Je souscris totalement aux analyses, aux conclusions et à la proposition du rapporteur, qui n'a rien laissé dans l'ombre.
Que reste-t-il de ce projet de révision constitutionnelle une fois que l'on en a retiré le venin ? On peut se le demander... Néanmoins, cet amendement est un témoignage de bonne volonté. Il répond aussi à une exigence politique : marquer la préoccupation que doit exprimer le Sénat pour la protection de la planète. Et puisque le marqueur politique ultime, aujourd'hui, consiste à ajouter une nouvelle disposition aux principes fondamentaux de la Constitution, pourquoi pas.
Toutefois, je retiendrai de cet épisode une nouvelle manifestation du cynisme en politique. Tout s'est effectué au mépris du fonctionnement normal des institutions démocratiques. L'affirmation selon laquelle les membres de la prétendue Convention citoyenne, sorte de « comité de salut public 3.0 », auraient été tirés au sort est mensongère. Ils ont été sélectionnés conformément aux méthodes en vigueur dans les organismes de sondages : des catégories plus ou moins représentatives de la population ont été déterminées, et c'est seulement au sein de chacune d'elles que le hasard est intervenu. D'ailleurs, la plupart des personnes sollicitées se sont récusées. Du point de vue de la représentativité, cette instance relève d'une véritable imposture. L'autoproclamation de légitimité de ses membres est un scandale démocratique.
Le Président de la République, à l'origine de ce processus toxique pour le fonctionnement de la démocratie, avait dit que les propositions de la Convention seraient reprises sans filtre. C'est en effet le cas. Pour un chef d'État, reprendre sans filtre les propositions d'une instance illégitime et les introduire dans le texte constitutionnel est une véritable abdication. Ne pas défendre les principes fondamentaux du fonctionnement des institutions républicaines illustre une totale abolition de l'esprit critique.
Notre réunion d'aujourd'hui marque le retour au fonctionnement normal des institutions. En prévoyant que notre texte fondamental ne pourrait pas être révisé sans un vote préalable des deux assemblées, le Constituant de 1958 a fait preuve de discernement. En outre, le Sénat est une assemblée libre, indépendante, non alignée. Notre responsabilité est essentielle. Nous devons brandir haut et fort notre drapeau, celui de la défense des principes de la République.
Quelle politique écologique voulons-nous ? Une écologie dogmatique, de la décroissance, qui fait prévaloir la préservation de l'environnement sur toute autre considération, dont le développement économique et le progrès social ? Ou une politique de développement durable, défini à l'article 6 de la Charte de l'environnement comme la conciliation entre la protection de l'environnement, le développement économique et le progrès social ? Si nous voulons rompre avec cette recherche d'équilibre, prenons le texte du Gouvernement et acceptons le saut dans l'inconnu consistant à remettre les clés du pouvoir législatif en matière d'environnement au Conseil constitutionnel. C'est l'écologie radicale, l'écologie de la décroissance, qui triomphera.
Au-delà du débat juridique, alors que la question du réchauffement climatique est devenue prégnante, c'est à ce niveau-là qu'il faut situer l'enjeu.