Mes chers collègues, à titre purement personnel, je tiens à prendre mes distances avec cette réforme constitutionnelle : c’est même de l’incompréhension qu’elle m’inspire, car elle présente un caractère proclamatoire et, à mon avis, peu productif.
Mme Assassi l’a expliqué à l’instant avec beaucoup de clarté et de justesse : il faut distinguer, d’une part, la Constitution et, de l’autre, l’action publique.
En l’occurrence, il s’agit de défendre la biodiversité et de prévenir le changement climatique. Cette action est multiforme. Elle fait l’objet de recherches permanentes. Elle est également négociée. Elle exige un approfondissement scientifique constant, qui est loin d’être terminé : en la matière, il n’y a pas de vérité révélée.
On pourrait en citer de multiples exemples : pour ma part, je n’en citerai qu’un. Quand on a la curiosité de se plonger dans le code de l’environnement, on constate qu’il est constitué uniquement de procédures. Il ne contient pas une règle de fond. La plupart des projets sont assujettis à des procédures préalables très strictes destinées à préserver l’environnement. Mais, comme par hasard, on a été obligé de prévoir quantité de clauses dérogatoires. Leur but est de limiter la protection de l’environnement et de la biodiversité pour aménager des équipements en faveur de l’environnement lui-même, comme des installations de production d’énergie ou d’épuration de l’eau.
Pour lutter contre le changement climatique, il faut mener des politiques industrielles, agricoles ou encore d’aménagement. Vouloir résumer et contraindre l’ensemble de ces initiatives par un seul terme, en l’occurrence celui de « garantit », est contre-productif.
Enfin, notre connaissance de la biodiversité est encore extrêmement imparfaite. Si vous approfondissez votre analyse de cette question en lisant la littérature scientifique, vous constaterez que les zones d’incertitude demeurent considérables.
Je le répète : il serait contre-productif de contraindre l’ensemble de ces politiques dynamiques et évolutives par les seuls termes « garantit […] la diversité biologique ». Ce serait, de surcroît, commettre une erreur profonde quant au rôle d’une Constitution !