Séance en hémicycle du 14 avril 2021 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • d’abandon
  • d’abandon manifeste
  • d’expropriation
  • manifeste

La séance

Source

La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Roger Karoutchi.

Photo de Roger Karoutchi

La séance est reprise.

Nous poursuivons la discussion de la proposition de loi relative à la lutte contre l’illectronisme et pour l’inclusion numérique.

Je vous rappelle que la discussion générale a été close.

La commission n’ayant pas élaboré de texte, nous passons à la discussion des articles de la proposition de loi initiale.

Chapitre Ier

Détecter les publics en difficulté avec le numérique

Une étude biannuelle évalue l’exclusion numérique et l’utilisation faite des compétences numériques par les usagers. À cette fin, un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article et définit un référentiel commun d’évaluation des capacités numériques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Fernique

J’interviens au nom de Mme Benbassa, qui est retenue.

Nous le savons tous, l’illectronisme est étroitement lié à la fracture numérique. Celle-ci s’observe particulièrement dans l’inégale couverture numérique dont souffrent spécifiquement les territoires ruraux et les outre-mer.

Je prends un exemple concret, la Guyane : ce département ultramarin abrite un centre de recherche spatiale et une base de lancement française et européenne. Nous pourrions imaginer qu’un tel territoire, à partir duquel on est capable de mettre en orbite des fusées, soit à la pointe des nouvelles technologies de télécommunication. Pourtant, la Guyane, mal desservie par les réseaux de téléphonie et internet, pâtit depuis toujours de nombreuses zones blanches. M. Georges Patient, sénateur de la Guyane, évoquait l’année dernière ce problème dans une question écrite au Gouvernement, dans laquelle il indiquait : « en Guyane, [on] constate quotidiennement la qualité médiocre des communications, ainsi que de la connexion internet. » Et il ne s’agit pas là d’un cas isolé.

J’insiste sur ce point, la lutte contre l’illectronisme passe avant tout par une couverture numérique égale sur tout le territoire national. En ce sens, la préconisation du rapport sénatorial visant à établir une cartographie locale de l’exclusion numérique avait toute sa pertinence. Il était également proposé dans ce rapport d’ériger le combat contre l’illectronisme en priorité nationale.

À l’heure du numérique, donner à toutes les Françaises et à tous les Français les moyens de cette transition devrait aller de soi. Je regrette donc profondément que M. le rapporteur ait choisi de manière inexplicable de détricoter un texte qui aurait pu constituer une belle avancée face à un enjeu qui constitue en fait une urgence sociale et sociétale majeure.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 41, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Le présent amendement tend à supprimer l’article 1er de la proposition de loi, dont les objectifs sont satisfaits par la pratique et le droit existant.

En effet, l’article 1er vise à instituer une étude biannuelle aux fins d’évaluer l’exclusion numérique et les usages de leurs compétences numériques par les citoyens. Il enjoint le Gouvernement à définir un « référentiel commun d’évaluation des capacités numériques » par décret pris en Conseil d’État.

Or le cadre de référence des compétences numériques constitue déjà le référentiel commun desdites compétences, de sorte qu’il serait surabondant d’en élaborer un second. Par ailleurs, des études relatives à l’exclusion numérique existent déjà, à l’instar de celle réalisée annuellement par le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) qui l’appréhende sous l’angle tant de l’équipement que des usages des ménages.

C’est la raison pour laquelle je propose la suppression de cet article.

Mon cher collègue Fernique, je veux vous rassurer et je vous demande de rassurer Mme Benbassa : je suis moi aussi pour l’évaluation, surtout quand il s’agit des outre-mer, mais ce n’est pas en inscrivant dans la loi des dispositions qui existent déjà ou qui relèvent du domaine réglementaire que nous remédierons au problème.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Monsieur le rapporteur, je suis sur la même ligne que vous.

Vous avez raison de dire que l’intention de l’article est parfaitement louable, mais l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) finance déjà des études en la matière, notamment via le Labo Société numérique, et ce depuis 2017 – je pense notamment au Baromètre du numérique et à Capacity.

Il en est de même pour le référentiel européen : il s’appelle DigComp et il est déjà utilisé dans le cadre de Pix, service public en ligne pour évaluer, développer et certifier ses compétences numériques.

Le Gouvernement est donc favorable à l’amendement.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, l’article 1er est supprimé, et l’amendement n° 3 n’a plus d’objet.

La première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 114-3 du code du service national est complétée par les mots : « et un test d’évaluation des compétences numériques ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 42, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Pour les raisons que j’ai déjà expliquées en commission et lors de la discussion générale, je propose également de supprimer l’article 2, qui tend à ajouter un test de compétences numériques au programme de la Journée défense et citoyenneté (JDC), afin d’améliorer la détection de l’exclusion numérique.

En effet, ces compétences sont déjà évaluées par l’éducation nationale en fin de collège et au lycée par le groupement d’intérêt public Pix.

En outre, le programme de la JDC a régulièrement été modifié et densifié au détriment de sa cohérence et de sa réceptivité par un public d’âge compris entre 18 ans et 25 ans. Ajouter un test de compétences numériques viendrait alourdir un programme déjà chargé, sauf à supprimer certains éléments, comme ce fut le cas pour la formation aux gestes de premier secours.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

L’avis est favorable, monsieur le président. Je me permets simplement d’ajouter, en complément des arguments avancés par M. le rapporteur, que la généralisation du Pix pour les élèves de troisième et de terminale est effective.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, l’article 2 est supprimé.

Chapitre II

Passer d’une logique de services publics 100 % dématérialisés à une logique de services publics 100 % accessibles

La sous-section 2 de la section 1 du chapitre II du titre Ier du livre Ier du code des relations entre le public et l’administration est complétée par un article L. 112-6-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 112 -6 -1. – Tout usager du service public est reçu, à sa demande, dans les sites d’accueil physique des administrations afin de réaliser toute démarche administrative dans un délai raisonnable, au plus tard deux mois à compter de la date de la saisine. L’existence d’un téléservice n’emporte aucune obligation de saisine par voie électronique de l’administration. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 43, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

La commission propose la suppression de cet article. En effet, l’objectif recherché par les auteurs du texte est satisfait, notamment par le déploiement des maisons France Services et la mise en place de la plateforme Aidants Connect, dont nous avons parlé tout à l’heure.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Avis favorable, pour les raisons que M. le rapporteur vient d’exposer.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Cet article 3 vise à laisser la possibilité d’avoir un contact physique pour ceux qui ne peuvent pas avoir accès au numérique. Je ne vois pas en quoi cette disposition est aujourd’hui satisfaite : par exemple, dans les maisons France Services, on peut avoir un contact avec une personne, mais pas directement avec l’administration concernée par la demande. Ce besoin n’est donc pas du tout satisfait. Il en est de même pour le délai de deux mois. Cet article a tout à fait lieu d’être et je ne comprends pas cet amendement de suppression.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Martine Filleul, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Le basculement vers le tout-numérique de l’administration s’est traduit par la fermeture physique des services publics dans plusieurs territoires. Cela se révèle encore plus pénalisant pour une partie de nos concitoyens qui ne se trouvent pas en mesure d’utiliser internet. Nous devons être guidés par un seul impératif : l’amélioration du service rendu aux usagers, au moins le temps nécessaire pour que la transformation numérique des personnes publiques soit totalement assimilée. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre cet amendement de suppression.

L ’ amendement est adopté.

La section 1 du chapitre II du titre Ier du livre Ier du code des relations entre le public et l’administration est complétée par une sous-section 3 ainsi rédigée :

« Sous -section 3

« Choix des modalités d ’ échange et de paiement

« Art. L. 112 -6 -2. – L’usager peut refuser à tout moment et par tout moyen le recours au procédé électronique pour la réalisation ou la poursuite de la démarche administrative.

« Toute notification d’attribution, de suppression ou de révision des droits comportant des délais et des voies de recours est communiquée sous support papier ou sous support électronique. L’accord exprès de la personne destinataire de la notification est recueilli préalablement aux échanges dématérialisés.

« Art. L. 112 -6 -3. – L’existence d’une offre de paiement des services dématérialisée n’emporte aucune obligation de paiement en ligne. Pour les usagers ne disposant pas d’un compte bancaire, l’administration met en place une modalité de paiement alternative. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 44, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement vise à supprimer l’article 4, qui permet aux usagers des services publics de choisir les modalités de correspondance avec l’administration, ainsi que les modalités de paiement des services dématérialisés qu’ils souhaitent utiliser.

La commission des lois doute que l’inscription de principes généraux symboliques dans la loi apporte de véritables garanties à l’usager. Là aussi, les avancées en faveur de celui-ci passent d’abord par une succession d’actions concrètes adaptées à chaque procédure.

En outre, la plupart des administrations proposent déjà plusieurs modalités de paiement et de correspondance au choix des usagers. Ainsi, pour déclarer ses revenus à l’administration fiscale, un usager peut utiliser la voie dématérialisée ou indiquer par voie électronique qu’il n’est pas en mesure de le faire et utiliser alors une déclaration sur papier.

Nous sommes tous d’accord : il y a des efforts à faire, mais ce n’est pas par des coups de baguette législative que nous atteindrons notre objectif. Il va falloir user de moyens concrets sur le terrain ; je pense notamment aux maisons France Services, dont la mise en place se poursuit. Le rapport d’information qui est à l’origine de cette proposition de loi montre clairement que les pratiques devront s’adapter pour répondre aux demandes et aux besoins de nos concitoyens. Néanmoins, ce n’est pas en légiférant que nous y parviendrons.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Je suis tout à fait d’accord avec la position de M. le rapporteur : il n’est pas nécessaire de légiférer pour mettre en place ces procédures. Le Gouvernement est donc favorable à cet amendement de suppression de l’article 4.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Martine Filleul, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

La commission des lois et M. le secrétaire d’État doutent que l’inscription de principes généraux symboliques dans la loi apporte de véritables garanties à l’usager. Pourtant, nos grandes lois sont truffées de principes généraux ! L’égalité des usagers devant le service public est l’un d’entre eux, qu’il convient de décliner à l’échelle nationale comme à l’échelle locale. Il est nécessaire de le rappeler dans la loi et de mettre celle-ci à jour en fonction des évolutions technologiques.

Dès lors, en cohérence avec les arguments que j’ai développés pour nous opposer à la suppression de l’article 3, nous voterons également contre cet amendement.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

J’irai dans le sens de M. le rapporteur de la commission des lois, mais je reste très attaché au papier, à titre personnel, et je ne suis pas le seul. On a évoqué l’administration fiscale ; j’estime qu’il est important de garder des interlocuteurs de proximité pour l’ensemble de nos services publics. On ne peut pas tout dématérialiser !

Néanmoins, quant à l’objet de cet amendement de suppression, je conviens qu’on ne peut pas tout mettre dans la loi ; l’aspect réglementaire a aussi son importance.

Même si beaucoup de personnes déclarent leurs revenus de façon dématérialisée, il en reste un certain nombre qui, pour différentes raisons, n’en ont pas la possibilité, notamment par absence de connexion internet. Il subsiste des zones d’ombre ! Il y a donc encore des gens – modestement, j’en fais partie – qui font leur déclaration sur papier. Il est important de conserver cette possibilité, par respect pour les usagers, quels qu’ils soient, et dans leur intérêt.

Surtout, il faut garder des interlocuteurs de proximité dans les services publics. La présence humaine est importante.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

M. Marc Laménie. Le tout est de trouver un juste équilibre.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Cela dit, j’irai dans le sens de la commission.

M. Philippe Mouiller applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Écoutez, mes chers collègues, je constate que tout le monde est d’accord pour lutter contre l’illectronisme et est favorable à des principes généreux et généraux, mais, quand il s’agit de mettre ceux-ci en application, on supprime article après article et on détricote notre proposition de loi ! On est en train de la tuer à petit feu !

Éric Gold n’a pas pu rester ce soir pour participer à nos débats ; je me fais donc son porte-parole. En tout cas, je ne comprends pas trop pourquoi on agit de la sorte. Un autre texte va-t-il nous arriver par la suite, qui prévoirait des dispositions luttant contre l’illectronisme ?

À ce stade, le mieux est de terminer rapidement l’examen de ce texte, parce que je souhaite que nous ayons le temps d’adopter ce soir le second texte que notre groupe a fait inscrire à l’ordre du jour !

Sourires et applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. Mon cher collègue, en tant que représentant du groupe ayant demandé l’inscription de ce texte à l’ordre du jour, vous avez à tout moment de la discussion la possibilité de le retirer.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Continuons son examen, mais ne perdons pas de temps !

L ’ amendement est adopté.

L’article L. 123-1 du code des relations entre l’administration et le public est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot : « situation », sont insérés les mots : «, y compris lors de l’accomplissement d’une démarche administrative dématérialisée, » ;

2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Tout site internet public permet à l’utilisateur de procéder à des modifications en raison d’erreurs de saisie, à chaque étape de la démarche administrative. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 45, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Remplacer les mots :

l’administration et le public

par les mots :

le public et l’administration

II. – Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

III. – Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Le premier alinéa est applicable lorsque la méconnaissance ou l’erreur matérielle qu’il vise est commise par un tiers agissant dans l’intérêt ou pour le compte de la personne en cause. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

M. Thani Mohamed Soilihi, rapporteur. Mes chers collègues, je vous propose, non pas de supprimer l’article 5, mais simplement de l’amender.

Ah ! sur les travées du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet article met en place un droit à l’erreur pour les démarches accomplies en ligne. Or nous savons tous qu’un tel droit, plus général, existe d’ores et déjà et est largement reconnu.

Je propose en revanche, par le présent amendement, de prévoir explicitement que le droit à l’erreur s’applique également, lorsque celle-ci est commise par un tiers agissant dans l’intérêt ou pour le compte de la personne en cause.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 29, présenté par M. Durain, Mme M. Filleul, M. Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

alinéa,

insérer les mots :

les mots : « pour la première fois » sont supprimés et

La parole est à Mme Martine Filleul.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Nous souhaitons que le champ de cet article soit élargi. Aujourd’hui, le droit à l’erreur ne s’applique qu’une fois. Or, dans de nombreuses situations, un usager peu à l’aise avec l’outil informatique, mais invité à effectuer ses démarches en ligne, peut en toute bonne foi commettre des erreurs répétées. Il convient donc de prendre en compte cette situation dans une société toujours plus numérisée et hyperconnectée, pour ne pas donner le sentiment que ces personnes en difficulté seraient des usagers de seconde zone.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement tend à supprimer la condition selon laquelle le droit à l’erreur prévu par le code des relations entre le public et l’administration ne s’applique que si l’erreur est commise pour la première fois.

Néanmoins, cette modification ne concerne pas seulement les démarches accomplies sous forme numérique et je ne pense pas qu’il soit opportun d’offrir la clémence de l’administration aux auteurs d’erreurs répétées. Il serait d’ailleurs difficile de prouver que l’erreur a été commise de bonne foi dans de telles circonstances.

Je vous invite donc, ma chère collègue, à retirer votre amendement ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Les amendements n° 45 et 29 portent tous deux sur le droit à l’erreur issu de la loi du 10 août 2018. Ce droit a pour effet que l’administration ne peut pas sanctionner un usager, quand il commet une erreur de bonne foi dans le cadre d’une démarche auprès d’elle. Cela comprend déjà les démarches numériques, comme l’a souligné votre rapporteur ; cet argument me semble très pertinent.

La rédaction proposée par M. le rapporteur pour l’alinéa 4 en ce qui concerne le cas des tiers est certes opportune dans son principe, mais il me semble que la doctrine administrative pourrait régler ce problème sans qu’il soit besoin de passer par la loi. Je le dis d’autant plus volontiers que le Sénat se montre toujours très attaché à la qualité de la loi.

Cet argument m’incite à inviter M. le rapporteur à retirer son amendement ; à défaut, le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du Sénat.

En revanche, comme la rédaction de l’amendement du rapporteur me semble meilleure que celle de l’amendement n° 29, j’émettrai un avis défavorable sur ce dernier.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, l’amendement n° 29 n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 5, modifié.

L ’ article 5 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 1, présenté par M. Bonhomme, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les collégiens et lycéens peuvent avoir recours à une banque de ressources numériques préalablement validée par l’Éducation nationale leur permettant d’accéder sans frais supplémentaires à des services éducatifs et ressources pédagogiques, en complément du forfait individuel de leur mobile, quel que soit le volume initial de données prévu à la souscription dudit forfait.

La parole est à M. François Bonhomme.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Comme vous le savez, mes chers collègues, les départements sont très favorables à l’établissement d’une « liste blanche » pédagogique consistant en la mise à disposition des élèves d’un volume de données suffisant, dédié à des services éducatifs, en complément de leurs forfaits individuels de téléphonie mobile. Cela leur permettrait d’accéder sans surcoût à des ressources pédagogiques et aux services de vie scolaire.

Cette liste blanche permettrait de réduire les différences socio-économiques entre élèves et leur garantirait un accès ininterrompu aux ressources pédagogiques nécessaires à la réussite de leur scolarité.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Le présent amendement tend à offrir aux collégiens et aux lycéens une banque de ressources numériques, ainsi qu’un accès illimité à internet sur leur téléphone mobile pour en bénéficier. Son objectif est parfaitement louable, comme celui de tous les autres amendements, à l’heure où les contenus en ligne prennent une place significative.

Je pense néanmoins qu’il serait difficile de mettre en place une telle norme sans avoir consulté au préalable les différentes parties prenantes, notamment les professeurs, les opérateurs téléphoniques et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) pour les modalités techniques.

En outre, il n’est pas prévu dans cet amendement d’indemnité pour les opérateurs concernés, ce qui fait encourir à cette disposition le risque d’une censure constitutionnelle.

Pour toutes ces raisons, je vous invite, mon cher collègue, à retirer votre amendement ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Au-delà des arguments exposés par M. le rapporteur, la mise en œuvre d’une telle disposition serait extrêmement lourde. Cela impliquerait que les opérateurs internet revoient leur politique de gestion des forfaits, afin de pouvoir comptabiliser les consommations de données suivant l’usage, alors qu’ils suivent aujourd’hui un seul volume, indifféremment de l’usage. La capacité de détecter que l’abonné est un collégien ou un lycéen, ou encore un adulte prêtant son téléphone à un collégien ou à un lycéen, poserait des problèmes opérationnels complémentaires.

En outre, ce dispositif ouvrirait une brèche dans la protection des données personnelles : des opérateurs de télécommunications seraient chargés de tracer la nature des usages de leurs clients.

C’est pourquoi, comme votre rapporteur, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Loin de moi la volonté d’allonger le débat sur cette proposition de loi, mais il me semble qu’une vraie question est posée au travers de cet amendement. Nous avons tous pu le constater ces dernières années et, plus particulièrement, ces derniers mois.

Monsieur Bonhomme, votre amendement me satisfait : en effet, je fais partie de ceux qui ont proposé au président de ma région que celle-ci prenne en charge la part du forfait téléphonique des lycéens qui permet in fine d’assurer la continuité pédagogique.

J’entends évidemment les arguments de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d’État. Nous sommes ici pour faire la loi et nous allons la faire, sans démagogie ni populisme.

Cependant, je reste persuadée que ce débat pose une vraie question : aujourd’hui, pour la plupart de nos jeunes, qu’ils soient collégiens ou lycéens, l’accès au numérique passe de fait par leur terminal téléphonique. Nous avons tous vécu, pendant le premier, le deuxième, puis le troisième confinement, des galères familiales : comment partager le réseau, et selon quels horaires ? La réponse finale est toujours : « Partage ton abonnement, tu auras du réseau ! » N’y voyez pas boutade ou rigolade, mes chers collègues : c’est sincère !

Je ne sais pas ce qu’il est possible d’imposer aux collectivités et aux opérateurs, d’autant que la privatisation des services de télécommunications dans notre pays fait que l’État ne les maîtrise plus, mais je tiens à souligner qu’une vraie question est posée au travers de cet amendement.

J’ai bien compris que l’objectif premier de ce texte est de porter le débat, plutôt que de faire la loi ; c’est pourquoi je me permets, cette unique fois, d’intervenir dans la discussion. Monsieur le secrétaire d’État, une vraie réflexion doit être menée dans nos territoires ruraux sur ce sujet pour déterminer, avec les conseils départementaux et régionaux, comment on peut partager des abonnements de téléphone et assurer ainsi la continuité pédagogique au bénéfice de nos collégiens et de nos lycéens.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Au vu des arguments de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d’État, je le retire.

Je comprends que la norme doive faire l’objet d’une consultation, mais j’imagine que, s’il fallait consulter les professeurs et la communauté éducative, nous y serions encore après le confinement…

En outre, je ne voudrais pas être la cause de la ruine des opérateurs téléphoniques. §C’est tout de même un argument recevable ! En tout cas, je suis sûr que cette idée sera reprise par d’autres groupes.

I. – Après l’article L. 112-9 du code des relations entre le public et l’administration, il est inséré un article L. 112-9-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 112 -9 -1. – Un décret en Conseil d’État définit un référentiel d’ergonomie des sites internet publics des administrations dans les conditions définies au présent article.

« La conception des sites internet publics des administrations et des téléprocédures intègre le point de vue des usagers tout au long de leur développement et de leur exploitation.

« Les téléservices prennent en compte l’ensemble des procédures et des cas de figure existants tels que prévus par les lois et les règlements en vigueur permettant à l’usager de bénéficier des droits qui lui sont reconnus. Ils permettent d’effectuer à tout moment des rectifications des dossiers en cours de réalisation avant leur dépôt. Ils délivrent un accusé de connexion nominatif et horodaté à chaque connexion d’un usager.

« À chaque étape de la procédure dématérialisée, l’usager dispose d’un accès lui permettant de contacter directement le service compétent par une modalité de saisine alternative.

« La page d’accueil de tout site internet public des administrations comporte une mention clairement visible précisant s’il est ou non conforme aux règles fixées par le référentiel d’ergonomie. »

II. – Le décret mentionné au premier alinéa du I du présent article est publié dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi.

III. – À compter du 1er janvier 2022, la non-conformité d’un site internet public ou d’un téléservice au référentiel défini au I du présent article fait l’objet d’une sanction administrative dont le montant, qui ne peut excéder 100 000 €, est fixé par le décret en Conseil d’État mentionné au même I en fonction de la taille, des ressources et de la nature de l’organisme concerné. Une nouvelle sanction est prononcée chaque année lorsque le manquement à ces dispositions perdure.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L’amendement n° 12 est présenté par Mme Préville.

L’amendement n° 26 est présenté par MM. Dossus et Benarroche, Mmes de Marco et Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 2

Après le mot :

ergonomie

insérer les mots :

et d’écoconception

II. – Après l’alinéa 3

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Elle s’appuie sur un référentiel général d’écoconception des services numériques précisé par décret. »

La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 12.

Debut de section - PermalienPhoto de Angèle Préville

Lancé en 2019 par la direction interministérielle du numérique, le programme Tech.gouv a pour objectif de permettre à l’État d’accélérer sa transformation numérique. Il doit rendre l’action publique plus proche, plus efficace, plus simple et plus juste pour tous les Français, dans tous les territoires.

La feuille de route « Numérique et environnement » rehausse cette ambition, en proposant une stratégie de maîtrise de l’impact environnemental du numérique et de ses effets. Elle invoque l’exigence d’exemplarité de l’État pour la mise en œuvre d’un numérique responsable à l’échelle du territoire. Dans le cadre du plan de relance, il est prévu de poursuivre et d’amplifier ces actions, qui concernent l’ensemble des administrations.

L’écoconception des services numériques vise à maximiser l’impact positif du numérique sur notre société ; elle doit contribuer à une meilleure maîtrise de l’empreinte environnementale des secteurs numérisés.

C’est pourquoi j’ai déposé cet amendement qui vise à traduire dans la loi, à travers une exigence d’écoconception des services numériques, la nécessaire articulation entre les principes destinés à garantir une égalité d’accès aux services publics et les engagements environnementaux pour un numérique plus durable. La stratégie nationale bas-carbone doit s’appliquer partout et tout le temps ; sinon, nous n’avancerons pas et nous ne parviendrons pas à baisser nos émissions de gaz à effet de serre.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 26.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

La présente proposition de loi a pour ambition de renforcer l’accès de toutes et de tous au numérique et, notamment, aux sites internet publics, comme l’article 6 le prévoit.

Nous souscrivons pleinement à cet objectif d’inclusivité et nous souhaitons l’enrichir d’une obligation de préservation de l’environnement. Protéger les humains et leur environnement, tel a toujours été le credo des écologistes.

La question est loin d’être anodine. En effet, selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), le numérique émet aujourd’hui 4 % des gaz à effet de serre dans le monde. Plus de la moitié de ces émissions sont dues aux infrastructures de réseaux, notamment aux data centers. La maîtrise de ces émissions n’est donc pas un détail ; c’est même une marge de manœuvre significative pour réduire le total de notre empreinte environnementale à l’échelle nationale.

Cette empreinte pose également une question de souveraineté nationale. La Haute Assemblée devrait être sensible à cet argument, au vu de l’attention que la majorité sénatoriale a accordée à cette notion lors de l’examen du projet de loi de lutte contre le séparatisme. En effet, chaque donnée numérique – email, téléchargement, requête web, etc. – parcourt en moyenne 15 000 kilomètres. Ce transit par des serveurs étrangers sur lesquels nous n’avons aucune maîtrise, comme en témoignent les difficultés rencontrées par l’enseignement à distance au début de ce troisième confinement, a un impact fort non seulement sur l’environnement, mais aussi sur notre capacité à maîtriser le trafic de nos données.

Puisque l’article 6 traite des sites internet publics et donc de données potentiellement confidentielles et sensibles relatives aux citoyens, cette maîtrise y est d’autant plus nécessaire. L’impact environnemental n’est pas une lubie des écologistes, puisque le Gouvernement lui-même intègre pleinement cette nécessité de maîtriser cet impact environnemental dans la mise en œuvre d’un numérique responsable à l’échelle du territoire national. En témoigne la feuille de route « Numérique et environnement » de l’État et, plus largement, la stratégie GreenTech pour toutes les administrations.

Mes chers collègues, inclusivité et respect de l’environnement vont de pair. C’est pourquoi, dans cet amendement, nous proposons de soumettre les sites internet publics et l’ensemble des téléservices à un référentiel d’écoconception, en plus du référentiel d’accessibilité prévu dans ce texte ; les modalités de ce référentiel seraient précisées par décret.

Le numérique est un fer de lance de la transition écologique ; c’est bien vers quoi cet amendement tend.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Ces amendements tendent à soumettre les services numériques à un référentiel général d’écoconception. Là encore, je partage l’objectif de leurs auteurs, à savoir réduire l’empreinte environnementale des sites internet et des applications utilisées par les administrations.

Toutefois, l’utilisation du seul terme « écoconception » n’est pas suffisante pour fixer de véritables objectifs en la matière et ne permet pas d’encadrer les mesures du décret d’application qui est sollicité. Une telle disposition risquerait d’ailleurs d’être censurée par le Conseil constitutionnel pour incompétence négative.

C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à retirer ces amendements ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

La position du Gouvernement est la même que celle de votre rapporteur. Je considère même qu’un retrait se justifie complètement dans la mesure où ces amendements sont satisfaits.

En effet, le Gouvernement est pleinement engagé en faveur de services publics écoresponsables, puisque l’administration se doit d’être exemplaire. Ces engagements font l’objet d’un suivi précis et très régulier par Mme la ministre de la transition écologique. Un axe important de travail est la meilleure écoconception des services numériques.

Enfin, la direction interministérielle du numérique élabore avec ses partenaires un guide d’écoconception des services numériques, qui sera mis à la disposition de tous les porteurs de projets courant 2021. Une phase de retour d’expérience et d’évaluation sera ensuite nécessaire, mais on peut d’ores et déjà considérer ces amendements comme satisfaits ; c’est pourquoi j’en demande le retrait.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Patrick Chaize, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Je me permettrai de compléter les propos de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d’État : ces amendements sont d’autant plus satisfaits que nous avons adopté ici même, au début de janvier dernier, une proposition de loi relative à l’empreinte environnementale du numérique qui prenait en compte ces éléments de façon très concrète et transversale.

Et je suis au plaisir de vous annoncer, mes chers collègues, que ce texte va être inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, qui l’examinera à la fin du mois de mai. L’examen de ce texte, parallèlement à celui du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, devrait répondre à vos demandes.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 46, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 2

Remplacer les mots :

sites internet publics des administrations

par les mots :

services de communication au public en ligne des administrations de l’État et de ses établissements publics administratifs

II. - Alinéa 3

1° Remplacer les mots :

sites internet publics des administrations et des téléprocédures

par les mots :

services de communication au public en ligne

2° Après le mot :

téléprocédures

insérer les mots :

de ces administrations et établissements publics

III. - Alinéas 5 et 8

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Mes chers collègues, je vous propose par cet amendement de limiter le champ d’application de l’article 6, afin que le référentiel qu’il prévoit ne s’applique qu’aux administrations de l’État et non aux autres administrations, notamment celles des collectivités territoriales.

À ce titre, l’amendement tend à supprimer les dispositions pénales prévues par cet article, puisque le montant des pénalités aurait été reversé au budget général de l’État. Il y figure également une harmonisation rédactionnelle.

Enfin, je vous y propose la suppression de la référence aux modalités de saisine alternative. Le principe de saisine alternative semble en voie d’être satisfait par le développement des maisons France Services et la généralisation, dans la plupart des procédures, d’une voie de contact téléphonique.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Monsieur le rapporteur, le Gouvernement a comme vous l’ambition de développer la qualité et l’ergonomie des services en ligne.

D’ailleurs, sur les 250 démarches les plus fréquemment accomplies en ligne par les usagers, Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques publie tous les trimestres un observatoire de la qualité des démarches en ligne. Dans cet outil, ces 250 démarches sont évaluées selon plusieurs critères de qualité, parmi lesquels on trouve l’accessibilité aux usagers en situation de handicap.

Le Gouvernement a également multiplié les dispositifs d’appui aux administrations dans l’amélioration de l’ergonomie des démarches : c’est pourquoi nous avons recruté des designers d’intérêt général et des experts en ergonomie. Une enveloppe de 500 millions d’euros est mobilisée dans le cadre du plan de relance pour la numérisation du service public et, en particulier, pour l’amélioration de son accessibilité – c’est quand même considérable !

Dans ce cadre, le Gouvernement estime qu’un référentiel d’ergonomie n’est pas une solution efficace. L’ergonomie passe avant tout par l’écoute des usagers. C’est davantage un enjeu managérial et de compétences internes autour de l’expérience par les utilisateurs qu’une question de règles rassemblées dans un référentiel.

Je suis donc au regret d’émettre un avis défavorable sur l’ensemble de cet article dans son principe ; j’invite donc M. le rapporteur à retirer son amendement qui vise à le préciser.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Mouiller et Favreau, Mme Micouleau, MM. Cambon, Charon, Rapin, Calvet, D. Laurent et Bouloux, Mmes Dumont, Bonfanti-Dossat et Boulay-Espéronnier, MM. Sautarel, Pointereau et Babary, Mmes Imbert et Drexler, MM. Laménie, Sol, Burgoa, Chaize et Mandelli, Mmes Chauvin, Deromedi et Berthet, M. Tabarot, Mmes L. Darcos et Raimond-Pavero, M. Bascher, Mme Garriaud-Maylam, M. Cuypers, Mmes Belrhiti et M. Mercier, M. Regnard, Mmes Di Folco et Chain-Larché, MM. Perrin, Rietmann, Savin, Daubresse et Savary, Mmes Demas, Lassarade, Ventalon et Puissat, MM. Houpert et Lefèvre, Mmes Richer et Gruny, MM. Bouchet, Bonhomme, Saury et Le Gleut, Mme Joseph, MM. Milon et B. Fournier, Mmes Schalck et Borchio Fontimp et M. Sido, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

L’accessibilité des sites aux personnes en situation de handicap est une obligation. Leurs besoins sont pris en compte tout au long de la conception et de l’exploitation du site.

La parole est à M. Philippe Mouiller.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Alors même que la loi les y oblige, de trop nombreux sites internet publics sont encore inaccessibles à une partie des personnes en situation de handicap, notamment aux personnes présentant une déficience visuelle ou mentale.

Associer des personnes en situation de handicap à la conception des sites, ainsi que dans les phases de tests et tout au long de la vie du site, permettrait d’éviter ces situations de discrimination.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Le présent amendement tend à rendre obligatoire l’accessibilité des sites internet publics aux personnes en situation de handicap. Il semble satisfait par l’article 47 de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. En outre, l’article 7 du présent texte prévoit un renforcement de ce dispositif, que nous vous proposerons d’adopter. Je vous invite donc, mon cher collègue, à retirer cet amendement.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Je comprends tout à fait votre démarche et votre objectif, monsieur Mouiller, mais celui-ci me semble parfaitement satisfait par la politique que nous menons.

Ainsi, dans le cadre du plan de relance, Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques a annoncé qu’une enveloppe de 32 millions d’euros serait dédiée à l’amélioration de l’accessibilité et de l’ergonomie des démarches, avec des résultats très concrets. Je veux vous donner un exemple : depuis quelques semaines, le site « Place de l’emploi public », qui recense les offres d’emploi de la fonction publique, est entièrement accessible aux personnes en situation de handicap.

C’est pourquoi le Gouvernement vous invite, monsieur le sénateur, à retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Je vais le retirer, mais je tiens à apporter quelques précisions.

La loi fixe déjà des obligations en matière d’accessibilité, mais il est clair qu’elles ne sont pas appliquées ! Et quand elles le sont, ce n’est que partiellement. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez fait référence aux évolutions qui sont proposées, notamment pour le site d’offres d’emploi de la fonction publique : sachez que ce site est aujourd’hui adapté à certains types de handicap, mais pas encore à tous ! Je pense notamment au handicap mental, pour lequel une vraie difficulté se pose.

J’ai déposé cet amendement pour rappeler que la loi doit être appliquée. La difficulté notable en la matière est que ces sites internet et leurs critères d’accessibilité ne sont pas élaborés par des personnes directement concernées par le handicap. C’est pourquoi le rendu ne concerne qu’une partie des typologies du handicap.

Une vraie difficulté se pose et je crois que c’est un message que vous devez entendre, monsieur le secrétaire d’État : j’ai bien compris que l’amendement était satisfait dans le droit, mais il faut réellement appliquer la législation et faire en sorte que la conception de ces sites inclue les personnes concernées.

Cela dit, je retire mon amendement, monsieur le président.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 8 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 6, modifié.

L ’ article 6 est adopté.

L’article 47 de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées est ainsi modifié :

1° Les deux dernières phrases du II sont supprimées ;

2° Le second alinéa du IV est ainsi rédigé :

« Le défaut de mise en conformité d’un service de communication au public en ligne avec les obligations mentionnées au présent article fait l’objet d’une sanction administrative dont le montant, qui ne peut excéder 100 000 €, est fixé par le décret en Conseil d’État mentionné au V en fonction de la taille, des ressources et de la nature de l’organisme concerné. Une nouvelle sanction est prononcée chaque année lorsque le manquement à ces dispositions perdure. » ;

3° Après le même second alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les obligations mentionnées au présent article s’appliquent dans les communes ou les groupements de communes de moins de 10 000 habitants, les établissements publics qui leur sont exclusivement rattachés, ainsi que pour les opérateurs économiques mentionnés à l’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales, dans la mesure où elles ne créent pas une charge disproportionnée pour l’organisme concerné. La charge disproportionnée est définie par décret en Conseil d’État, après avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées mentionné à l’article L. 146-1 du code de l’action sociale et des familles. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 47, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 4, première phrase :

remplacer le montant :

par le montant :

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Le présent amendement a pour objet de conserver le montant de la sanction prévue actuellement pour défaut d’accessibilité d’un site internet, soit 25 000 euros, que la rédaction actuelle de l’article 7 fait passer à 100 000 euros.

Il ne semble pas opportun d’accroître cette sanction, qui est déjà passée de 5 000 à 25 000 euros en 2018. En outre, un autre renforcement est prévu dans ce même article 7, puisqu’il sanctionne les manquements aux règles relatives à l’accessibilité numérique et non plus seulement l’absence de mention visible sur la page d’accueil précisant si le site internet est conforme ou non à ces règles.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Comme je l’ai précisé à l’article précédent, la politique du Gouvernement en matière d’accessibilité se fixe déjà cet objectif, notamment par le biais du référentiel général d’amélioration de l’accessibilité, qui est applicable à certains services de communication en ligne depuis 2016.

Par principe, je suis donc réservé sur l’ensemble des dispositions prévues à l’article 7. Toutefois, sur cet amendement, qui vise à ramener la sanction à un montant conforme au droit existant, puisque la voix de la raison prime, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Je comprends la volonté de fixer le montant de la sanction à un niveau raisonnable.

Pour autant, j’aimerais savoir combien de sanctions ont été prononcées à ce jour, alors que le texte est appliqué depuis deux ans. Je devine la réponse : aucune ! Si les bonnes intentions sont manifestes, la volonté de rendre effectives les dispositions votées fait défaut.

Je soutiendrai cet amendement qui vise à rendre raisonnable le montant de la sanction. Toutefois, il faut garder en tête que voter des textes et faire des annonces sur l’accessibilité ne suffit pas : devant l’incapacité du Gouvernement à mettre en application les textes votés, on peut s’interroger sur sa détermination en la matière…

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Monsieur le sénateur, je n’ai pas la réponse ici même, mais je m’engage à vous la fournir dans la semaine.

L ’ amendement est adopté.

L ’ article 7 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Chapitre III

Financement de la politique d’inclusion numérique

Le titre VI du livre II du code de l’action sociale et des familles est complété par un chapitre VII ainsi rédigé :

« CHAPITRE VII

« Lutte contre lexclusion numérique

« Art. L. 267 -1. – Le chèque-équipement numérique est un titre spécial de paiement permettant aux ménages dont le revenu fiscal de référence est, compte tenu de la composition du ménage, inférieur à un plafond, d’acquitter tout ou partie du montant des dépenses visant à financer la location ou l’achat d’un terminal numérique dont la remise est conditionnée à la participation à une formation.

« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions de remise du titre mentionné au premier alinéa ainsi que les modalités d’application du présent article.

« Art. L. 267 -2. – Il est institué un fonds de lutte contre l’exclusion numérique, géré par l’Agence nationale de la cohésion des territoires et alimenté par les gains budgétaires permis par la dématérialisation des services publics et la taxe sur certains services fournis par les grandes entreprises du secteur numérique prévue à l’article 299 du code général des impôts.

« Ce fonds a pour mission de financer la politique de lutte contre l’illectronisme, notamment la formation au numérique sur l’ensemble du territoire favorisant l’autonomisation de l’utilisateur, la structuration d’une offre de médiation numérique de qualité, la couverture intégrale du territoire en lieux d’accompagnement numérique des usagers du service public et le chèque-équipement pour les ménages à bas revenus mentionné à l’article L. 267-1 du présent code.

« Les modalités d’application du présent article sont fixées par un décret en Conseil d’État. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 48, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement tend à supprimer l’article 8, qui crée un chèque-équipement numérique afin d’équiper les ménages démunis en terminaux numériques et un fonds de lutte contre l’exclusion numérique, géré par l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT).

Le Gouvernement prend d’ores et déjà en compte la problématique de l’exclusion numérique dans le cadre de sa stratégie de dématérialisation des services publics et de son plan de relance à travers lequel il y consacre 250 millions d’euros. Les deux aides prévues à l’article 8 risquent de n’être que des coquilles vides en l’absence de garanties de financement et d’articulation avec les dispositifs existants.

Par ailleurs, la centralisation des crédits relevant de la lutte contre l’exclusion numérique dans un fonds géré uniquement par l’Agence nationale de la cohésion des territoires pourrait nuire aux nombreuses initiatives locales et nationales, qu’il s’agisse d’aides financières ou d’infrastructures qui prennent déjà en compte les spécificités territoriales.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement de suppression.

Dans la mesure où nous prônons des logiques partenariales, nous croyons plus utile de soutenir des initiatives locales, plutôt que d’instaurer un chèque national.

Qui plus est, je suis assez sceptique sur la faisabilité d’un dispositif qui prévoit que le fonds serait alimenté par les bénéfices de la dématérialisation.

Plus largement, les objectifs de cet article me semblent déjà satisfaits en partie par la mobilisation financière en faveur de l’inclusion numérique. Je rappelle que le plan France Relance est doté d’une enveloppe de 250 millions d’euros à cette fin et que plus de 30 millions d’euros ont déjà été mobilisés en 2019 et en 2020. Ce sont là des engagements importants.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Martine Filleul, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Nous soutenons la démarche qui vise à lutter spécifiquement contre le non-équipement des personnes en difficulté, car il s’agit bien d’un problème singulier.

Il ne s’agit nullement d’une « coquille vide » ; c’est un cadre qu’il faut alimenter. J’espère d’ailleurs que nous y mettrons les moyens nécessaires lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2022.

Pour notre part, nous veillerons à ce que cette démarche pour équiper les personnes en difficulté aille à son terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Angèle Préville

Cette pandémie nous a permis de nous apercevoir que les familles en difficulté ne possédaient pas d’équipements numériques. Pendant les périodes de confinement, leurs enfants scolarisés ont dû travailler soit sur un petit téléphone soit sur une tablette récupérée.

Certaines familles pauvres sont dans l’incapacité d’avoir accès à des terminaux compatibles avec le télétravail ou l’éducation à la maison. On constate un véritable manque.

Par conséquent, le chèque-équipement numérique pour acquérir du matériel serait une bonne chose, d’autant que ces situations de pauvreté vont s’accentuer.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, l’article 8 est supprimé, et les amendements n° 13, 5 rectifié, 9 rectifié et 32 n’ont plus d’objet.

I. – Le fonds prévu à l’article 8 de la présente loi est financé par :

1° Le budget général de l’État ;

2° Le produit de la taxe prévue au I de l’article 299 du code général des impôts ;

3° Les produits divers, dons et legs.

II. – Le II de l’annexe à la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance est ainsi modifiée :

1° Le quatrième alinéa est complété par les mots : « et en garantissant la possibilité de bénéficier d’un accueil au guichet » ;

2° Après le 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :

« 3° De financer la lutte contre l’illectronisme à hauteur de 500 millions d’euros par an d’ici à 2022 et la couverture de l’ensemble du territoire en lieux d’accompagnement des usagers. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 49, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement tend à supprimer l’article 9, qui prévoit les modalités de financement du fonds de lutte contre l’exclusion numérique créé à l’article 8. Ces dispositions ne peuvent relever que d’une loi de finances, conformément aux articles 34 de la Constitution et 34 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Tout à fait logiquement, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement, puisque le fonds de lutte contre l’exclusion numérique vient d’être supprimé.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, l’article 9 est supprimé, et l’amendement n° 14 n’a plus d’objet.

Chapitre IV

Accompagnement des usagers exclus de la dématérialisation des services publics

Le V de l’article L. 1231-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un 3° ainsi rédigé :

« 3° Accompagne la structuration des offres de médiation numérique sous une labellisation unique et établit une cartographie de l’ensemble des lieux d’accompagnement des usagers du service public. »

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 50, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Les mesures prévues à l’article 10 ne relèvent pas du domaine de la loi. Elles nécessiteraient simplement que soient complétées les dispositions réglementaires actuellement applicables.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement. J’ajoute que l’ANCT dispose déjà des outils dont la création est proposée à cet article.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, l’article 10 est supprimé, et l’amendement n° 10 rectifié n’a plus d’objet.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 34, présenté par Mme M. Filleul, MM. Durain et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de quatre mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport relatif aux bénéfices sociaux et aux conséquences environnementales des services d’accès gratuits à l’internet haut débit proposés par les collectivités territoriales, ainsi qu’à l’opportunité de leur généralisation.

La parole est à Mme Martine Filleul.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Pour répondre aux difficultés d’accès à internet haut débit rencontrées par les Français, qu’il s’agisse de problématiques liées à l’extension de la couverture dans les zones blanches ou au coût élevé d’un abonnement, des collectivités ont mis en place des points d’accès wifi gratuit sur leur territoire. Ces dispositifs permettent une connexion à internet au bénéfice de ceux qui, pour des raisons géographiques ou financières, en sont aujourd’hui privés. Ces solutions offrent des opportunités qu’il serait intéressant d’étudier afin d’en connaître la portée.

C’est pourquoi nous demandons que soit remis au Parlement un rapport sur les bénéfices sociaux et les conséquences environnementales des services d’accès gratuit à internet haut débit proposés par les collectivités territoriales, ainsi que sur l’opportunité de leur généralisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Puisqu’il s’agit d’une demande de rapport, que le Sénat refuse habituellement, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Sans être aussi intransigeant que le Sénat sur les demandes de rapport, je précise que la feuille de route « Numérique et environnement », qui a confié à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) et à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la distribution de la presse (Arcep) une mission pour évaluer l’empreinte environnementale des réseaux de télécommunications fixes et mobiles en fonction des usages qu’ils supportent, prévoit déjà un tel un rapport.

Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement. Par ailleurs, comment être favorable à un amendement portant sur le même sujet que l’article 10 après avoir été favorable à la suppression de celui-ci ?

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre désignent un référent en charge de l’inclusion numérique. À ce titre, le référent accompagne et coordonne les initiatives locales en matière de médiation numérique assurant un maillage fin du territoire.

Chaque année, il présente devant l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre un rapport rendu public sur l’état de la couverture numérique du territoire de l’établissement ainsi que la cartographie locale des lieux de médiation numérique.

Un décret définit les conditions d’application du présent article.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 51, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement tend à supprimer l’article 11, qui prévoit que soit désigné, au sein de chaque établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre, un « référent en charge de l’inclusion numérique ».

Une telle création peut être opportune en fonction des situations locales, mais il n’est pas pertinent d’en faire une obligation juridique pour chaque EPCI. Il convient de laisser les collectivités territoriales et leurs groupements s’adapter à leurs besoins propres.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement de suppression.

Le plan France Relance prévoit déjà la désignation, en lien avec les préfectures, de 4 000 conseillers numériques France Services. Cette mesure commence à se déployer de manière très efficace, souvent sous l’égide des conseils départementaux.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, l’article 11 est supprimé, et les amendements n° 2, 35 et 16 n’ont plus d’objet.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 4, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Après l’article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les établissements publics ou privés préparant à un diplôme de travail social délivrent une formation à la médiation numérique aux professionnels engagés dans la lutte contre les exclusions mentionnés à l’article L. 451-1 du code de l’action sociale et des familles.

Un décret définit les conditions d’application du présent article.

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Le rapport sénatorial de la mission d’information sur la lutte contre l’illectronisme et pour l’inclusion numérique dont nous avons mainte fois parlé ce soir décrit bien la fracture numérique, qui est à la fois sociale et générationnelle. Dans la mesure où cet amendement tend à en reprendre l’une des propositions, mes collègues sénateurs se feront certainement un plaisir de le voter !

Le rapport d’information a mis en avant le fait que, pour garantir leurs droits sociaux, les exclus du numérique se tournaient de plus en plus vers les travailleurs sociaux qui, pour 75 % d’entre eux, effectuent des démarches administratives dématérialisées à la place des usagers.

Plus la dématérialisation s’accélère, plus la demande d’assistance numérique croît. Or, selon ce même rapport d’information sénatorial, moins de 10 % des intervenants sociaux ont reçu une véritable formation au numérique. Il apparaît donc cohérent avec une politique réelle de lutte contre l’exclusion numérique de prévoir que les instituts régionaux du travail social délivrent une formation obligatoire à la médiation numérique pour permettre aux travailleurs sociaux d’accompagner au mieux les publics, ainsi que pour pouvoir orienter les personnes en difficulté face au numérique vers des offres de formation existantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement tend à former les travailleurs sociaux à la médiation numérique afin qu’ils viennent en aide aux personnes en difficulté dont ils ont la charge.

Si je partage l’objectif de l’amendement qui tend à venir en aide aux personnes en difficulté face au numérique, il semble toutefois difficile de mettre en œuvre une telle mesure sans concertation avec les représentants de ce secteur. En effet, une telle formation aurait de fait un impact réel sur leurs missions.

En outre, il conviendrait de définir la frontière entre les travailleurs sociaux et les conseillers numériques que le Gouvernement est en train de mettre en place.

Par conséquent, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Mécaniquement, ayant été favorable à la suppression de l’article 11, je ne puis qu’être défavorable à un amendement portant article additionnel à ce même article.

Sur le fond, puisque la question soulevée est importante, je vous informe que le Gouvernement prévoit bien de former les travailleurs sociaux à la médiation numérique. Le volet inclusion numérique du plan de relance consacre 10 millions d’euros à l’outillage et à la formation des aidants, notamment les travailleurs sociaux. Le premier niveau de cette formation sera commun avec celui de la formation Aidants Connect, de façon à sécuriser le processus dans lequel un tiers entreprend une démarche pour le compte d’un usager.

Par ailleurs, une convention est en cours de préparation entre l’ANCT et l’Union nationale des centres communaux et intercommunaux d’action sociale pour inciter ces centres à former leurs agents. Un budget de 500 000 euros est prévu à cette fin.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Comment ne pas maintenir cet amendement, alors que le rapporteur en partage l’objectif et indique qu’il est justifié, quand bien même il émet un avis défavorable ? Quant au ministre, il vient de nous expliquer que ce que nous demandons va arriver !

Dans ces conditions, pourquoi ne pas adopter dès aujourd’hui cette préconisation du rapport d’information ? Mes chers collègues, je vous demande de voter cet amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

À la première phrase et à la dernière phrase de l’article L. 121-2 du code de l’éducation, les mots : « et l’innumérisme » sont remplacés par les mots : «, l’innumérisme et l’illectronisme ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 52, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement vise à supprimer l’article 12, qui prévoit la prise en compte, à côté de l’illettrisme et de l’innumérisme, de l’illectronisme parmi les priorités nationales en matière d’éducation.

Cet article est essentiellement symbolique, puisqu’il ne prévoit ni obligation claire ni objectif tangible. La prise en compte de l’illectronisme aurait donc une portée normative limitée. Elle le serait d’autant plus qu’il n’existe pas de définition claire de ce néologisme.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Philippe Mouiller, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Nous voterons l’amendement de la commission, dont l’adoption entraînera la suppression de l’article 12.

Néanmoins, j’en profite pour alerter le Gouvernement sur l’incapacité de mettre en place, dans les classes adaptées et les instituts médico-éducatifs (IME), des enseignements liés à l’informatique. Nous sommes confrontés à une véritable difficulté en termes d’équipement et de direction des classes. Alors que la loi prévoit des obligations, ces structures sont aujourd’hui incapables de les respecter.

J’ai déposé un amendement sur cette question ; il deviendra sans objet à la suite de l’adoption de l’amendement de la commission. Je souhaite toutefois profiter de cette occasion pour pousser un cri d’alarme à l’adresse du Gouvernement : aujourd’hui, le décalage entre la théorie et la pratique est extrêmement important. Si l’on veut véritablement favoriser l’inclusion des jeunes en situation de handicap, il faut aller jusqu’au bout, ce qui suppose d’aider les IME et les classes adaptées.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, l’article 12 est supprimé, et l’amendement n° 11 rectifié n’a plus d’objet.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 38, présenté par Mme M. Filleul, MM. Durain et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 1° du II de l’article L. 6121-2 du code du travail, après le mot : « illettrisme », sont insérés les mots : « et l’illectronisme ».

La parole est à Mme Martine Filleul.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

La région organise et finance le service public régional de la formation professionnelle. Dans ce cadre, cette collectivité contribue notamment à la lutte contre l’illettrisme sur le territoire de la région, en organisant des actions de prévention et d’acquisition d’un socle de connaissances et de compétences. Cet amendement vise à ajouter la lutte contre l’illectronisme à celle contre l’illettrisme.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement tend à introduire la lutte contre l’illectronisme dans le champ de la formation professionnelle mis en place par les régions, au même titre que l’illettrisme. Il ne s’agit pas d’un cavalier, mais les travaux que j’ai conduits ne me permettent pas de juger du bien-fondé de cet ajout.

La connaissance des outils numériques de base est devenue une clé indispensable pour accéder au marché de l’emploi. Néanmoins, j’ai quelques doutes sur la prise en compte effective de cette nouvelle problématique dans le champ de la formation professionnelle.

Par conséquent, la commission demande l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Le Gouvernement partage pleinement la nécessité de lutter activement contre l’illectronisme, notamment pour faciliter l’accès de tous les citoyens au service public.

Cependant, la mesure proposée n’a pas fait pas l’objet d’une concertation avec les régions, alors qu’elle a un impact pour elles.

Par ailleurs, sur le fondement de l’article L. 6121-2-1 du code du travail, les régions peuvent « financer des actions d’insertion et de formation professionnelle à destination des jeunes et des adultes rencontrant des difficultés d’apprentissage ou d’insertion, afin de leur permettre de bénéficier, à titre gratuit, d’un parcours individualisé comportant un accompagnement à caractère pédagogique, social ou professionnel ». Elles ont donc d’ores et déjà la faculté – ce n’est pas une obligation – d’intervenir en matière de lutte contre l’illectronisme.

Pour cette raison, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le huitième alinéa de l’article L. 721-2 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils organisent la formation continue en matière numérique de tous les enseignants permettant une actualisation régulière de leurs capacités numériques. »

2° Le début de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 611-8 est ainsi rédigé : « Les enseignants suivent régulièrement une formation…

le reste sans changement

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 53, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement tend à supprimer le 1° de l’article 13, qui modifie le contenu des enseignements dispensés par les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé), de telles précisions étant de nature réglementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 6 rectifié, présenté par MM. Gold et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, M. Guérini, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après le mot :

rédigée : «

insérer les mots :

et à son empreinte environnementale.

II. – Compléter cet article par deux alinéas ainsi rédigés :

…° Avant le dernier alinéa du même article L. 611-8, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les formations prévues aux deuxième et quatrième alinéas comportent une sensibilisation à l’empreinte environnementale du numérique et aux usages responsables. »

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 40, présenté par M. Ouzoulias et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

et de leurs connaissances des logiciels libres, des formats ouverts et des ressources éducatives gratuites

La parole est à M. Pierre Ouzoulias.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

J’ai un peu de mal à trouver de la motivation dans ce champ de ruines : il ne reste pas grand-chose de ce texte et je me demande d’ailleurs s’il est encore défendu. Mes collègues du groupe du RDSE pourraient nous le dire. J’ai l’impression que c’est plutôt le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain qui le défend. Je vais tout de même prendre ma part…

Après les travaux de la commission d’enquête sur la souveraineté numérique dont le président était Franck Montaugé et le rapporteur Gérard Longuet, il nous a été répondu par le Gouvernement que le choix des logiciels se faisait en fonction de l’appétence des fonctionnaires pour des systèmes très professionnels et très coûteux et que c’était pour cette raison que les logiciels libres n’étaient pas très prisés. J’ai eu du mal à admettre que, si le ministère des armées achetait Microsoft, c’est parce que les fonctionnaires le lui demandaient…

Nous comprenons cependant la logique de cette argumentation. C’est pourquoi nous proposons une formation spécifique aux logiciels libres pour tous les fonctionnaires, afin qu’ils orientent de façon intelligente les choix de l’administration, puisque celle-ci semble prendre en compte d’abord et principalement leurs desiderata.

Je m’exprime avec un peu de dérision et je vous prie de m’en excuser, mais je pense sincèrement qu’offrir aux fonctionnaires une formation sur les ressources des logiciels libres est aujourd’hui un élément déterminant pour nous réapproprier notre souveraineté numérique. Cela doit être mis en avant.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 17, présenté par Mme Préville, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La formation délivrée contient une sensibilisation à l’empreinte environnementale du numérique et aux usages responsables.

II. – Après l’alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…° Le deuxième alinéa de l’article L. 611-8 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle comporte une sensibilisation à l’empreinte environnementale du numérique et aux usages responsables. » ;

La parole est à Mme Angèle Préville.

Debut de section - PermalienPhoto de Angèle Préville

L’usage du numérique s’est révélé crucial pour maintenir la continuité pédagogique pendant les périodes de confinement. Cette crise sanitaire a révélé l’importance de l’accès à des équipements et à une connexion internet tout autant que l’hétérogénéité des compétences numériques des enseignants.

C’est pourquoi le Conseil économique, social et environnemental (CESE) préconise que l’État et les collectivités territoriales engagent des politiques publiques de coconstruction dans le domaine du numérique éducatif, s’appuyant sur des orientations nationales claires, ambitieuses et compatibles avec les objectifs de développement durable.

Cet amendement vise à introduire dans la formation numérique des enseignants et des étudiants du supérieur une sensibilisation à son empreinte environnementale, afin que ces publics soient en capacité d’appréhender les enjeux du numérique à la fois comme un outil et comme un défi pour la transition carbone et la résilience de notre société.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Les amendements n° 6 rectifié et 17 tendent à compléter l’article 13 afin que la formation au numérique délivrée aux étudiants et aux enseignants comprenne une sensibilisation à l’empreinte environnementale du numérique et aux usages responsables. Si le contenu de ces amendements n’est pas purement réglementaire, ils tendent à modifier l’alinéa 2 que nous avons souhaité voir supprimer pour ce motif. Par cohérence, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

L’amendement n° 40 vise à préciser que les formations visées par l’article 13 portent également sur la connaissance des logiciels libres, des formats ouverts et des ressources éducatives gratuites. C’est le même raisonnement que pour les amendements précédents : il s’agit de compléter un alinéa que la commission souhaite supprimer. Avec la même cohérence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Le Gouvernement estime que la disposition prévue à l’article 13 n’est pas particulièrement nécessaire.

En effet, la formation des enseignants au numérique et par le numérique relève de la mission du service public du numérique éducatif qui a été créé par la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République du 8 juillet 2013, auquel contribue un opérateur qui est le réseau Canopé.

Par ailleurs, l’organisation de la formation continue des professeurs est de la responsabilité de leur employeur et du recteur dans chaque académie – les Inspé y participent – au service d’une stratégie académique.

Au regard de cette situation et compte tenu du fait que le rapporteur propose une suppression partielle et non pas totale de cet article, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée sur l’amendement n° 53 et, par cohérence, pour les mêmes raisons que la commission, émet un avis défavorable sur les amendements n° 6 rectifié, 40 et 17.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Monsieur le secrétaire d’État, depuis tout à l’heure, vous nous vantez – après tout, c’est votre rôle ! – à quel point le Gouvernement fait bien les choses : les maisons France Services, le déploiement de tel ou tel dispositif, le plan de relance, la formation des enseignants, etc. Pourtant, je vous le dis très sincèrement, je croyais que nous vivions tous dans le même monde !

Comment ne pas penser que le déploiement de l’outil numérique et sa maîtrise par chacun de nos concitoyens posent aujourd’hui un certain nombre de questions ?

En outre, il peut y avoir de très bons outils, y compris en matière numérique, mais, dès lors qu’ils sont mal utilisés, ils peuvent être très dangereux – nous avons tous de nombreux exemples en tête et je ne les citerai pas pour gagner du temps.

La proposition de loi de nos collègues du groupe du RDSE, que nous examinons dans le cadre de l’espace qui leur est réservé, est l’occasion de débattre de questions législatives sur ce thème. Je rappelle en toute humilité que nous sommes ici pour faire la loi.

Gardons-nous de croire que cette proposition de loi n’aurait pas sa pertinence, parce que tout serait réglé ! En réalité, dans notre société, sur l’accès de tous aux usages numériques et, plus largement, sur la maîtrise de cet outil, rien n’est réglé !

Il me semblait nécessaire de nuancer vos propos, monsieur le secrétaire d’État. À écouter votre très belle démonstration, tout se passerait de manière formidable à l’éducation nationale. Pardonnez-moi, mais nous avons tous vécu la semaine dernière les mêmes événements ! Certains les appelleront des couacs – chacun trouvera la formulation qui lui convient –, en tout cas il s’agissait de réelles difficultés pour accéder aux outils numériques que l’on nous présente comme un monde formidable. En réalité, cela ne fonctionne pas aussi bien que vous le voudriez.

Dans la vraie vie, si les souris, claviers, webcams et autres peuvent dépanner, ils ne remplaceront jamais les relations et interactions humaines qui sont indispensables pour vivre ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Je tiens tout d’abord à saluer le groupe du RDSE d’avoir déposé cette proposition de loi. Ce texte, même si de nombreux amendements de suppression ont été déposés, a au moins le mérite de soulever des problèmes de société essentiels et de nous permettre d’essayer d’avancer sur ces questions.

Les auteurs des amendements n° 6 rectifié, 40 et 17 l’ont dit, le contexte sanitaire a malheureusement mis en évidence les insuffisances de l’enseignement à distance et les difficultés, notamment financières, qu’il pose pour beaucoup de personnes, en particulier pour les personnes modestes, lesquelles ont du mal à s’organiser avec un ordinateur pour toute la famille.

Même si le numérique évolue très rapidement – trop rapidement peut-être –, il faut rappeler que dans certains secteurs, en particulier en milieu rural, mais pas seulement, il est très difficile d’avoir accès à un réseau fiable de téléphonie mobile, voire de téléphonie fixe. Nos collègues évoquent souvent ici, lors des séances de questions d’actualité au Gouvernement ou de questions orales, les problèmes que les gens rencontrent à cet égard dans leurs territoires respectifs. On le voit, beaucoup de travail reste à faire.

En tout état de cause, je soutiendrai la position du rapporteur.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, les amendements n° 6 rectifié, 40 et 17 n’ont plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 13, modifié.

L ’ article 13 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 39, présenté par Mme M. Filleul, MM. Durain et Cardon, Mme de La Gontrie, MM. Kanner et Bourgi, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Marie, Sueur et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 13

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la deuxième phrase du neuvième alinéa de l’article L. 721-2 du code de l’éducation, après le mot « haineux, », sont insérés les mots : « à l’inclusion numérique et à la lutte contre l’illectronisme, ».

La parole est à Mme Martine Filleul.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Comme mes collègues, c’est sans grande conviction que je vous soumets cet amendement… Il vise à faire bénéficier les professeurs et les personnels d’éducation d’une formation initiale afin de les sensibiliser aux enjeux en matière d’inclusion numérique et de lutte contre l’illectronisme.

Ces personnels jouent un rôle central dans la détection de l’illettrisme ; ils sont aussi les premiers à pouvoir déceler d’éventuels signes d’illectronisme. À ce titre, ils doivent être conscients des enjeux qui y sont associés et pour cela y être sensibilisés lors de leur formation initiale dans les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé).

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Le présent amendement vise à compléter la liste des missions plus ou moins générales des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation.

Alors que le code de l’éducation prévoit déjà que ces instituts assurent des missions aussi variées que la sensibilisation à l’égalité entre les femmes et les hommes, à la préservation de l’environnement, à la lutte contre la diffusion de contenus haineux, à la scolarisation des enfants à haut potentiel, ainsi que des formations à la prévention et à la résolution non violente des conflits, cet amendement vise à ajouter à cette liste la sensibilisation à l’inclusion numérique et à la lutte contre l’illectronisme.

Je comprends bien l’intérêt des auteurs de l’amendement pour ce sujet, mais je doute que l’ajout d’un item à cette longue liste puisse avoir un effet certain. J’émets donc un avis de sagesse.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Pour les raisons que j’ai expliquées précédemment, j’estime que cet amendement est parfaitement satisfait. J’en demande donc le retrait ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 13.

I. – La section II du chapitre IV du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complétée par un L ainsi rédigé :

« L : Crédit d’impôt à la formation aux outils numériques au bénéfice des petites et moyennes entreprises

« Art. 244 quater Y. – I. – Les petites et moyennes entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés ou à l’impôt sur le revenu selon un régime réel peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt égal à 50 % des dépenses engagées destinées à la formation aux outils numériques des leurs dirigeants et de leurs salariés.

« II. – Les petites et moyennes entreprises mentionnées au premier alinéa du I du présent article répondent à la définition de l’annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aide compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

« III. – Un décret précise les modalités d’application du présent article. »

II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 54, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Cet amendement tend à supprimer l’article 14, qui permet aux petites et moyennes entreprises de déduire de leurs impôts 50 % des dépenses de formation au numérique de leurs dirigeants et salariés.

Le Gouvernement a déjà pris des mesures en faveur de l’inclusion numérique des PME dans le cadre du plan de relance à hauteur de 150 millions d’euros. Au total, six dispositifs de sensibilisation, de formation et d’accompagnement seront mis en œuvre à court terme afin d’encourager la formation numérique dans les PME. Ces dispositifs auront des effets pérennes.

En outre, l’aide prévue dans cet amendement ne semble pas adaptée aux spécificités des PME. En effet, il s’agit d’une aide financière indirecte, ce qui suppose que les entreprises doivent disposer d’une trésorerie suffisante pour investir 100 % du coût de la formation l’année n, alors qu’elles n’en tireront des bénéfices que l’année n+1. Ce prérequis est inadapté à la situation des PME, a fortiori dans le contexte de la crise sanitaire, dont les effets financiers seront vraisemblablement durables.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

M. Joël Giraud, secrétaire d ’ État. Je partage la position du rapporteur. Vous comprendrez en outre que l’ancien rapporteur général du budget de l’Assemblée nationale que je suis préfère les aides directes aux crédits d’impôt !

Sourires.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

En conséquence, l’article 14 est supprimé, et les amendements n° 7 rectifié et 18 n’ont plus d’objet.

La présente loi entre en vigueur dans les six mois à compter de sa publication.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 55, présenté par M. Mohamed Soilihi, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Le présent amendement vise à supprimer l’article 15, qui prévoit que ce texte entre en vigueur « dans les six mois à compter de sa publication ». Cette disposition n’est pas opérationnelle, puisqu’elle ne détermine pas le jour d’entrée en vigueur des dispositions du texte.

Par ailleurs, cet article serait contradictoire avec l’article 9, qui modifie la stratégie nationale d’orientation de l’action publique annexée à la loi pour un État au service d’une société de confiance (Essoc), qui sera caduque dans huit mois.

En conséquence, la commission des lois considère que les dispositions de l’article 15 ne sont pas adaptées et qu’il reviendra au Sénat et à l’Assemblée nationale d’affiner ces dispositions transitoires au cours de la navette parlementaire, en fonction des dispositions adoptées in fine.

L ’ amendement est adopté.

La perte de recettes résultant pour l’État de la présente loi est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’était avec intérêt que j’avais pris connaissance de cette proposition de loi. Je pensais qu’elle permettrait de s’attaquer réellement à un problème, sans totalement le résoudre, certes, et qu’elle contenait à tout le moins des pistes intéressantes.

Notre groupe a travaillé pour améliorer cette proposition de loi, comme l’ont d’ailleurs fait un certain nombre de nos collègues des groupes socialiste, communiste ou même Les Républicains, et nous avons déposé des amendements. Mais au final, ce texte a quasiment disparu ! Je ne vois donc pas très bien quel sens il pourrait y avoir à le voter. Tous les amendements qui n’étaient pas des amendements de suppression ont été rejetés, à une exception près.

Par ailleurs, certains de nos amendements ont été déclarés irrecevables au motif qu’ils n’entraient pas dans le périmètre de la proposition de loi. Je pense en particulier à notre amendement tendant à prévoir la possibilité pour les entreprises de plus de 5 000 salariés de vendre à bas prix ou de donner leurs équipements informatiques plutôt que de les jeter, afin de réduire la fracture numérique. Je m’interroge sur les raisons ayant justifié cette irrecevabilité, que je ne comprends toujours pas.

En fait, je suis très sceptique et très dubitatif sur la façon dont cette proposition de loi a été appréhendée par notre commission. Je le regrette d’autant plus que ce texte reprenait une partie des propositions d’un rapport d’information du Sénat qui semblait avoir fait consensus.

Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne votera pas le moignon de proposition de loi qui subsiste et qui est soumis à notre vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je regrette le détricotage total de cette proposition de loi. Certaines des mesures qu’elle prévoyait n’étaient pas plus d’ordre réglementaire que certaines autres qui ont été adoptées dans cette enceinte. De même, cela n’aurait pas été la première fois que le Sénat aurait créé un fonds : il en a créé un en juin dernier au bénéfice des Français de l’étranger.

Supprimer le « droit au guichet » et le choix des modalités des saisines de l’administration, alors que nos concitoyens ne cessent de rencontrer des obstacles pour effectuer leurs démarches et accéder à leurs droits, est incompréhensible. Les maisons France Services sont insuffisantes ; elles ne pourront pas absorber l’ensemble des sollicitations, dont le nombre va croître.

Malgré l’affaiblissement des propositions au fil du débat, nous n’avons pas retiré le texte de l’ordre du jour pour deux raisons : le renforcement des sanctions en cas de non-conformité des sites internet au référentiel général d’amélioration de l’accessibilité pour les personnes en situation de handicap et la mise en place d’un référentiel d’ergonomie des sites publics.

Merci en tout cas à tous ceux qui ont participé à ce débat !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je rappelle tout d’abord que notre groupe reste fondamentalement attaché à l’initiative parlementaire et à la possibilité pour chaque groupe politique constitué au Parlement d’inscrire à notre ordre du jour des propositions législatives, quel que soit le sort qui leur est ensuite réservé.

Indépendamment du résultat final, cette possibilité qui donne aussi un sens à la démocratie est l’occasion pour le Parlement de débattre de sujets de société qui, sans ces initiatives parlementaires, ne seraient jamais abordés, ni au Sénat ni à l’Assemblée nationale.

Je dois dire que la proposition de loi qui nous est soumise a connu ce soir une évolution particulière. Finalement, j’aurais du mal à dire ce qu’il reste du texte initial.

Je reste toutefois convaincue, comme l’a dit Pierre Ouzoulias lors de la discussion générale, que le problème que soulève le groupe du RDSE concerne l’ensemble de nos territoires : des territoires très urbains parfois – je pense aux quartiers populaires – comme des territoires très ruraux ou de montagne – nous le savons bien, monsieur le secrétaire d’État, vous qui avez été président du comité de massif des Alpes et moi qui ai œuvré au sein du comité de massif du Massif central.

En réalité, en l’absence d’un véritable service public du numérique, chacun fait aujourd’hui comme il peut ! Nous-mêmes, nous utilisons les moyens dont nous disposons pour répondre aux aspirations des habitants qui ont besoin de moyens et de formations pour accéder au numérique et entrer ainsi dans cette nouvelle ère qu’est le XXIe siècle.

Le groupe CRCE votera le peu qu’il reste de cette proposition de loi, même ainsi réécrite, convaincu qu’il en restera toujours quelque chose. La volonté du Sénat de s’attaquer à l’illectronisme permettra au débat de se poursuivre demain, peut-être sous une autre forme ou à l’occasion d’autres textes, ici ou à l’Assemblée nationale. Nous voulons en tout cas en garder une trace.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Angèle Préville

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est avec beaucoup de tristesse que je m’exprime à l’issue de l’examen de cette proposition de loi. L’illectronisme est un véritable sujet. Je rappelle tout de même que des millions de personnes dans notre pays sont concernées et laissées de côté. Or leurs difficultés ne sont pas reconnues ce soir. Je trouve cela triste.

Alors que nous avons tous œuvré ce soir pour améliorer le texte et faire en sorte qu’il puisse vivre, j’espère réellement que nous parviendrons à l’avenir à définir l’illectronisme, car c’est une réalité, et à mettre en place des mécanismes pour lutter contre ce fléau.

Nous voterons ce qu’il reste du texte !

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, la discussion de la proposition de loi visant à moderniser et faciliter la procédure d’expropriation de biens en état d’abandon manifeste, présentée par MM. Jacques Mézard, Jean-Claude Requier et plusieurs de leurs collègues (proposition n° 263 [2018-2019], texte de la commission n° 516, rapport n° 515).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Claude Requier, auteur de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je tiens d’abord à saluer l’action de Jacques Mézard, premier signataire de la proposition de loi, en faveur de l’aménagement du territoire, en particulier des villes moyennes, considérées comme des points d’équilibre stratégiques après une période de métropolisation effrénée. Tel est le sens du programme Action cœur de ville, qui vise à revitaliser les centres des 222 villes moyennes sélectionnées. D’autres programmes sont venus ultérieurement compléter cette démarche.

Nos territoires recèlent un potentiel de développement indéniable. Le départ de nombre de nos concitoyens des métropoles vers des villes à taille humaine, à la suite de la crise sanitaire et du recours accru au télétravail, démontre que ces villes n’ont jamais cessé d’attirer en raison du cadre et de la qualité de vie qu’elles offrent.

Pour accompagner ce rééquilibrage de l’espace, les collectivités locales doivent s’adapter en créant de l’habitat et en favorisant l’implantation d’activités économiques et de services publics là où ils tendaient à disparaître. En somme, ce rééquilibrage se traduira par l’éveil des communes dont les centres-bourgs sont peut-être dégradés ou qui comprennent des bâtiments et des terrains en mauvais état, pouvant ressembler par endroits à de véritables dépotoirs.

L’objectif de la présente proposition de loi est d’accompagner la redynamisation de ces collectivités par la mobilisation des biens immobiliers et des terrains existants, mal optimisés du fait du désintérêt de certains propriétaires, qui, pour des raisons diverses, parfois légitimes, les ont délaissés.

L’acquisition du foncier par les collectivités locales a également pour vertu d’être compatible avec la lutte contre l’artificialisation des terres en promouvant une gestion rationnelle du foncier. Celui-ci se faisant rare et cher, nous avons considéré utile de faciliter cette acquisition, en modifiant la procédure d’expropriation des biens en état d’abandon manifeste prévue aux articles L. 2243-1 et suivants du code général des collectivités territoriales.

Créée par la loi du 2 août 1989 portant diverses dispositions en matière d’urbanisme et d’agglomérations nouvelles, la procédure simplifiée d’expropriation pour état d’abandon manifeste, plus allégée et moins coûteuse qu’une procédure d’expropriation de droit commun, permet notamment de s’exonérer du recours à une enquête publique.

Cette procédure a connu plusieurs évolutions récentes.

La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a permis aux établissements publics de coopération intercommunale ou aux conseils départementaux de se substituer à la commune sur demande du maire ou en cas d’inaction de la commune dans un délai de six mois à compter de la déclaration d’état d’abandon manifeste.

La loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ÉLAN) a permis d’engager cette procédure sur les parties d’un immeuble situé dans le périmètre d’une opération de revitalisation de territoire, lorsque des travaux ont condamné l’accès à cette partie.

Cette procédure concerne les immeubles ou parties d’immeuble, les voies privées grevées d’une servitude de passage public, les terrains et installations, sans occupant à titre habituel et non entretenus, situés dans le périmètre d’agglomération de la commune. La commune n’aura pas à établir l’existence d’un risque pour la sécurité publique. Elle sera uniquement tenue d’indiquer la nature des désordres affectant le bien. D’après la jurisprudence, le fait qu’un terrain en friche serve d’entrepôt ne constitue pas une motivation suffisante.

Si cette procédure est simplifiée, elle n’en demeure pas moins entourée de formalités et d’étapes telles que : la recherche active des propriétaires, des titulaires de droits réels et des autres intéressés ; une large information du propriétaire et du public dans des délais suffisants ; l’établissement d’un procès-verbal provisoire et d’un procès-verbal définitif ; la constitution d’un dossier d’expropriation simplifié contenant une évaluation sommaire des coûts, une identification précise du bien et le plan parcellaire des terrains et des bâtiments ; la validation du projet par le préfet ; la transmission du dossier au juge de l’expropriation.

Cette procédure est également entourée de garde-fous : elle ne peut s’appliquer qu’aux biens situés dans le périmètre d’une agglomération et au profit de certaines personnes et d’organismes publics et elle doit avoir pour seule finalité soit une opération liée à l’habitat, soit une opération d’intérêt collectif relevant de la restauration, de l’aménagement ou de la rénovation.

La présente proposition de loi vise à apporter des modifications à la marge, en permettant d’exproprier des biens situés en dehors du périmètre d’agglomération, le droit actuel pouvant en effet entraver l’expropriation de corps de fermes situés en bordure des voies publiques. Elle prévoit également d’étendre les finalités de son utilisation en vue de constituer des réserves foncières. Enfin, elle permet à la commune de désigner l’EPCI comme destinataire du bien plus en amont de la procédure.

Mes chers collègues, l’objectif premier de cette procédure n’est pas tant l’expropriation que la cessation de l’état d’abandon manifeste du bien. Il est avant tout de mettre fin à des situations de blocage qui s’enlisent. Les propriétaires sont tout d’abord invités à sortir de l’inertie. Ils disposent de trois mois à compter de l’établissement du procès-verbal provisoire pour réagir. Ils peuvent s’engager à réaliser des travaux dans un délai fixé par une convention conclue avec la commune.

L’atteinte au droit de propriété est donc limitée et proportionnée grâce à une procédure qui n’est pas dénuée de risques juridiques, si elle n’est pas scrupuleusement respectée.

Le droit de propriété est garanti pour la bonne raison qu’il ne peut y avoir d’expropriation que pour cause d’utilité publique. Comme dans le droit commun, le projet ne pourra être déclaré d’utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, éventuellement, les inconvénients d’ordre social ou l’atteinte à d’autres intérêts ne sont pas excessifs eu égard à l’intérêt qu’il présente. Le juge continuera pour sa part d’appliquer la théorie du bilan, en mettant en balance les coûts et les avantages de l’opération, comme il a coutume de le faire depuis l’arrêt du Conseil d’État Ville nouvelle-Est du 28 mai 1971.

Prenant en compte les spécificités locales, nous avons estimé que la priorisation sur les opérations liées au logement, prévue dans le texte initial, ne devait pas être imposée de manière uniforme. C’est la raison pour laquelle nous avons suggéré au rapporteur de préserver l’application de la procédure simplifiée d’expropriation à l’ensemble des opérations d’intérêt collectif qui en bénéficient actuellement.

Cette priorisation ne pouvait avoir de sens dans les communes qui ne connaissent pas de difficultés en matière de logement, celles qui sont en situation de déprime démographique et pour lesquelles la création d’équipements collectifs ou la valorisation économique des biens, reconnue par la jurisprudence, aurait davantage d’intérêt. Je remercie donc le rapporteur d’avoir modifié le texte en ce sens.

Nous regrettons cependant que l’amendement que j’avais déposé visant à rétablir la possibilité pour le département d’acquérir le bien sur demande du maire, ou en substitution, ait été déclaré irrecevable en application de l’article 40 de la Constitution. Il tendait également à ouvrir la voie à la désignation du département comme acquéreur dès le stade du procès-verbal définitif, sur proposition de la commune.

Telles sont donc les grandes lignes de la proposition de loi, attendue par les élus locaux qui s’engagent dans une politique volontariste d’aménagement de leur territoire afin de recréer des bassins de vie. Le groupe du RDSE vous invite à soutenir cette démarche afin de compléter les outils juridiques dont disposent les maires pour concrétiser leurs projets d’intérêt local. Le rôle du Sénat, vous le savez, est d’écouter et de servir les maires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi visant à moderniser et faciliter la procédure d’expropriation de biens en état d’abandon manifeste, déposée par notre ancien collègue Jacques Mézard – je le salue –, aujourd’hui membre du Conseil constitutionnel, et inscrite à l’ordre du jour de l’espace réservé au groupe du RDSE.

Cette proposition de loi prévoit des modifications ciblées de la procédure de déclaration de parcelle en état d’abandon manifeste prévue par le code général des collectivités territoriales.

Comme vous le savez, il s’agit de l’une des procédures exorbitantes permettant aux communes d’accéder à la propriété en dehors de toute cession à titre onéreux, au même titre que les dons et legs ou l’acquisition des biens sans maître.

La procédure de reconnaissance d’état d’abandon manifeste est originale, puisque le transfert de propriété au bénéfice de la commune n’est pas sa seule finalité. Dans un premier temps, ce transfert est un moyen de pression sur le propriétaire, qui est invité à mettre fin à l’abandon manifeste de son fonds une fois que celui-ci est constaté par le maire. Ce transfert de propriété n’intervient que dans un second temps, si le propriétaire ne s’exécute pas. En ce sens, il peut s’agir pour le maire d’une alternative intéressante aux mesures de police administrative spéciale en matière d’habitat insalubre ou d’immeuble menaçant ruine, s’il souhaite in fine que la commune s’approprie le bien.

Je remercie donc le groupe du RDSE d’avoir déposé ce texte, car cette procédure répond véritablement à une problématique souvent rencontrée par les maires, qui doivent se substituer aux propriétaires défaillants pour effectuer des travaux sans pour autant parvenir à obtenir un quelconque remboursement de leur part.

Elle peut donc être perçue comme une alternative aux astreintes administratives prévues par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique afin d’inciter le propriétaire à mettre lui-même en œuvre les travaux imposés par des mesures de police administrative spéciale.

Comme je l’ai indiqué, l’article unique de la proposition de loi déposée par le groupe du RDSE introduisait des modifications ciblées dans la procédure de déclaration d’état d’abandon manifeste.

La première tendait à supprimer la condition selon laquelle la parcelle concernée doit se situer à l’intérieur du périmètre d’agglomération de la commune. La procédure pourrait donc concerner des biens sur l’ensemble de son territoire.

La deuxième visait à permettre à la commune de prévoir, dès le stade du procès-verbal définitif, que l’expropriation se fasse au profit d’un EPCI, sans attendre le stade de la constitution du dossier.

Enfin, la dernière tendait à ouvrir les catégories de projets pouvant donner lieu à déclaration d’état d’abandon manifeste par le conseil municipal, mais à restreindre ensuite ceux de ces projets qui pourraient donner lieu à expropriation simplifiée.

Seuls les projets en lien avec l’habitat auraient alors pu ouvrir droit à expropriation simplifiée avec, le cas échéant, la possibilité de constituer une réserve foncière en ce sens.

La commission des lois a largement souscrit à la volonté des auteurs de la proposition de loi de simplifier cette procédure pour en améliorer l’efficacité. Ce souhait est d’ailleurs partagé par le Gouvernement, puisque l’article 18 de l’avant-projet de loi dit 4D contient précisément des mesures allant en ce sens.

La commission des lois s’est également montrée très favorable à la suppression de l’exigence relative au périmètre d’agglomération de la commune, car cela facilitera évidemment l’accès des communes au foncier de leur territoire. Cette suppression contribue aussi à reconnaître que l’abandon de parcelles peut être préjudiciable, lorsque ces dernières sont isolées, notamment lorsqu’elles se situent à l’entrée de certaines villes ou de certains villages, car elles en donnent alors une image très négative.

En outre, la suppression de ce critère pourrait permettre aux communes ou aux EPCI d’utiliser cette procédure pour créer à l’extérieur des centres-bourgs des locaux techniques en lien avec les compétences qu’ils exercent. Je pense qu’il s’agit d’une véritable opportunité qu’il nous faut saisir.

Enfin, la commission a été très favorable à ce que la commune puisse faire bénéficier l’EPCI de l’immeuble exproprié dès le début de la procédure, sans remettre en cause la possibilité qui lui est laissée de reprendre une procédure engagée par une commune, mais non conduite à son terme.

En revanche, en accord avec le groupe du RDSE, la commission des lois n’a pas été favorable à la modification technique qui tendait à ouvrir les catégories de projets pouvant donner lieu à déclaration d’état d’abandon manifeste, mais à restreindre ensuite ceux de ces projets qui auraient pu donner lieu à expropriation simplifiée.

La modification proposée dans la proposition de loi initiale n’allait pas dans le sens présenté dans l’exposé des motifs, puisqu’elle limitait les cas permettant une expropriation simplifiée aux seuls projets en lien avec l’habitat.

La jurisprudence nous a montré qu’en l’état actuel du droit un conseil municipal peut déclarer une parcelle en état d’abandon manifeste pour construire, par exemple, un chantier naval, en passant par une expropriation simplifiée, puisqu’il s’agit d’un projet d’intérêt collectif.

Avec la proposition de loi initiale, ce projet aurait toujours pu donner lieu à une déclaration d’état d’abandon manifeste, mais il aurait fallu passer par une expropriation classique, s’agissant d’un projet sans lien avec l’habitat. La procédure de déclaration d’état d’abandon manifeste aurait donc perdu tout son sens pour ce type de projet.

Aussi, la commission des lois a adopté un amendement visant à revenir sur cette seule modification de la procédure, tout en permettant la mise en œuvre de la procédure pour la création de réserves foncières, comme le prévoyait la proposition de loi initiale.

Le seul amendement que je vous présenterai aujourd’hui est de nature technique et rédactionnelle.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, je vous invite à adopter ce texte, qui apporte des solutions efficaces et pragmatiques pour la gestion du foncier de nos territoires.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, RDSE et RDPI.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, avec cette proposition de loi, vous nous donnez l’occasion de débattre d’un sujet qui est au cœur des préoccupations de tous les territoires, particulièrement les territoires ruraux.

Nous sommes, toutes et tous, particulièrement attachés à dynamiser et développer nos territoires – pour avoir été maire pendant vingt-sept ans, je peux en témoigner.

Les élus locaux ne ménagent pas leurs efforts pour que leurs villes et leurs centres-bourgs soient attractifs. La qualité du cadre de vie est un facteur essentiel de succès et d’attractivité. Cet engagement est, au fond, l’une des premières marques d’attachement à notre patrimoine et à ses habitants.

Or chacun d’entre nous a en tête, dans son cœur de ville et de village, un bien abandonné – souvent plusieurs, d’ailleurs – qui se dégrade. Ce sont des verrues – il n’y a pas d’autres mots –, qui peuvent parfois mettre en péril tous nos efforts pour rénover un centre-ville. Je tiens à préciser que ces phénomènes ne se situent pas que dans les centralités.

L’entretien de ces biens et, le cas échéant, leur récupération pour conduire les opérations de réaménagement constituent souvent un facteur clé d’une stratégie de redynamisation des centres-villes et des centres-bourgs. Le dispositif relatif aux biens en état d’abandon manifeste du code de l’urbanisme le permet, bien souvent avec succès.

Pour autant, le nombre important de biens qui semblent abandonnés doit nous interpeller sur ce dispositif pour l’améliorer. Il s’agit d’un sujet d’actualité, alors que l’Assemblée nationale examine en ce moment même le titre IV du projet de loi dit climat et résilience, dédié à l’artificialisation des sols.

En effet, nous devons freiner l’étalement urbain, dont nous mesurons chaque jour les conséquences non seulement écologiques, avec la disparition des terres, lesquelles stockent tout de même 10 % de nos gaz à effet de serre, et la perte de biodiversité, mais aussi économiques et sociales du fait de l’éloignement de l’habitat des lieux d’activités et de services et de l’autosolisme contraint, de plus en plus coûteux pour beaucoup de nos concitoyens, généralement les plus modestes. Ce phénomène n’est pas pour rien dans la dévitalisation de nos centres-villes et centres-bourgs.

Nous ne pouvons y parvenir qu’en modifiant durablement la manière dont nous aménageons le territoire, ce qui nécessite d’intervenir sur deux sujets essentiels. Recycler les zones déjà urbanisées doit devenir plus facile que de faire de l’étalement urbain. C’est l’un des objets de cette proposition de loi qui vise à faciliter la récupération des biens en état d’abandon manifeste. Il nous faut aussi rendre nos zones urbaines désirables, agréables à vivre. C’est indispensable, car habiter en périphérie des villes – à proximité, mais pas trop près quand même –, est une préférence partagée par la majorité des Français. Nous ne réussirons qu’en donnant des perspectives positives sur nos zones urbaines et rurales. C’est aussi l’objet de ce texte, qui tend à traiter la question des verrues qui défigurent nos villes et nos villages.

Le Gouvernement est mobilisé depuis quatre ans dans l’objectif de revitaliser nos territoires, nos petites villes et nos villes moyennes. Il s’agissait d’ailleurs de l’un des principaux engagements de Jacques Mézard, qui avait donné le coup d’envoi avec Action cœur de ville : 222 villes, 5 milliards d’euros et de nombreux outils pour redynamiser et rénover en profondeur nos centres-villes. Les résultats sont là : plus de 2 milliards d’euros déjà engagés et près de 50 000 logements rénovés. Que Jacques Mézard soit l’auteur de cette proposition de loi n’aura donc surpris personne !

Nous poursuivons cet effort avec Jacqueline Gourault et, grâce à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), à travers le programme Petites villes de demain que nous avons lancé en octobre dernier à Barentin, près de 1 624 centralités vont être accompagnées, dont près de la moitié compte moins de 3 500 habitants.

En parallèle, nous accompagnons la redynamisation économique grâce au programme Territoires d’industrie et aux sites clés en main pour faciliter la réinstallation d’entreprises sur des friches urbaines.

Nous accompagnons également la transition numérique grâce au plan France Très haut débit, qui permettra de couvrir l’ensemble du territoire dès l’année prochaine.

Enfin, nous remettons des services publics, grâce à France Services. Il nous faut en effet mobiliser tous les leviers pour que la redynamisation des territoires, qui profite en ce moment d’une dynamique favorable du fait de la crise sanitaire, soit véritablement une tendance de long terme.

Le projet de loi dit 4D, qui sera présenté ici même au mois de juillet prochain, entend poursuivre cet effort. Nous allons notamment favoriser l’accès au dispositif clé pour l’attractivité des territoires : l’opération de revitalisation des territoires (ORT).

Nous avons également prévu de traiter la question des biens abandonnés en réformant la procédure des biens sans maître : ces derniers pourront être récupérés sous dix ans et non plus trente, comme le prévoit le droit actuel.

Nous entendons aussi moderniser les procédures liées aux biens en état d’abandon manifeste. Le texte issu des travaux de la commission est d’ailleurs très proche de celui que nous envisageons. À ce titre, j’y suis favorable : cette procédure doit pouvoir être mobilisée pour constituer des réserves foncières – c’est un préalable pour conduire les opérations de réaménagement de nos centres-villes et centres-bourgs. Elle doit aussi pouvoir s’appliquer sur l’ensemble de la commune – si de nombreux biens sont en centre-ville, il en existe aussi en périphérie. Tous les biens « récupérables » doivent pouvoir faire l’objet de cette procédure, où qu’ils se trouvent : leur recyclage ou leur rénovation permettra d’éviter autant de constructions sur nos terres agricoles.

Toutefois, certains points nécessitent encore des clarifications, notamment pour mettre en œuvre le droit de préemption urbain. C’est d’ailleurs le sens de l’amendement technique que vous avez déposé, monsieur le rapporteur, et auquel je suis favorable. Le Gouvernement soutiendra, sans réserve, l’adoption du texte ainsi complété.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. André Guiol applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Fialaire

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mobilisation du foncier constitue un enjeu majeur pour les maires, en particulier dans le tissu rural, afin de favoriser le développement de leur commune et l’implantation d’activités économiques et de services publics, mais aussi de répondre à la demande croissante de logements.

L’objectif de cette proposition de loi est d’accompagner et de soutenir la revitalisation des communes face au problème croissant de la sous-optimisation des biens immobiliers et des terrains abandonnés par leurs propriétaires.

La procédure d’expropriation des biens en état d’abandon manifeste, exposée au sein du code général des collectivités territoriales, permet à la commune, à l’intercommunalité ou au conseil départemental de se saisir, sous réserve de l’inaction du propriétaire trois mois après sa mise en demeure, des biens qui ne sont manifestement plus entretenus. Cette procédure simplifiée peut être réalisée sans enquête publique.

Cette proposition de loi vise à corriger des dysfonctionnements dans la mise en œuvre de cette procédure, tout en ne portant qu’une atteinte limitée au droit de la propriété, reconnu comme principe à valeur constitutionnelle, et ce dans le respect du cadre juridique existant grâce aux diverses garanties procédurales prévues et au contrôle du juge en bout de chaîne. Je rappelle d’ailleurs que l’objectif premier n’est pas l’expropriation des biens, mais la cessation de l’état d’abandon manifeste.

La suppression de la limite du périmètre permettra, par exemple, de prévenir d’éventuels contentieux sur les biens et parcelles situés hors de l’agglomération. Aujourd’hui, la délimitation n’est pas toujours évidente. Elle permettra également d’améliorer l’esthétique des paysages, dont les maires se font les garants. L’actuelle limitation ne se justifie pas : un bien abandonné reste un bien gênant, où qu’il se trouve. Cette situation reste préjudiciable, notamment lorsque les parcelles se situent à l’entrée des communes.

Au-delà de la valorisation du territoire, la proposition de loi concourt également à aider les maires soumis à l’objectif de zéro artificialisation des sols dans le cadre de la transition écologique que notre société doit opérer.

De même, elle participe à un effort de simplification partagé par le Gouvernement et va dans le sens de l’article 18 de l’avant-projet de loi dit 4D qui devrait, je l’espère, être examiné prochainement §par le Parlement.

Enfin, je profite de cette tribune pour évoquer la procédure d’acquisition d’un bien sans maître qui reste excessivement longue et qu’il serait également pertinent de dépoussiérer.

En effet, lorsqu’il est connu, le décès du propriétaire sans héritier doit être constaté depuis plus de trente ans. Si le propriétaire n’est pas connu, il demeure possible de récupérer le bien, lorsque les taxes foncières n’ont pas été acquittées depuis plus de trente ans. Cette question mériterait un débat à part entière…

Cette proposition de loi de Jacques Mézard et Jean-Claude Requier, qui me semble faire l’objet d’un soutien unanime, est très attendue par les élus locaux qui s’engagent dans une action volontariste de redynamisation de leurs territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe UC. – M. Laurent Burgoa applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme lors de l’examen du texte précédent, je souhaite souligner l’importance de l’initiative parlementaire. Il n’y a pas, d’un côté, de « grands » textes gouvernementaux et, de l’autre, de « petits » textes parlementaires.

Cette proposition de loi est l’occasion d’évoquer la réalité vécue par les élus locaux et les difficultés auxquelles ils sont confrontés. Elle fait écho à un autre texte que nous avons adopté voilà quelques années, sur l’initiative du même groupe politique – la proposition de loi modernisant le régime des sections de commune –, source de réelles avancées.

La question des biens en état d’abandon – immeubles, parties d’immeubles, voies privées grevées d’une servitude de passage public, terrains… – est un vrai sujet, notamment dans les zones rurales. Au quotidien, ces biens posent problème dans la maîtrise de l’aménagement communal. Nous tenons à saluer le travail du rapporteur qui a soutenu l’élargissement du périmètre au-delà de celui dit d’agglomération de la commune.

Nous avons tous en tête des exemples de bâtiments abandonnés ou menaçant ruine qui posent de réels problèmes, souvent en centres-bourgs, mais aussi en dehors de la zone d’agglomération.

Avec cette proposition de loi, les communes pourront se réapproprier la maîtrise de ces biens et donc, plus largement, l’aménagement de leur territoire afin d’apporter de meilleures réponses aux besoins des habitants.

Vous connaissez notre sensibilité : nous sommes vigilants à ce que des bâtiments d’habitation déclassés restent destinés au logement. Nous pensons toutefois que certaines évolutions peuvent être bienvenues, si elles répondent à l’intérêt général.

La nature peut évidemment prêter au romantisme, mais un élu local n’apprécie jamais de devoir gérer au quotidien ce genre de situation d’abandon. Mieux vaut un bien au service de l’intérêt général, comme un local technique, plutôt qu’un bien ou un terrain plus entretenu ou délabré.

Eu égard au travail de la commission des lois, le groupe CRCE votera cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées des groupes CRCE. – M. Henri Cabanel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Moga.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Moga

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je tiens à saluer le texte qui nous rassemble ce soir. Il s’agit d’une initiative parlementaire bienvenue de nos collègues du groupe du RDSE, qui vient concrètement soutenir nos maires dans leurs opérations d’aménagement en simplifiant un outil pertinent pour obtenir le foncier nécessaire à la réalisation de leurs opérations d’aménagement.

Loin de se résoudre à laisser nos villes, mais surtout nos villages, en décrépitude, les auteurs de cette proposition de loi accompagnent un mouvement de fond, initié par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) de 2000 et la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) de 2014, visant à permettre un renouvellement de la ville sur elle-même.

Nous savons que l’urbanisme et l’aménagement sont les deux versants de la vitalité d’un territoire. C’est justement par cet urbanisme et par cet aménagement que nous pourrons optimiser l’occupation d’un territoire et renforcer son dynamisme, particulièrement au centre des agglomérations, dans le strict respect du droit de propriété.

Dès lors, nous soutenons cette proposition de loi qui permet notamment de simplifier la mise en œuvre de la procédure de déclaration de parcelle en état d’abandon manifeste. En supprimant la condition selon laquelle le fonds concerné doit se situer à l’intérieur du périmètre d’agglomération de la commune, ce texte prend en compte la réalité de la diversité de nos communes – parcelles isolées ou pour lesquelles cette procédure était impossible à l’entrée de certains villages.

De plus, je partage la position de la commission des lois, qui ne souhaite pas restreindre l’accès à la procédure d’expropriation simplifiée afin de donner plus d’ampleur à cette procédure bienvenue et de permettre au plus grand nombre d’élus locaux de se l’approprier.

Cette initiative parlementaire de qualité anticipe, à elle seule, deux discussions que nous aurons dans les prochains mois dans cet hémicycle : celle qui sera relative au projet de loi dit 4D, puisque l’article 18 de son avant-projet rejoint le premier thème de l’article unique de la présente proposition de loi en élargissant la procédure d’acquisition des biens en état d’abandon manifeste ; et celle qui sera relative au projet de loi dit Climat et résilience, dont le chapitre 3 du titre IV vise à lutter contre l’artificialisation des sols en favorisant le recyclage des fonciers déjà artificialisés ou en densifiant le tissu déjà urbanisé.

Alors que l’artificialisation des sols a augmenté de 70 % quand la population croissait de 20 %, la présente proposition de loi est un point de départ bienvenu de ce débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Moga

Pour toutes ces raisons, le groupe Union Centriste votera ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Hussein Bourgi

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons entend moderniser et faciliter la procédure d’expropriation de biens en état d’abandon manifeste. Nous sommes très nombreux à partager cet objectif.

En effet, il y a là un vrai enjeu pour de nombreuses communes, en particulier dans nos territoires ruraux et périurbains. Aussi, je tiens à saluer l’initiative du groupe du RDSE, qui nous donne l’occasion d’en débattre et de légiférer ce soir.

Cette proposition de loi vise à lutter contre les situations d’abandon de biens immobiliers auxquelles nos élus locaux sont confrontés dans leur commune. Nous avons toutes et tous, dans nos circonscriptions, des exemples pour illustrer cette réalité : friches, hangars, bâtisses à l’abandon… Autant de verrues disgracieuses qui nuisent à nos paysages.

Face à cette triste réalité, nos collègues maires rencontrent de grandes difficultés, les outils juridiques existants s’avérant souvent insuffisants. Cette proposition de loi vise donc à compléter et à parfaire notre arsenal juridique.

À côté des outils permettant de lutter contre l’habitat insalubre et les immeubles en ruine ou en situation de péril, il s’agit de doter nos élus locaux d’un nouveau levier pour contraindre un propriétaire à remédier à l’état d’abandon de son immeuble ou, à défaut, de procéder à l’expropriation en simplifiant la procédure.

Aujourd’hui, la dépossession au profit des communes est doublement limitée. La première restriction est géographique : les biens dont une commune peut demander l’expropriation doivent se situer dans le périmètre dit d’agglomération. La seconde concerne l’objet des situations pouvant légitimer une expropriation. Ces restrictions entravent, hélas !, l’action des élus locaux. C’est à ce besoin de liberté, de souplesse et d’efficacité dans l’action locale que veut contribuer cette proposition de loi.

Dans un premier temps, les auteurs de ce texte se sont attaqués à la restriction géographique des procédures simplifiées d’expropriation. Cette limitation avait été votée dans la loi de 1989, comme cela a été rappelé, afin que ce dispositif ne puisse être employé pour des terrains laissés provisoirement en friche dans des zones agricoles.

Cette restriction se justifiait juridiquement dans la mesure où ces parcelles auraient pu faire l’objet d’une procédure d’expropriation. Dans les faits, ce risque est extrêmement limité. Cette méfiance, voire cette défiance, à l’égard des maires ne se justifie objectivement pas. Les auteurs de ce texte proposent donc de supprimer cette restriction géographique pour les biens se trouvant en dehors du périmètre d’agglomération de la commune.

Une telle modification du droit devrait permettre aux maires de se saisir de biens susceptibles de générer des difficultés, à l’image de certains corps de ferme situés en bordure des voies publiques.

Faire sauter ce verrou géographique est souhaitable, il est donc bienvenu. Cette première disposition relève du bon sens et recueille le soutien du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Dans un second temps, les rédacteurs de cette proposition de loi ont souhaité élargir la liste des destinations des biens faisant l’objet d’expropriation en raison de leur état d’abandon manifeste.

Le droit positif prévoit que l’expropriation doit avoir pour objet soit la construction ou la réhabilitation à des fins d’habitat soit un intérêt collectif relevant d’une opération de restructuration, de rénovation ou d’aménagement. L’inscription de ces motifs dans la loi restreint les possibilités des élus locaux d’user de la procédure simplifiée d’expropriation pour des projets tournés vers la valorisation économique de leur territoire. Il est évident que l’état actuel du droit n’est pas satisfaisant.

Afin de remédier à ce problème, ce texte proposait initialement de supprimer purement et simplement toute mention dans la loi des objectifs pouvant motiver une expropriation. Ce choix rédactionnel nous avait interpellés en ce qu’il fragilisait juridiquement le texte.

En effet, si aucun motif n’était inscrit dans la loi, l’expropriation aurait pu devenir générale et s’appliquer dans n’importe quelle situation. Elle n’aurait donc plus été réservée aux cas justifiés par l’intérêt général. Or c’est bien ce dernier qui légitime actuellement le recours à l’expropriation, laquelle porte directement atteinte au droit « sacré » de propriété, constitutionnellement garanti.

L’absence de mention expresse de la destination du bien faisant l’objet d’une déclaration d’abandon manifeste aurait donc pu fragiliser le texte. Dans sa grande sagesse, la commission des lois a adopté une rédaction alternative, proposant de compléter la liste des motifs justifiant la constitution d’une déclaration d’abandon manifeste. Notre groupe salue cette initiative qui apporte des garanties juridiques plus solides.

La proposition de loi prévoit ensuite qu’une expropriation qui se fait traditionnellement au bénéfice de la commune puisse également se faire au profit d’une intercommunalité. Cette évolution nous semble bienvenue, puisque l’intercommunalité dispose de moyens administratifs, juridiques et financiers plus importants qu’une commune. Il semble donc plus aisé d’enclencher une telle procédure à cette échelle.

Vous l’aurez compris, nous partageons la philosophie générale du texte proposé par nos collègues du groupe du RDSE. Les contributions et corrections apportées par la commission des lois ont été de nature à améliorer sensiblement cette proposition de loi. Je salue le rapporteur pour son travail. Les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain sont favorables à l’adoption de ce texte.

Applaudissements au banc des commissions. – M. Henri Cabanel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Jean Verzelen

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, un grand nombre d’élus fait face à une abondance de textes qui rendent parfois difficilement compréhensibles les normes en vigueur et obligent à une vigilance extrême.

Aussi, nous nous félicitons de l’initiative de nos collègues du groupe du RDSE qui vise à faciliter et moderniser la procédure d’expropriation de biens en état d’abandon manifeste.

Cette procédure permet aujourd’hui à la commune, à la communauté de communes ou au conseil départemental de se saisir de biens qui ne sont manifestement plus entretenus. Cette procédure simplifiée peut être réalisée sans enquête publique.

Ainsi, les expropriations peuvent-elles être réalisées en vue soit de construire des logements sociaux soit de réaliser tout projet d’intérêt collectif relevant d’une opération de restauration, de rénovation ou d’aménagement.

Cette procédure a été créée pour aider les communes dans leurs efforts de rénovation et de réhabilitation du patrimoine local. Elle permet de traiter, dans le périmètre des agglomérations, les immeubles bâtis ou non bâtis à l’abandon ou en ruine et de favoriser leur réaménagement.

Cette proposition de loi concourt à remédier à des dysfonctionnements dans la mise en œuvre de cette procédure, en apportant des corrections et des simplifications.

Ce texte propose ainsi d’ouvrir la procédure aux parcelles situées à l’extérieur du périmètre d’agglomération. Cette avancée facilitera l’accès des communes à l’ensemble du foncier de leur territoire.

Cette proposition de loi tend à supprimer la limitation des finalités d’utilisation des biens saisis par les collectivités – essentiellement liés à l’habitat aujourd’hui – afin d’offrir davantage de possibilités et de souplesse aux communes.

Elle distingue deux régimes pour la mise en œuvre de la procédure : d’une part, une procédure simplifiée, sans enquête publique préalable, pour les expropriations concernant les biens à l’état d’abandon impliqués dans des opérations en matière d’habitat ou la constitution de réserves foncières en vue de telles opérations ; d’autre part, une procédure de droit commun, régie par le code de l’expropriation, pour cause d’utilité publique comme la création d’espaces publics, la valorisation d’activités économiques ou la construction d’équipements collectifs.

À cet égard, nous approuvons la position de la commission qui a jugé utile de revenir sur la disposition technique qui tendrait à ouvrir les catégories de projets éligibles aux déclarations d’état d’abandon manifeste, mais à restreindre ensuite ceux qui pourraient donner lieu à une expropriation simplifiée.

Comme l’a souligné le rapporteur, une telle démarche ferait perdre sa pertinence à cette proposition de loi et les avancées qu’elle permettrait. Par ailleurs, nous sommes d’accord avec la commission qui souhaite ouvrir cette procédure à la constitution de réserves foncières.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, toujours attentifs aux problématiques relatives aux communes, qui constituent le cœur de notre démocratie, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de ce texte qui fera œuvre utile.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Antoine Lefèvre applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme cela a été dit, la procédure d’expropriation des biens en état d’abandon manifeste, prévue au sein du code général des collectivités territoriales, permet à la commune, à l’intercommunalité ou au conseil départemental de se saisir, sous réserve de l’inaction du propriétaire trois mois après mise en demeure, des biens qui ne sont manifestement plus entretenus.

La proposition de loi que nous étudions aujourd’hui cherche à étendre cette possibilité au périmètre global de la commune et à la simplifier, notamment au profit des EPCI.

Dans son article unique, le texte prévoit d’élargir la procédure d’expropriation des biens aux parcelles situées à l’extérieur du périmètre d’agglomération, ce qui nous semble positif pour nos communes. À l’instar du texte précédent, également présenté par nos collègues du groupe du RDSE, nous pensons qu’il s’agit ici de répondre à un problème concret qu’il faut s’efforcer de résoudre.

Toutefois, nous devons lancer une alerte.

Le droit limite les finalités d’utilisation des biens saisis par les collectivités soit aux opérations de reconstruction ou de réhabilitation aux fins d’habitat, soit à toute opération d’intérêt collectif relevant de la restauration, de l’aménagement ou de la rénovation.

Or la proposition de loi supprime cette limitation, notamment afin de faciliter les projets engagés pour la valorisation économique des territoires, en l’assortissant d’une procédure de droit commun régie par le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique dans tous ses cas de figure, comme la création d’espaces publics, la valorisation d’activités économiques ou la construction d’équipements collectifs.

Alors que l’Assemblée nationale débat d’une grande loi dite climat et résilience – elle est tout du moins annoncée comme telle –, cette réécriture de la loi ne permettrait-elle pas de faciliter l’expropriation de terrains en friche qui pourraient avoir une destination agricole ?

La procédure actuelle prend tout son sens au niveau de l’habitat. Mais demain, ne pourrions-nous pas craindre qu’une municipalité décide de procéder à l’expropriation d’une friche agricole au pourtour de son agglomération, peut-être pour y construire légitimement des logements, mais peut-être aussi pour y implanter des entrepôts ?

L’arrêt de l’artificialisation des sols, voire la désartificialisation, est un levier majeur de la lutte contre le réchauffement climatique. Il peut apparaître mal venu de multiplier les opportunités de faire reculer les zones agricoles.

Mes chers collègues, permettez-moi une réflexion. Vous défendez habituellement si ardemment, dans cet hémicycle, le droit de propriété, que nous devrions rester tout aussi prudents dans cette possibilité d’y déroger. Et ce d’autant plus que l’acte du procès-verbal d’abandon provisoire est réputé notifié par la publicité locale en mairie et dans les journaux, si la personne en cause ou son adresse n’est pas connue.

Je note que ce droit de propriété semble paraître beaucoup plus important à certains, lorsqu’il les incite à s’opposer à la réquisition de biens vides non occupés pour pourvoir à la pénurie de logements que lorsqu’il s’agit de la valorisation d’activités économiques.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Le droit français conçoit l’expropriation comme une atteinte exceptionnelle au droit de propriété, mais il semblerait que l’appréciation de l’atteinte exceptionnelle varie selon les situations et les bénéficiaires…

Le droit de ne rien faire de son bien ne saurait être toléré, quand une collectivité peut y voir une opportunité de développement, mais resterait-il sacro-saint, quand il s’agit de biens construits, finis et entretenus qui pourraient participer à l’hébergement des mal-logés ? §C’est un vrai problème !

Une autre alerte attise ma prudence. Les possibles dérives, déjà constatées, d’utilisation de la procédure comme un simple levier de développement foncier.

La prudence nous impose de voir si un changement de destination à plus ou moins long terme de ces terrains expropriés ne contreviendrait pas à l’esprit de la loi.

C’est pourquoi, malgré une compréhension des attentes raisonnables des collectivités sur le sujet, en raison de ces réserves sérieuses face à des risques réels, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne votera pas ce texte.

Oh ! sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jacques Fernique applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Ludovic Haye

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous partageons sans doute tous ici l’idée que la proposition de loi qui nous réunit aujourd’hui est bienvenue. Elle nous permet d’amorcer un débat sur une procédure qui constitue un levier important pour la valorisation de nos territoires.

Je salue à ce titre le groupe du RDSE pour l’inscription de ce texte dans son espace réservé, et plus particulièrement son auteur, Jacques Mézard, qui a siégé, pendant plus de dix années, au sein de cet hémicycle.

Il s’agit donc, cela a été dit, de faciliter la procédure d’expropriation des biens déclarés en état d’abandon manifeste. Cette procédure présente un intérêt non négligeable : elle permet aux communes, dans des modalités simplifiées, d’accéder à la propriété et de répondre aux nécessités de leur territoire en matière d’habitat ou d’aménagement.

Elle permet dans le même temps de faire cesser des situations dommageables, et parfois ubuesques, dans lesquelles des biens se trouvent vides et dépourvus de tout entretien, sans perspective d’une quelconque évolution de cet état de fait.

En souhaitant faciliter l’expropriation des biens en état d’abandon manifeste, la proposition de loi s’inscrit dans la continuité d’autres textes. Je pense notamment à la loi ALUR de 2014 et à la loi ÉLAN, adoptée en 2018, qui a rendu automatique le constat d’abandon, dans le périmètre d’une opération de revitalisation, des parties d’immeubles dont l’accès a été condamné par des travaux.

Les modifications apportées en commission à l’initiative de M. le rapporteur vont dans le même sens et nous semblent tout à fait pertinentes.

La rédaction initiale de la proposition de loi comportait en effet une limite : elle introduisait en effet un régime hybride d’expropriation pour les biens en état d’abandon manifeste, présentant le risque d’être in fine plus restrictif et en tout cas source d’incertitudes dans ses effets.

En maintenant l’architecture prévue par le code général des collectivités territoriales, la présente proposition de loi s’inscrit en pleine cohérence avec les évolutions successives de la loi.

La loi du 23 juin 2011 a en effet créé une procédure spécifique aux biens en état d’abandon manifeste, alors que la législation antérieure leur appliquait le droit commun de l’expropriation pour cause d’utilité publique, plus contraignant et finalement mal adapté aux situations visées.

Nous approuvons également les trois apports de la proposition de loi conservés par la commission, qu’il s’agisse de l’extension de la procédure de déclaration en état d’abandon manifeste au-delà du périmètre d’agglomération de la commune, de l’extension de la procédure simplifiée d’expropriation à la finalité de la constitution d’une réserve foncière et de l’ajout des EPCI comme bénéficiaires potentiels de l’expropriation, dès la phase de déclaration d’état d’abandon manifeste. Cette dernière clarification s’inscrit dans la continuité du droit de suite donné par la loi ALUR aux EPCI.

Les deux premières dispositions citées nous paraissent en outre de nature à favoriser les opérations de réaménagement, cela a été dit. Elles sont d’ailleurs inscrites dans l’article 18 de l’avant-projet de loi dite 4D.

Les différents textes cités montrent bien que les gouvernements et législateurs successifs se sont intéressés à cette procédure originale, en ce qu’elle permet l’expropriation simplifiée par la collectivité de biens abandonnés, mais qu’elle donne également au maire les moyens, en amont, de contraindre le propriétaire à reprendre en main un bien dégradé et source de nuisances pour sa commune.

Cette procédure répond concrètement à une problématique souvent rencontrée par les maires, qui doivent se substituer aux propriétaires défaillants pour effectuer des travaux, sans toujours parvenir à un remboursement.

Le groupe RDPI approuve à son tour cette proposition de loi dans l’équilibre qui résulte de son examen en commission. Ce texte ouvre utilement un débat qui devrait se poursuivre lors de l’examen attendu du projet de loi 4D.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en 2017, Jacques Mézard, alors ministre de la cohésion des territoires et du logement, répondant à une question orale au Sénat au sujet des procédures d’état d’abandon manifeste et de biens sans maître reconnaissait qu’elles étaient de plus en plus difficiles à mettre en œuvre et peu utilisées, posant ainsi la question de leur opérationnalité.

Cette proposition de loi apporte une évolution positive à la procédure d’expropriation des biens en état d’abandon manifeste. Tout d’abord, je tiens à saluer le travail de simplification accompli par M. le rapporteur François Bonhomme, qui a permis l’adoption de cette proposition de loi à l’unanimité de la commission des lois.

Quelle commune ne compte pas, dans l’une de nos régions, de maison vacante ou de terre abandonnée ? Cette situation plus que fréquente suscite désarroi et défaitisme : la propriété privée est sacrée et on ne peut y attenter ! Pour autant, des moyens existent, qui, sans remettre en cause les fondements du droit de propriété, ouvrent des possibilités pour les communes de remettre en vie un patrimoine en déshérence.

Ce mode d’acquisition foncière singulier permet aux maires de faire cesser l’état d’abandon de la parcelle au lieu de multiplier les arrêtés de péril et les dépenses d’entretien jamais recouvrées ; il permet aussi de limiter les risques de squats. Autant de situations qui constituent quelques fois des obstacles à la mise en œuvre d’une politique d’urbanisme ou peuvent contribuer à la dégradation d’un centre-bourg ancien.

Cette proposition de loi constitue donc une avancée par l’élargissement du périmètre d’intervention à tout le territoire de la commune, au-delà de l’agglomération, et lui donne un caractère véritablement opérationnel.

Cette simplification est également bienvenue dans le cadre de la crise du logement que nous traversons, avec une baisse alarmante de la construction neuve et l’effondrement du nombre de logements sociaux agréés.

Si la procédure d’abandon manifeste ne permettra pas de massifier la construction ni de relancer le secteur, il ne faut pas négliger son utilité, puisqu’il est possible, pour une commune, de revendre le bien objet de la procédure à un bailleur social ou à un particulier.

L’ajout par la commission des lois de l’objectif de « création de réserves foncières » permettant la réalisation des projets d’aménagement ou d’urbanisme est très encourageant pour les opérations d’urbanisme ou les opérations de revitalisation du territoire, qui nécessitent parfois beaucoup de foncier.

La question de la lutte contre l’artificialisation des sols fera débat dans le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Aussi, étendre la procédure d’expropriation des biens en état d’abandon manifeste permettra la réappropriation des espaces urbanisés.

Enfin, nous aurons très vite l’occasion de rediscuter de la procédure d’expropriation de biens en état d’abandon manifeste, puisque l’avant-projet de loi dit 4D inclut un article directement inspiré de cette proposition de loi.

À l’horizon de ce projet de loi, qui sera présenté en conseil des ministres le 12 mai, un dernier frein pourrait encore être levé par le Gouvernement, monsieur le secrétaire d’État, tant pour l’état d’abandon manifeste que pour les biens sans maître. Il s’agit de l’identification des héritiers, qui prend du temps et a un coût important pour les communes, tout particulièrement dans les territoires ruraux.

Le groupe Les Républicains votera bien évidemment cette proposition de loi.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe RDSE. – M. Jean-Pierre Moga applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Nadia Sollogoub

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe du RDSE nous offre de traiter ce soir un véritable sujet communal, un sujet concret, un sujet d’élus, un sujet de petit bourg rural ou de grosse agglomération urbaine.

Il s’agit surtout d’un sujet casse-tête, pour lequel il nous faut des outils réellement opérationnels et efficaces. Nous avons tous, mes chers collègues, rencontré ce type de dossier, celui de la ruine, moche, parfois dangereuse, qui bloque d’autres projets et amène les voisins à venir râler tous les mois dans le bureau du maire.

Commence alors un cycle infernal. Il faut se transformer en Sherlock Holmes pour retrouver la piste d’éventuels propriétaires, partis, décédés, divorcés ou expatriés, des fantômes introuvables et désirés, tellement désirés parce qu’ils ont la clé. Parfois, on les trouve, et ils ne font rien, ils ne veulent pas, ils ne peuvent pas : indifférence, procédure en cours, et c’est parti pour des années de casse-tête et de désespoir.

L’édifice est une verrue, on finit par ne voir que lui. Depuis peu, alors que les sujets de consommation d’espace prennent de l’ampleur, l’emprise occupée pour rien devient encore plus insupportable.

Alors qu’il faut réussir à maintenir le dynamisme démographique sans faire d’étalement urbain, pouvoir « recycler » les biens en état d’abandon manifeste est un vrai enjeu. Mais c’est encore un parcours de l’élu combattant.

Pour abréger le suspens, je dirai que le groupe Union Centriste votera pour ce nouvel outil qu’est la proposition de loi que nous examinons ce soir. Elle intègre à juste titre le fait que les biens en état d’abandon manifeste peuvent se situer en tout point du territoire. Elle lève également les difficultés qui pourraient surgir des partages de compétences entre communes et EPCI.

Mais je profite de cette prise de parole pour évoquer les lacunes de la boîte à outils des élus.

Si la DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux, peut désormais être utilisée pour la démolition de bâtiments abandonnés, il faudrait que les services et les élus aient largement connaissance de cette possibilité. Pourquoi ne pas la rendre également mobilisable pour les travaux urgents que les municipalités doivent parfois engager en lieu et place des propriétaires défaillants ? Dans tous les cas, pour engager les démarches, les maires ou présidents d’EPCI devraient pouvoir bénéficier d’aides financières pour faire face aux divers frais liés aux expertises, aux constats d’abandon, à la publicité et aux autres procédures forcément coûteuses.

La finalité de ce texte n’est pas de faciliter l’expropriation, mais de permettre d’envoyer un message musclé aux propriétaires inscrits aux abonnés absents. La finalité est bien de faire disparaître les biens abandonnés ! Pour ce faire, il faut, vous aurez compris mon message, des lois et des aides financières.

Si le groupe du RDSE fait aujourd’hui une gymnastique admirable entre droit de la propriété privée et article 40 de la Constitution, les élus ont vraiment besoin, monsieur le secrétaire d’État, de beaucoup plus. L’économie circulaire de l’habitat doit se mettre en place, avec votre aide.

M. Jean-Claude Requier applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La parole est à Mme Catherine Belrhiti. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Belrhiti

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui démontre la volonté du Sénat de simplifier la vie des collectivités territoriales.

Nous, sénateurs, sommes en effet régulièrement interpellés par les maires de nos départements sur les difficultés qu’ils rencontrent concernant des immeubles ou des terrains délaissés. À la suite de mes visites dans les communes de Moselle, je peux attester qu’il s’agit d’un sujet récurrent.

Il est tout naturel que notre assemblée se soit saisie de cette proposition de loi visant à moderniser et faciliter la procédure d’expropriation de biens en état d’abandon manifeste.

La négligence des propriétaires, leur éloignement géographique ou les problèmes successoraux font que ces biens non entretenus se dégradent peu à peu.

Face à l’inaction de ces propriétaires, les municipalités se trouvent empêchées d’aménager l’espace pour y accueillir de nouveaux habitants, implanter des services ou valoriser économiquement le territoire. Ce phénomène prend une forme encore plus aiguë dans les communes rurales, où le droit de la mise en péril s’applique difficilement.

La procédure de la déclaration de parcelle en état d’abandon manifeste permet à la commune de déclarer en « état d’abandon manifeste » une série de biens, dans le but d’amener le propriétaire à faire cesser cet état. Engagée par le maire, la procédure permet de déterminer les parcelles, de notifier au propriétaire le procès-verbal établissant l’état d’abandon manifeste et de lui imposer un délai de trois mois pour se manifester.

À l’issue de ce délai, sans réponse ni action de sa part, un procès-verbal permet d’établir l’état d’abandon définitif. Selon une procédure simplifiée, une expropriation peut être engagée, à condition qu’elle ait pour but la construction de logements ou tout objet d’intérêt collectif.

La commission des lois et son rapporteur, M. François Bonhomme, ont été favorables à l’esprit général du texte, mais ont souhaité l’améliorer et le conforter.

Notre commission a conservé deux points positifs : la levée du « périmètre d’agglomération de la commune », qui permettra au maire d’agir sur l’ensemble du territoire, et la possibilité dont disposera l’EPCI de devenir bénéficiaire de l’expropriation.

En revanche, afin de clarifier le texte et de le rendre plus cohérent, il n’a pas été jugé utile de retenir les dispositions ayant pour conséquence de ne réserver la procédure d’expropriation simplifiée qu’aux opérations liées à l’habitat. Cela semblait en contradiction avec les objectifs mêmes de la proposition de loi.

Le rapporteur a judicieusement élargi la liste des projets permettant la déclaration d’état d’abandon. Il a cependant veillé à ne pas faire bouger les lignes de façon excessive entre la procédure normale, relevant du code de l’expropriation, et la procédure dérogatoire. Il était également important de garantir le respect du droit de propriété, en conservant cette liste au stade de la procédure normale.

Je voudrais rendre hommage à l’excellent travail réalisé par le rapporteur de la commission des Lois, M. François Bonhomme.

Nous souhaitons que les maires puissent agir plus librement pour aménager l’espace et y accueillir des habitants, des services et des activités économiques, à l’heure où la ruralité connaît une nouvelle attractivité.

À cette fin, la proposition de loi, améliorée par les travaux de la commission, constitue un bon véhicule législatif. Elle est aussi un prélude à nos travaux sur le projet de loi 4D, qui sera examiné par le Parlement dans les prochaines semaines.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, « la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité. » Tels sont les termes du dix-septième et dernier article de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Pour la première fois, la notion de nécessité publique faisait son apparition dans un texte, qui est désormais de valeur constitutionnelle. Plus de 230 ans plus tard, c’est ce même impératif de nécessité publique qui conduit le législateur à faire évoluer le droit sur le sujet et à renforcer les prérogatives des collectivités en matière d’urbanisme.

Les dernières décennies ont été ponctuées d’évolutions majeures et rapides en matière de logement en France, chacune d’entre elles se proposant d’être une réponse aux nouveaux enjeux de transition écologique et de modernisation des territoires : les lois ALUR, puis ÉLAN, la création de l’ANCT, l’Agence nationale de la cohésion des territoires, interlocutrice privilégiée de l’ANAH, l’Agence nationale de l’habitat, et de l’ANRU, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine.

L’urbanisme est la pièce maîtresse de cette proposition de loi qui souhaite renforcer les capacités des maires en la matière. Ce sont bien eux qui détiennent la connaissance la plus fine des besoins de leur collectivité en termes de construction et de développement urbain.

Les biens immobiliers laissés à l’abandon, nombreux dans la ruralité comme en ville, sont créateurs d’un certain lot de retombées particulièrement délétères pour les communes. Ces fameux « biens sans maître » immobilisent des parcelles parfois précieuses, là où l’évolution rapide des valeurs foncières recommanderait une valorisation sans délai du terrain.

Qu’ils soient localisés à l’entrée ou dans les centres des bourgs, ces biens nuisent à l’attractivité et à l’image globale de la commune. Ils favorisent le développement des squats et des nuisances diverses qui en découlent – insalubrité, vétusté –, sans compter les risques sécuritaires, qui font encore peser sur les épaules des maires une responsabilité périlleuse – danger d’effondrement, non-entretien des installations électriques ou de gaz, etc.

À l’heure de la cohésion des territoires et de leur valorisation économique, il s’agit d’une mesure de bon sens que d’enrichir l’arsenal des maires, afin de remédier à ce phénomène. L’élargissement de la compétence d’expropriation à l’ensemble du territoire de la commune, et non plus à son seul périmètre d’agglomération, est une première pierre dans l’édifice de la continuité urbaine des territoires, à plus forte raison à l’heure des fusions de communes et de la montée en compétence des intercommunalités.

Assurer le développement du tissu construit entre plusieurs centres-bourgs, le long des axes routiers, sera une façon de se prémunir contre le maintien d’îlots mal connectés et mal urbanisés et d’assurer une plus grande connexion entre les territoires.

L’amendement déposé par M. le rapporteur visant à prévoir le critère de constitution de réserves foncières est un remède judicieux pour pallier la crise du logement et les tensions dans la détermination de nouvelles parcelles constructibles.

Enfin, l’inclusion des EPCI dans les bénéficiaires des terrains expropriés est un levier de choix pour soutenir leur montée en compétence.

Force est donc de constater la grande plus-value de ces propositions portées par M. Jean-Claude Requier et appuyées par notre collègue rapporteur François Bonhomme. Le groupe Les Républicains votera donc ce texte, dont il salue la vision d’avenir pour l’urbanisme dans nos territoires.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

Le chapitre III du titre IV du livre II de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Le second alinéa de l’article L. 2243-1 est supprimé ;

2° La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 2243-3 est ainsi modifiée :

a) Après le mot : « commune, », sont insérés les mots : « d’un établissement public de coopération intercommunale, » ;

b) Sont ajoutés les mots : «, soit de la création de réserves foncières permettant la réalisation de telles opérations » ;

3° L’article L. 2243-4 est ainsi modifié :

a)

Supprimé

b) Au troisième alinéa, après le mot : « habitat », sont insérés les mots : « dont est membre la commune » ;

c) Au 3°, les mots : « collectivité publique ou l’organisme » sont remplacés par les mots : « commune, l’établissement public de coopération intercommunale, l’organisme ou le concessionnaire mentionné au premier alinéa de l’article L. 2243-3 » ;

d)

Supprimé

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Chaize

Monsieur le président, je serai bref, mais je tiens à faire part de ma déception. L’amendement que j’avais déposé et qui avait pour objet d’étendre les dispositions de la proposition de loi aux parcelles boisées a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. Nous pourrions pourtant nous retrouver, me semble-t-il, sur une mesure visant à faire bénéficier les parcelles boisées de la simplification introduite par la proposition de loi.

Je le rappelle, les parcelles boisées non exploitées, c’est-à-dire en état d’abandon, sont dangereuses pour nos concitoyens et elles peuvent gêner l’exploitation et la gestion des forêts, notamment des forêts communales.

Monsieur le secrétaire d’État, j’attire votre attention sur ce point. Si j’ai bien compris, cette disposition sera inscrite dans le projet de loi 4D. Il conviendra alors de prendre en compte ce sujet et d’y apporter une réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, je veux saluer l’initiative de nos collègues du groupe du RDSE, ainsi que les orateurs qui se sont exprimés et le travail mené par M. le rapporteur.

Je le rappelle, de nombreuses communes sont concernées par le problème soulevé par ce texte, Antoine Lefèvre l’a dit. Une bâtisse à l’abandon est vite squattée et dégradée ; elle se transforme, comme l’ont dit certains orateurs, en une véritable verrue.

Il existe des vides juridiques et les problèmes de succession sont très compliqués, notamment dans le cadre des indivisions. Ainsi, le partenariat avec les notaires et les services de l’État est indispensable.

Mme Sollogoub l’a dit, des problèmes de financement se posent également. La DETR comme la DSIL, la dotation de soutien à l’investissement local, devraient pouvoir aider les collectivités en la matière.

L’adoption de ce texte permettra d’aménager les cœurs des villes et des villages. La question relève donc vraiment de l’aménagement du territoire. Il s’agit d’aider l’investissement de nos collectivités locales, de manière à avoir des communes accueillantes.

Je soutiens bien entendu ce texte, qui va dans le bon sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

Je me réjouis de l’adoption de ce texte et je constate qu’il est très équilibré par rapport au droit de la propriété.

Il nous permettra d’aborder un autre aspect, celui de la fiscalité. Aujourd’hui, lorsque vous rénovez un bâti à l’abandon, la partie habitable est traitée différemment, d’un point de vue fiscal, des autres parties – je pense notamment aux anciens corps de ferme. Une telle situation engendre d’importants problèmes en termes de moyens qui peuvent être consacrés à la rénovation.

Je me réjouis donc de l’adoption de ce texte. Il est essentiel pour l’ensemble de notre territoire et nous permettra de traiter d’autres aspects, encore orphelins à l’heure actuelle. C’est pourquoi je remercie à mon tour le groupe du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

L’amendement n° 4, présenté par M. Bonhomme, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

a) Le mot : « organisme » est remplacé par les mots : « établissement public de coopération intercommunale ou d’un organisme » ;

II. – Alinéa 9

1° Après les mots :

3°, les mots : «

insérer le mot :

la

2° Remplacer les mots :

commune, l’établissement public de coopération intercommunale, l’organisme ou le concessionnaire mentionné au premier alinéa de l’article L. 2243-3

par les mots :

le bénéficiaire

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Le présent amendement vise à apporter des précisions rédactionnelles.

D’une part, il tend à préciser que la déclaration d’état d’abandon manifeste ne peut être prononcée que pour les établissements publics de coopération intercommunale « y ayant vocation », c’est-à-dire ceux qui détiennent une compétence habitat ou aménagement correspondant aux opérations justifiant l’expropriation.

D’autre part, il tend à ce que les règles fixant la forme des arrêtés pris par le préfet pour déclarer l’utilité publique de l’immeuble en cause prennent en considération toutes les catégories de bénéficiaires au profit desquels l’expropriation peut être poursuivie.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Le sous-amendement n° 5, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Amendement n° 4, alinéa 3

Remplacer les mots :

d’un organisme

par les mots :

de tout autre organisme

La parole est à M. le secrétaire d’État.

Debut de section - Permalien
Joël Giraud

Le présent sous-amendement est d’ordre rédactionnel.

Je précise tout de suite que le Gouvernement est favorable à la précision introduite par l’amendement présenté par la commission, sans laquelle les départements, par exemple, seraient exclus de l’attribution, ce qui ne serait pas bienvenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 5 ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

La commission n’a pas pu se prononcer sur ce sous-amendement. Toutefois, à titre personnel, j’y suis favorable.

Le sous-amendement est adopté.

L ’ amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 15 avril 2021 :

De dix heures trente à treize heures et de quatorze heures trente à seize heures :

Ordre du jour réservé au groupe INDEP

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Proposition de loi visant à orienter l’épargne des Français vers des fonds souverains régionaux, présentée par Mme Vanina Paoli-Gagin et plusieurs de ses collègues (texte n° 385, 2020-2021) ;

Proposition de loi d’expérimentation visant à favoriser le retour à l’emploi des bénéficiaires du revenu de solidarité active, RSA, présentée par M. Claude Malhuret et plusieurs de ses collègues (texte de la commission n° 518, 2020-2021).

De seize heures à vingt heures :

Ordre du jour réservé au groupe CRCE

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Proposition de résolution en application de l’article 34-1 de la Constitution, invitant le Gouvernement à envisager la poursuite de la procédure de ratification du CETA, présentée par de M. Fabien Gay et plusieurs de ses collègues (texte n° 249 rectifié, 2020-2021) ;

Proposition de loi visant à garantir effectivement le droit à l’eau par la mise en place de la gratuité sur les premiers volumes d’eau potable et l’accès pour tous à l’eau pour les besoins nécessaires à la vie et à la dignité, présentée par Mme Marie-Claude Varaillas, M. Gérard Lahellec et plusieurs de leurs collègues (texte n° 375, 2020-2021).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée le jeudi 15 avril 2021, à zéro heure quinze.