Intervention de Bernard Buis

Réunion du 13 avril 2021 à 14h30
Hydroélectricité transition énergétique et relance économique — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Bernard BuisBernard Buis :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, tout d’abord, je tiens à remercier Daniel Gremillet, auteur de cette proposition de loi que j’ai cosignée avec de nombreux collègues et qui nous permet de discuter aujourd’hui de cette source d’énergie propre qu’est l’hydroélectricité.

Depuis le 13 mars dernier, le long des grilles du jardin du Luxembourg, nous pouvons contempler de magnifiques clichés d’un fleuve qui contribue à la richesse de la Drôme : vous aurez reconnu le Rhône.

Cette exposition intitulée « Visages du Rhône » illustre bien les potentiels de ce cours d’eau : un potentiel touristique, environnemental, mais aussi – et c’est surtout ce que vise cette proposition de loi – énergétique et donc économique. Il en est de même pour beaucoup d’affluents du Rhône et, plus largement, pour de nombreux cours d’eau de notre pays.

Nos territoires, en particulier nos territoires ruraux, doivent tirer parti de leurs richesses et de leur savoir-faire. Nos réserves d’eau et nos rivières font partie de ces atouts : il serait absurde de s’en priver.

En d’autres termes, l’économie de nos territoires ne doit pas se cantonner dans le tourisme vert. Elle doit aussi puiser dans ses ressources, et en cela cette proposition de loi va dans le bon sens.

L’hydroélectricité constitue notre première source d’énergie renouvelable : elle représente plus de 50 % de notre production d’électricité renouvelable et nous pourrions encore faire mieux. Au-delà de l’utilisation ponctuelle de l’eau de nos rivières, nous pouvons turbiner l’eau potable sur nos nombreuses adductions et conduites d’amenée où, souvent, de fortes pentes conduisent à l’installation de systèmes de brise-jet.

Désormais, certaines communes installent de petites unités pour créer des pico-centrales. Je pense, dans mon territoire du Diois, à la commune de Die, qui a créé cette installation avec la commune de Romeyer pour l’amenée de la conduite d’eau potable des sources de Rays.

Le présent texte entend mettre un coup d’accélérateur à notre énergie hydroélectrique en facilitant les démarches des professionnels. Je réponds : chiche !

Il est notamment question d’augmentations de puissance pour les installations hydrauliques autorisées, de souplesses administratives expérimentales pour les porteurs de projet ou pour les gestionnaires d’installations, et d’incitations fiscales afférentes aux projets d’énergie hydraulique.

Ces propositions sont séduisantes, notamment pour un territoire comme la Drôme. Elles pourraient ainsi faciliter les démarches de nos professionnels et de nos élus qui souhaitent encourager ce secteur.

À cet égard, je pense au syndicat des usiniers du canal des Fondeaux, à Die, qui se bat avec notre administration pour l’application de l’article L. 214-18-1 du code de l’environnement.

En vertu de cet article, les moulins et le canal des usiniers – fondé en titre –, concernés uniquement par une production hydroélectrique en autoconsommation, ne sont pas soumis aux règles définies par l’autorité administrative mentionnées au deuxième paragraphe du 1° de l’article L. 214-17 du même code. Mais l’arrêté préfectoral imposant des prescriptions sur la réalisation d’un aménagement piscicole ne reprend pas, hélas ! cette spécificité.

Réglementation excessive, mauvaise interprétation ou surinterprétation conduisent souvent à des litiges et entraînent des délais trop importants pour faciliter la mise en place d’une production hydroélectrique. Alors, simplifions !

Cette proposition de loi inspire malgré tout quelques interrogations.

Le fait de développer le potentiel hydroélectrique d’un cours d’eau peut-il avoir des conséquences négatives sur son potentiel environnemental, sur sa biodiversité, sa faune et sa flore ? À la lecture du contenu des articles et de certains amendements votés en commission, la réponse n’est pas si claire.

Il y a maintenant plus de vingt ans – depuis l’entrée en vigueur de la directive-cadre sur l’eau d’octobre 2000 – que l’on suit nos cours d’eau pour sauvegarder leur potentiel écologique. Doit-on remettre en cause cette directive ?

Plus précisément, la loi LEMA de 2006 impose la connectivité écologique des ouvrages sur certains cours d’eau, pouvant conduire à l’interdiction d’implanter de nouvelles infrastructures.

Une circulaire du ministère de l’écologie a précisé, sept ans plus tard, ces obligations et interdictions. À ce titre, elle évoque bien la possibilité d’une « suppression d’obstacles avec renaturation de tronçons de cours d’eau ».

Cette politique de restauration écologique porte d’ailleurs ses fruits : un peu partout en France, la population de saumons s’est multipliée en une dizaine d’années. Mieux, l’apron est maintenant présent dans la rivière Drôme.

La concertation est certes fragile, mais elle doit se poursuivre : si séduisant soit-il, ce texte ne risque-t-il pas de mettre en péril un équilibre précaire – d’autant que, afin de développer notre hydroélectricité, les assouplissements législatifs se sont multipliés au cours des dernières années ?

La loi ASAP offre le dernier exemple en date : grâce à un amendement de notre majorité présidentielle, certains projets soumis à autorisation environnementale peuvent désormais bénéficier, au titre de la même procédure, d’une dérogation jusqu’à présent instruite en parallèle.

Les débats relatifs au projet de loi Climat et résilience devraient également permettre de nouvelles avancées en faveur de la petite hydroélectricité.

En résumé, nous sommes sur une ligne de crête. Nous devons veiller à la biodiversité de nos rivières et de nos fleuves et, en même temps, saisir tout leur potentiel énergétique.

Pour ces raisons, à titre personnel, je voterai cette proposition de loi. Mais dans la mesure où de nombreuses interrogations subsistent sur les questions de biodiversité, la majorité de notre groupe s’abstiendra !

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