à la fois d'articles de presse mais également de témoignages précis, en provenance des antennes des collectivités ultramarines à Paris dont je veux saluer la mobilisation face aux cas les plus dramatiques, en particulier pour le soutien psychologique et la distribution de colis alimentaires. Nous pourrons bien entendu compléter ce dossier si besoin.

Je me permettrai juste de souligner quelques points - à nos yeux majeurs - sur lesquels mes collègues Gérard Poadja, Victoire Jasmin, Victorin Lurel notamment - ont appelé notre attention lors de nos récents travaux.

Plus que d'autres peut-être, les étudiants ultramarins sont confrontés à des défis qui tiennent : d'abord, à la mobilité et au coût élevé des billets d'avion, notamment pour les destinations éloignées du Pacifique et de l'océan Indien ; ensuite, à la précarité financière avec la complexité du système des bourses, l'accès limité aux emplois étudiants et aux stages mais également parfois aussi à une méconnaissance des aides mises en place par leurs propres collectivités ; l'accès à la santé est encore aléatoire du fait en particulier de mutuelles étudiantes qui ne sont pas identiques dans l'Hexagone...

Mais le point sur lequel je voudrais insister est la question du logement : faute de places en résidences universitaires, les étudiants et leurs familles se tournent vers le privé avec les difficultés inhérentes pour le choix et les visites d'appartements, les réticences des agences et propriétaires liées à la domiciliation bancaire en outre-mer - et ceci malgré la garantie Visale mise en place par l'État -, ou encore la production de justificatifs de revenus ; il faut noter aussi des délais d'instruction trop longs pour le bénéfice des aides au logement et ensuite, en cas de retour, la nécessité souvent de continuer à régler un loyer pour ne pas se retrouver à la rue à leur retour ...

La crise sanitaire et les périodes de confinement ont mis en avant les conditions d'exiguïté, d'inconfort et d'isolement des logements de nos jeunes, qu'ils soient ultramarins ou hexagonaux d'ailleurs. Face ce qui s'apparente à un véritable « parcours du combattant », notre collègue Gérard Poadja a proposé la mise en place d'une véritable cellule sociale d'accompagnement et nous aimerions connaître l'avis du délégué sur cette suggestion. L'ensemble des services publics fonctionne désormais via des plateformes qui prennent en compte des situations-types mais rarement les spécificités outre-mer, sans compter le problème des frais et équipements numériques qui a une incidence y compris pour le suivi des cours.

Le second problème, de plus en plus sensible au fur et à mesure que s'élève le niveau de formation, est celui des débouchés : on le sait, l'accès aux grandes écoles reste encore trop rare pour les ultramarins et les préparations locales aux concours de la fonction publique trop peu développées. Espérons que la création du futur Institut du service public soit l'occasion de réfléchir à ces sujets. Il y a aussi la frustration de ne pas accéder aux emplois qualifiés sur leur territoire d'origine malgré les diplômes obtenus, et c'est un problème qui mérite une attention particulière.

Sachez, monsieur le président, combien nous nous félicitions ce matin que vous preniez ces problématiques « à bras le corps » et que vous pourrez compter sur notre plein soutien pour relayer vos travaux.

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