Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, chère Jocelyne Guidez, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis heureux de clore avec vous aujourd’hui le chapitre parlementaire concernant cette proposition de loi tendant à prévenir les usages dangereux du protoxyde d’azote.
Je souhaite avant tout remercier chaleureusement son auteure, la sénatrice Valérie Létard, dont l’engagement et la maîtrise auront permis de mettre ce sujet sur la table, d’en faire un véritable objet politique et d’aboutir à un texte qui, rapidement, pourra produire de pleins et utiles effets.
Je me permets également de saluer la présence en tribune de la députée Valérie Six, qui a aussi travaillé sur ce texte. Il m’importe de souligner l’intelligence collective, la collaboration importante, utile, efficace, entre le Sénat et l’Assemblée nationale à cette occasion.
Je sais que les habitants des régions les plus touchées par le phénomène d’usage détourné du protoxyde d’azote sont nombreux à attendre avec impatience l’entrée en vigueur de cette loi. À Tourcoing et dans d’autres villes, on ne connaît que trop bien les ravages que peut causer ce geste d’apparence anodine, qui consiste à aspirer une petite quantité de gaz issu d’un banal contenant. Un geste, qui, reproduit deux, trois, dix, parfois des douzaines de fois peut en effet causer chez son auteur des problèmes physiques et neurologiques extrêmement graves.
Ce produit de consommation courante, utile à certains professionnels ou à certains cuisiniers amateurs, souffre aujourd’hui d’une bien mauvaise réputation. Il faut dire que la documentation est étoffée sur ses détournements. On l’a vu utilisé dans des bars, dans des soirées étudiantes, dans des fêtes foraines ; on l’a vu vendu par des buralistes ou facilement accessible sur internet, dans des emballages dont le marketing ne laissait pas de place au doute quant à l’usage qui en serait fait ; on a vu des mineurs en consommer, parfois encouragés par des adultes inconscients des risques ou à l’insouciance qui frôle la mise en danger d’autrui.
Il était devenu insupportable pour les responsables politiques et pour les autorités sanitaires de constater une telle déconnexion entre les comportements des individus et les risques avérés.
Je rappelle que le ministère de la santé avait publié deux communiqués de presse qui alertaient sur les risques liés à cet usage détourné, en novembre 2019 puis en juillet 2020, à l’occasion de la publication des données de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).
Une campagne d’information et de réduction des risques avait par ailleurs été lancée pour toucher directement non seulement les consommateurs, y compris les plus jeunes, mais aussi les acteurs de terrain : associations, collectivités locales, encadrants et personnes en lien avec les jeunes.
Bien sûr, il fallait que cela s’accompagne d’un changement législatif. En ce sens, cette proposition de loi a été plus que bienvenue, à un moment important. Tout son parcours plaide d’ailleurs en sa faveur. Si le temps a pu paraître long depuis son premier examen, ici même au Sénat, la faute n’est pas à chercher, une fois n’est pas coutume, du côté d’éventuelles dissensions politiques. Les avis, au contraire, ont été très largement partagés sur l’opportunité d’avancer et, globalement, sur les termes des mesures à mettre en œuvre.
Sénat et Assemblée nationale ont chacun apporté leur contribution à ce texte, contribution que le Gouvernement a estimée parfaitement utile et cohérente : des délits précis ont été créés ; des peines adaptées, prévues ; des situations et des lieux déterminés, ciblés. Ce texte est aujourd’hui équilibré, et ce à double titre, comme j’ai eu l’occasion de le dire en commission la semaine passée.
D’une part, il maintient évidemment l’autorisation de consommation de ce produit, qui n’est ni un stupéfiant ni un produit toxique, mais un produit d’usage courant. En même temps, il enjoint les pouvoirs publics de contrôler précisément les usages détournés qui peuvent en être faits.
D’autre part, il porte un message puissant de prévention et de protection des mineurs, et accorde en même temps une attention particulière à la responsabilisation des majeurs.
Ce volet de prévention est évidemment incontournable. Nombre d’entre vous, en commission des affaires sociales, la semaine dernière, avaient soulevé ce sujet. Avec des acteurs comme la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), l’ANSM, l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, des travaux fondamentaux sont menés pour sensibiliser les publics les plus jeunes aux risques éventuels auxquels ils s’exposent avec de telles pratiques. Parents, amis, équipes éducatives : toutes et tous doivent également en être informés.
Cette prévention doit aussi se faire à l’égard d’autres produits, car les mésusages se déplacent régulièrement vers d’autres substances, par effet de mode ou du fait de l’interdiction d’une pratique particulière, comme c’est justement le cas en l’espèce.
Les pouvoirs publics sont et resteront pleinement mobilisés sur ces enjeux, autour du ministre des solidarités et de la santé, Olivier Véran, et à travers un réseau puissant, structuré, notamment par les agences régionales de santé (ARS).
Je rappellerai, pour conclure, que des dispositifs d’aide sont à disposition des jeunes, de leurs entourages et du public en général, car la loi n’est jamais stigmatisante. Elle est faite avant tout pour protéger et accompagner les publics à risque. Il ne faut donc pas hésiter à se saisir de ces différents outils en cas de questions ou de difficultés liées à la consommation de produits ou de drogues. Je pense évidemment aux consultations jeunes consommateurs (CJC), qui proposent un service d’accueil, d’écoute, de conseil et d’orientation. Ce service, assuré par des professionnels des addictions, est dédié aux jeunes ; il est entièrement gratuit et confidentiel.
Je pense également à des dispositifs d’aide à distance, en l’espèce à drogues-info-service.fr, qui est devenu un site de référence à cet égard, ou encore à des démarches locales, évidemment, que vous êtes nombreux à connaître, à encourager, quand vous n’en avez pas été à l’origine.
Mesdames, messieurs les sénateurs, c’est en agissant par cette pluralité de canaux que nous arriverons à véritablement protéger nos concitoyens de dangers, que, trop souvent, ils ignorent ou minimisent.
Ne relâchons pas notre vigilance, à l’instar de Mme la sénatrice Valérie Létard, que je remercie de son action. Je remercie enfin l’ensemble de la représentation nationale d’avoir apporté son soutien à ce texte, qui va maintenant pouvoir entrer rapidement et pleinement en vigueur.