Intervention de Laurent Frémont

Commission des affaires sociales — Réunion du 5 mai 2021 à 9h00
Gestion de la crise sanitaire — Accès des proches aux établissements pendant la crise sanitaire

Laurent Frémont, secrétaire général du collectif « Tenir ta main » :

J'ai reçu hier soir le témoignage suivant : « Mon père est hospitalisé au CHU de Poitiers pour un cancer de l'oesophage. À ce jour, seule ma mère va voir mon père un jour sur deux. Nous, les enfants, n'avons aucun droit de visite. Je ne sais pas quoi faire pour avoir ce droit de visite. Mon souhait le plus cher était d'accompagner mon père dans les derniers moments de sa vie. Je suis en colère et scandalisé ». On reçoit des dizaines de témoignages identiques tous les jours.

Ce cas n'est peut-être pas représentatif, mais on a vraiment l'impression que les personnes sont totalement désemparées. Le droit reste vague et il n'y a jamais eu de recommandations sur le sujet. C'est pourquoi il me semble utile de rappeler le principe et de sortir de ce flou juridique.

On a parlé des vaccins pour les Ehpad, mais il existe des tests dans les établissements de santé. Dans mon cas, on était en novembre. Nous-mêmes avions été testés négatifs. Mon père aussi. Qu'est ce qui justifiait l'interdiction de visites ?

Les témoignages que nous recevons sont très divers. Ils recouvrent des situations variées, mais ce qui ressort avant tout, c'est le fait que les gens sont dévastés. Plus d'un an après, une dame qui n'a pas pu voir son père avant sa mort écrit : « Je cherche papa dans toutes les silhouettes d'homme que je croise. On ne sait jamais : s'il n'était pas mort, s'ils s'étaient trompés. Comment être sûre ? On ne l'a pas vu. Il aurait été mis dans une housse sans être habillé. Personne de l'hôpital ne nous a jamais appelés. Il est mort, et voilà, c'est tout. Notre boulot s'arrête là. Où est l'humanité ? ».

Le traumatisme pour la société est considérable. J'entends tout à fait vos débats. Madame parlait des contentieux contre les soignants : non ! Le pouvoir de police reste aux mains des directeurs d'établissements. Ce serait donc des contentieux à l'encontre des directions. Ce pouvoir est aujourd'hui arbitraire. Je comprends tout à fait que, pour des motifs d'ordre public ou des motifs sanitaires, on puisse restreindre les visites dans des contextes particuliers, mais il faut encadrer ce pouvoir de restriction et le clarifier pour sortir de l'arbitraire de ces situations disproportionnées et inégalitaires.

Pour ce qui est du dialogue avec l'ordre des médecins, nous sommes en contact avec les fédérations. C'est évidemment avant tout une question de moyens humains et matériels et de protocoles. Nous en proposons d'ailleurs et nous travaillons avec des soignants. Avant tout, je pense qu'il faut réaffirmer le principe et l'inscrire comme un droit fondamental pour les patients.

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