Je crois, pour commencer, qu'il y a sur le sujet un problème de langage, parce qu'on confond bien-être et maltraitance animale : la société s'émeut sur des images et des témoignages qui montrent de la maltraitance, et on ne parle pas de tous les progrès accomplis pour le bien-être animal. La maltraitance est condamnée, elle relève d'ailleurs non pas d'un seul type d'exploitation, mais se rencontre à toutes les échelles - j'ai vu en Haute-Loire des élevages de 20 vaches où les animaux étaient maltraités, la maltraitance peut être partout.
Ensuite, ce qui me révolte, comme agriculteur, c'est de voir combien les progrès massifs accomplis ces dernières années ne sont absolument pas reconnus, et qu'on en demande toujours plus aux éleveurs. Ceux qui demandent toujours plus, d'ailleurs, ne veulent subir aucun inconvénient : on demande des animaux en plein air, des abattoirs à proximité... mais loin de chez soi, bien entendu.
S'interroge-t-on au moins sur l'acceptabilité de ce « toujours plus » pour l'éleveur ? Dans une société qui travaille de moins en moins, où l'effort est toujours moins reconnu, on en demande toujours plus aux éleveurs : il y a un moment où ce n'est plus acceptable, au nom même de la fraternité. Avant d'accuser les éleveurs, commençons donc par regarder si ce qu'on leur demande est acceptable. Or certaines demandes sont absurdes, même sur le plan matériel : s'il faut un territoire grand comme un département pour mettre tous les cochons en plein air, on voit bien que ce n'est pas possible ! Et à travers de telles demandes, ne vise-t-on pas, en réalité, l'interdiction de l'élevage dans son ensemble ? Nous sommes en démocratie, chacun peut penser ce qu'il veut, mais il faut alors le dire clairement, pour que chacun puisse se prononcer dans le débat en connaissance de cause.