Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en 2017, Jacques Mézard, alors ministre de la cohésion des territoires et du logement, répondant à une question orale au Sénat au sujet des procédures d’état d’abandon manifeste et de biens sans maître reconnaissait qu’elles étaient de plus en plus difficiles à mettre en œuvre et peu utilisées, posant ainsi la question de leur opérationnalité.
Cette proposition de loi apporte une évolution positive à la procédure d’expropriation des biens en état d’abandon manifeste. Tout d’abord, je tiens à saluer le travail de simplification accompli par M. le rapporteur François Bonhomme, qui a permis l’adoption de cette proposition de loi à l’unanimité de la commission des lois.
Quelle commune ne compte pas, dans l’une de nos régions, de maison vacante ou de terre abandonnée ? Cette situation plus que fréquente suscite désarroi et défaitisme : la propriété privée est sacrée et on ne peut y attenter ! Pour autant, des moyens existent, qui, sans remettre en cause les fondements du droit de propriété, ouvrent des possibilités pour les communes de remettre en vie un patrimoine en déshérence.
Ce mode d’acquisition foncière singulier permet aux maires de faire cesser l’état d’abandon de la parcelle au lieu de multiplier les arrêtés de péril et les dépenses d’entretien jamais recouvrées ; il permet aussi de limiter les risques de squats. Autant de situations qui constituent quelques fois des obstacles à la mise en œuvre d’une politique d’urbanisme ou peuvent contribuer à la dégradation d’un centre-bourg ancien.
Cette proposition de loi constitue donc une avancée par l’élargissement du périmètre d’intervention à tout le territoire de la commune, au-delà de l’agglomération, et lui donne un caractère véritablement opérationnel.
Cette simplification est également bienvenue dans le cadre de la crise du logement que nous traversons, avec une baisse alarmante de la construction neuve et l’effondrement du nombre de logements sociaux agréés.
Si la procédure d’abandon manifeste ne permettra pas de massifier la construction ni de relancer le secteur, il ne faut pas négliger son utilité, puisqu’il est possible, pour une commune, de revendre le bien objet de la procédure à un bailleur social ou à un particulier.
L’ajout par la commission des lois de l’objectif de « création de réserves foncières » permettant la réalisation des projets d’aménagement ou d’urbanisme est très encourageant pour les opérations d’urbanisme ou les opérations de revitalisation du territoire, qui nécessitent parfois beaucoup de foncier.
La question de la lutte contre l’artificialisation des sols fera débat dans le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Aussi, étendre la procédure d’expropriation des biens en état d’abandon manifeste permettra la réappropriation des espaces urbanisés.
Enfin, nous aurons très vite l’occasion de rediscuter de la procédure d’expropriation de biens en état d’abandon manifeste, puisque l’avant-projet de loi dit 4D inclut un article directement inspiré de cette proposition de loi.
À l’horizon de ce projet de loi, qui sera présenté en conseil des ministres le 12 mai, un dernier frein pourrait encore être levé par le Gouvernement, monsieur le secrétaire d’État, tant pour l’état d’abandon manifeste que pour les biens sans maître. Il s’agit de l’identification des héritiers, qui prend du temps et a un coût important pour les communes, tout particulièrement dans les territoires ruraux.
Le groupe Les Républicains votera bien évidemment cette proposition de loi.