Nous nous penchons aujourd'hui sur la fiscalité du transport routier de marchandises, un sujet sensible et symbolique, comme l'histoire récente a su en témoigner.
Plusieurs articles du projet de loi dit « Climat et résilience », dont notre commission s'est saisie pour avis sur le rapport de notre collègue Christine Lavarde, concernent le transport routier de marchandises. Nous connaissons la fragilité de la filière, dont les marges sont réduites, qui est très fortement exposée à la concurrence et qui souffre d'une harmonisation européenne incomplète. Le secteur représente plus de 400 000 emplois directs et il est majoritairement composé d'un tissu de petites et moyennes entreprises. Même si sa transition énergétique est entamée, sa part dans les émissions des transports est loin d'être anodine. Les poids lourds représentent environ 20 % des émissions de l'ensemble des véhicules routiers. La décarbonation du parc de véhicules lourds de transport routier de marchandises doit donc être une priorité.
Dans le cadre de cette table ronde, nous nous intéresserons à deux dispositifs qui, à n'en pas douter, susciteront des débats lors de l'examen du projet de loi au Sénat.
Premièrement, l'article 30 du projet de loi prévoit, à l'horizon 2030, un objectif de suppression du tarif réduit de TICPE dont bénéficie aujourd'hui le transport routier de marchandises. Cette disposition s'inspire d'une proposition de la convention citoyenne pour le climat. Le rapport sur l'impact environnemental du budget de l'État annexé au projet de loi de finances pour 2021 estime à 1,27 milliard d'euros par an cette dépense fiscale, classée parmi les dispositifs contraires aux objectifs de réduction des émissions de gaz à effets de serre.
Deuxièmement, nous allons discuter de l'article 32 du projet de loi, qui prévoit une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour permettre aux régions, dans le cadre d'une expérimentation qui sera instituée par l'article 7 de la loi dite 4D (décentralisation, différenciation, déconcentration et décomplexification), de créer une contribution portant sur le transport routier de marchandises. Si certaines d'entre elles ont appelé de leurs voeux le pouvoir de taxer les véhicules lourds en transit, toutes les régions ne sont pas intéressées par le dispositif. Il sera par ailleurs intéressant de pouvoir discuter de l'organisation et des objectifs de cette contribution expérimentale, notamment au regard du projet d'ordonnance diffusé la semaine dernière et visant à instaurer ce dispositif pour la Collectivité européenne d'Alsace.
Pour faire le point sur ces sujets, nous avons le plaisir d'accueillir quatre intervenants, que je remercie d'avoir accepté notre invitation : M. Marc Papinutti, directeur général des infrastructures, des transports et de la mer ; M. Rodolphe Lanz, secrétaire général de la fédération nationale des transports routiers ; et, en visioconférence, MM. Michel Neugnot, président de la commission transports et mobilité de Régions de France et premier vice-président du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté et Gérard Allard, expert transports pour France nature environnement .
Je donne d'abord la parole à M. Marc Papinutti pour un propos liminaire qui devrait nous éclairer sur le contenu, les objectifs et la portée des deux dispositifs contenus dans le projet de loi « Climat ».