Intervention de Fabrice Gzil

Commission des affaires sociales — Réunion du 5 mai 2021 à 9h00
Gestion de la crise sanitaire — Accès des proches aux établissements pendant la crise sanitaire

Fabrice Gzil, Inserm / Université Paris Saclay, membre du Comité consultatif national d'éthique :

Je voudrais revenir sur la notion de glissement. Il est important qu'on ne considère pas qu'il existe, d'un côté, des personnes porteuses d'une forme de sérieux sanitaire, qui auraient conscience des dangers, qui protégeraient et, de l'autre côté, de dangereux idéalistes libertaires et humanistes. Beaucoup de gériatres nous dont dit durant la crise que le danger de contracter ou de transmettre le virus existait, mais qu'il fallait également tenir compte de tous les risques gériatriques habituels liés à l'interruption des activités, des visites et d'un certain nombre de thérapeutiques - dénutrition, troubles cognitifs, dépression, perte d'autonomie fonctionnelle, sarcopénie. Ceci nécessite des arbitrages entre des préjudices différents. Il est très difficile de le faire lorsqu'on est tétanisé par la peur. Il s'agit de récupérer très vite la capacité de réaliser ces arbitrages.

Je souscris à l'idée que la question de l'accompagnement des mourants et des hommages rendus aux défunts est un sujet spécifique. Le décret sur la mise en bière immédiate a fait couler beaucoup d'encre. On a mis huit mois avant qu'une décision du Conseil d'État ne vienne la critiquer. En début de crise, quand on ne maîtrisait pas les modalités de contamination et qu'on se demandait si le virus était comparable à celui d'Ebola, on a réagi avec vigueur, mais un délai de huit mois pour réagir pose problème, alors qu'on a eu assez vite des éléments montrant qu'il existait des différences majeures selon les pays, y compris pour les différentes toilettes.

La question est de savoir comment éviter l'arbitraire, que ce soit en matière de visite ou pour mettre en place ce type de règle, et comment rester prudent dans l'édiction d'une norme. La mise en bière immédiate a été souvent appliquée de manière très différente, parfois avec une extrême rigueur, alors qu'on a pu constater ailleurs un peu plus de souplesse. La question est pour moi de savoir comment retrouver une capacité de discernement, même en situation très anxiogène.

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