J’y suis totalement et vigoureusement opposé.
La disposition visée prévoit une clause d’exonération de responsabilité très large pour les OSC en matière de lutte contre le financement du terrorisme et le blanchiment de capitaux.
Nous avons déjà eu ce débat la semaine dernière. Pour ce qui est de l’humanitaire, les choses sont claires : il n’y a pas de criblage et l’affectation ne saurait être soumise à quelque vérification que ce soit. Concernant le développement, en revanche, tel n’est pas le cas : il y a une obligation de criblage visant à vérifier si les fonds mis à disposition d’actions de développement sont bien affectés à de telles actions et ne sont pas détournés à d’autres fins.
J’imagine que nous sommes tous d’accord là-dessus, mais je n’en suis pas certain : l’amendement tel qu’il est rédigé ne porte pas uniquement sur l’humanitaire, mais intègre aussi le développement et la partie intermédiaire, la « zone grise », qu’on appelle « stabilisation », immédiatement postérieure à la crise. Est-ce encore de l’humanitaire ? Est-ce déjà du développement ? Il y a parfois matière à hésitation…
J’ai déjà donné des exemples ici même ; je veux bien le faire de nouveau, mais ils sont légion… Prenons le cas de travaux à haute utilisation de main-d’œuvre menés par des ONG tout à fait respectables dans tel ou tel pays : est-on bien sûr de la vérification des destinataires finaux des paiements ? Je connais bien un pays où la question se pose : la République centrafricaine. En RCA, il faut vérifier ; à défaut, on alimente les milices ! Et je pourrais multiplier les exemples…
Il y a donc un problème – et je n’ai pas dit que je l’avais résolu – avec la zone grise. Et c’est précisément parce qu’il y a un problème qu’il faut identifier les critères en fonction desquels on décide, pour telle ou telle action menée, s’il y a criblage ou pas.
Je vous demande donc, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement en attendant que nous ayons fait un rapport sur ce sujet. Ce n’est pas un rapport de plus ; c’est un rapport nécessaire sur lequel, d’ailleurs, je me suis engagé à l’Assemblée nationale. Il est indispensable que nous puissions déposer sur les bureaux des commissions des affaires étrangères des deux assemblées, trois mois après la promulgation du texte, des propositions permettant de sortir de cette difficulté.
On ne peut pas être laxiste là-dessus ; il y va du financement du terrorisme : ce n’est pas un sujet secondaire !
Je suggère donc que vous retiriez cet amendement en attendant le rapport qui vous sera communiqué, parce que cette affaire nécessite vraiment une précision et une intelligence des situations très particulières. On ne peut pas se contenter du tarif habituel en matière de lutte contre le blanchiment : c’est beaucoup plus complexe que cela.