Intervention de Dominique Estrosi Sassone

Réunion du 5 mai 2021 à 21h30
Impact de la réduction de loyer de solidarité rls sur l'activité et l'avenir du logement social — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Photo de Dominique Estrosi SassoneDominique Estrosi Sassone :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la réduction de loyer de solidarité a été une erreur stratégique. Comment la réparer à présent ?

Trois ans après la décision du Président de la République de réduire de 5 euros les aides personnalisées au logement et d’imposer une réduction des loyers aux bailleurs sociaux, les résultats sont là : moins de 90 000 logements sociaux ont été agréés en 2020, contre plus de 120 000 en 2016. Le virus, les élections municipales et les maires réfractaires ont bon dos. En réalité, c’est bien à la suite des décisions de 2017 que la courbe s’est infléchie et c’est bien la politique du Gouvernement qui en est la principale cause.

La RLS, qui a entraîné une ponction de 1, 3 milliard d’euros, a considérablement affaibli les capacités des bailleurs sociaux, aussi bien pour entretenir leur patrimoine que pour investir dans de nouveaux logements.

Ces mauvais chiffres ne sont pas conjoncturels, ils sont bien le résultat d’une stratégie délibérée du Gouvernement. Le logement a été identifié en 2017 comme une source d’économies pour rétablir l’équilibre des finances publiques. C’est un fait.

Pourtant, madame la ministre, ces logements non construits auraient rapporté davantage aux finances publiques s’ils l’avaient été que les économies réalisées grâce à la RLS. Selon le rapport annuel du compte du logement, publié fin 2020, les aides au logement sont passées de 2, 2 % du PIB en 2010 à 1, 6 % en 2019. Si le logement en a été la cible privilégiée, c’est parce qu’on a estimé, au sein de l’État, que la France dépensait trop et mal pour le logement et qu’il fallait changer de modèle.

Les restrictions budgétaires décidées sont un puissant aiguillon pour constituer de grands groupes de bailleurs sociaux, qui pourront ainsi ouvrir leur capital et se financer sur les marchés. Cela rend possible la remise en cause des ressources dédiées au secteur. N’est-ce pas d’ailleurs ce que nous constatons à travers les attaques contre Action Logement et la participation des entreprises à l’effort de construction ?

Par ailleurs, les économies réalisées sur les APL diminuent leur caractère solvabilisateur et constituent une étape vers leur forfaitisation et leur dilution dans un futur revenu universel.

L’erreur stratégique étant commise, comment peut-on la réparer ?

Certaines solutions ont déjà été mises en œuvre par le Gouvernement, et je lui en donne acte. Quelque 500 millions d’euros ont ainsi été mobilisés pour la rénovation énergétique des logements sociaux dans le plan de relance, même si la construction neuve y est complètement oubliée.

Par ailleurs, dans le cadre d’un protocole signé avec le secteur pour la construction de 250 000 logements sociaux d’ici à 2022, Action Logement mobilisera près de 1 milliard d’euros dans le cadre de son plan d’investissement volontaire, tandis que la Banque des territoires portera son enveloppe de titres participatifs de 700 millions à 1 milliard d’euros.

Toutefois, au moment où doivent débuter des négociations pour l’après-2022, on ne peut se satisfaire de la reconduction de l’existant, à l’exception technique de la situation des bénéficiaires de la RLS qui ne touchent pas les APL. Comme le recommande la Cour des comptes, il faut réaliser un véritable audit de la viabilité à long terme des bailleurs sociaux.

Pour ma part, je pense qu’il faut aller au-delà et explorer au moins trois pistes supplémentaires.

Premièrement, il faut compenser les surcoûts de la réglementation environnementale 2020 (RE2020) sur la construction de logements, qui pourraient atteindre 18 %, et accompagner les bailleurs dans la transition énergétique.

Deuxièmement, il convient de protéger le logement social des effets de l’objectif « zéro artificialisation nette », qui va renchérir le coût du foncier. Faut-il créer une exception pour le logement social ? Ne serait-il pas temps de réexaminer le zonage qui régit les subventions des opérations et qui n’a pas été revu depuis 1978 ?

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