Intervention de Jacques Le Nay

Réunion du 11 mai 2021 à 14h30
Développement solidaire et lutte contre les inégalités mondiales — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Jacques Le NayJacques Le Nay :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui le projet de loi de programmation relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales.

Ce texte, très attendu, est notamment la concrétisation de l’engagement du Président de la République, pris au début de son mandat et rappelé lors de son discours à l’université de Ouagadougou, que 0, 55 % du RNB de notre pays soient consacrés en 2020 aux politiques d’aide publique au développement.

Depuis lors, la pandémie du covid-19 a bouleversé les équilibres mondiaux et redistribué les enjeux des politiques d’APD. Elle a exacerbé des inégalités déjà existantes et en a créé de nouvelles.

Au-delà de la crise sanitaire mondiale que nous traversons, le déploiement de l’APD française s’inscrit dans un contexte géopolitique marqué par l’urgence climatique, mais aussi par la persistance des crises, l’aggravation des inégalités mondiales, la résurgence de logiques de puissances nationales affaiblissant le multilatéralisme, les guerres persistantes et les difficultés certaines à faire respecter les droits humains fondamentaux. Les ambitions, les outils et les moyens de la politique de développement solidaire ayant eux aussi évolué, il était nécessaire que nous puissions débattre sur ces sujets.

Ce projet de loi de programmation permet d’entériner des ambitions affichées depuis quelques années.

Je pense, par exemple, à l’objectif des 0, 55 % du RNB devant être consacrés à l’APD en 2020, objectif qui a été atteint.

Je pense également à l’amélioration de la redevabilité de la politique de développement solidaire, via un rapport annuel du Gouvernement au Parlement, qui comportera toutes les informations nécessaires à la compréhension globale des actions menées au cours de l’année qui précède et où sera notamment mentionnée la liste des pays dans lesquels intervient l’AFD. Cette mention nous permettra, lors du débat qui suivra la remise de ce rapport, d’échanger sur les financements accordés à certains pays émergents.

La création d’une commission indépendante d’évaluation de la politique de développement solidaire et la transformation d’Expertise France en société par actions simplifiée au sein du groupe AFD sont également des avancées auxquelles nous souscrivons.

Cependant, si ces avancées doivent être saluées, certaines dispositions nous semblent trop timides. La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a contribué à clarifier le texte, via plusieurs modifications, et, à cette occasion, je souhaite remercier les corapporteurs de la qualité de leurs travaux.

La priorisation des objectifs était nécessaire pour une meilleure lisibilité des politiques de développement, et je salue l’inscription de la protection de la planète comme l’un d’entre eux. En effet, la crise sanitaire due au covid ne doit pas placer la situation d’urgence climatique au second plan.

La commission a également proposé une véritable programmation jusqu’en 2025, rendu la taxe sur les transactions financières à sa vocation première, amélioré l’information du Parlement et renforcé la tutelle de l’État sur l’AFD.

Enfin, elle a œuvré pour que la part de dons de l’APD soit renforcée en fixant un objectif de 65 % de dons, contre 59 % actuellement.

Il nous semble que le texte proposé par notre commission est équilibré, mais nous insisterons sur quelques points.

Nous soutiendrons plusieurs amendements afin de défendre l’usage du français dans les instances internationales, la promotion de son apprentissage et l’aiguillage de financements de l’AFD vers les établissements enseignant notre langue. Nous souhaitons également que le français soit la langue de travail de l’AFD.

Il nous a semblé que les territoires d’outre-mer n’étaient pas reconnus à leur juste valeur ; aussi, nous vous proposerons un amendement visant à clarifier leur rôle dans le cadre de la politique de développement solidaire, afin d’en faire des territoires relais, essentiels dans leur environnement régional.

Nous proposerons également un dispositif alternatif à celui de l’article 9, en soutenant l’amendement de notre collègue Michel Canévet.

Le Parlement contrôle et évalue, en vertu de son rôle constitutionnel, les politiques d’aides publiques. L’amendement vise donc à regrouper et à centraliser les activités de contrôle de la politique française de développement, tout en les élargissant au sein de cette nouvelle commission indépendante.

Les différents groupes parlementaires d’amitié seraient en particulier associés aux travaux de la commission, en apportant leur éclairage et leur évaluation sur leur zone de compétence. Un autre amendement tend à approfondir cette participation des groupes d’amitié à la politique de développement, en les associant aux travaux des conseils locaux de développement, autre nouveauté de ce texte.

Enfin, nous soutiendrons, par un amendement de notre collègue Olivier Cadic, nos entrepreneurs français à l’étranger, qui contribuent directement à la création de richesse dans les pays dans lesquels ils s’implantent.

Étant soumis au droit local, ces entrepreneurs français à l’étranger ne bénéficient d’aucune aide française dans le cadre de la pandémie ou lors de catastrophes naturelles, par exemple. Ouvrir le dispositif de garantie et d’aides à l’ensemble des entrepreneurs français à l’étranger dans le besoin permettrait d’épauler un partenaire majeur de l’aide publique au développement lorsqu’ils sont en difficulté.

À l’heure actuelle, l’actualité mondiale nous montre plus que jamais à quel point l’aide publique au développement est cruciale. Plusieurs pays, plusieurs régions du monde, sont en proie à des déséquilibres qui laissent craindre, dans un futur proche, l’émergence de situations contraires à nos intérêts.

L’APD, levier puissant de notre diplomatie et de notre rayonnement, doit répondre aux défis communs par la pérennisation de la solidarité internationale.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion