Intervention de Julien Denormandie

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 18 mai 2021 à 15h00
Projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets — Audition de M. Julien deNormandie ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation :

Ma vision politique est construite autour de la notion de souveraineté agroalimentaire. Dans le cadre de la semaine de l'agriculture, je participais ce matin à un colloque consacré à ce sujet et j'y ai rappelé qu'elle était à la fois un objectif pour toute une Nation - pas de pays fort sans une agriculture forte -, une question d'identité et un sujet de protection face aux enjeux du changement climatique, mais aussi de protection du consommateur. La qualité environnementale et nutritionnelle est la marque de fabrique de notre agriculture, nous la revendiquons à travers le monde, mais elle est trop souvent dénigrée dans notre propre pays.

Garantir notre souveraineté alimentaire suppose de sortir de nos dépendances. Je pense tout d'abord à notre dépendance à l'égard de certaines importations, comme le soja brésilien. Le plan de relance prévoit à cet effet 120 millions d'euros en faveur d'un plan protéique qui était attendu depuis de nombreuses années et ce projet de loi permettra de lutter contre la déforestation importée. Je pense aussi à notre dépendance à l'égard des aléas climatiques, ou à l'égard d'une guerre des prix défavorable à notre modèle agricole français dont la compétitivité hors coût est majeure.

Dans son volet agricole, le projet de loi reprend sept propositions de la Convention citoyenne pour le climat (CCC). Notre politique agricole relève en effet largement de l'échelon législatif européen au travers de la politique agricole commune (PAC) et des normes et des standards de production. Elle relève également de mesures non législatives, comme les 50 millions d'euros que le plan de relance a prévus pour les cantines ou les 80 millions d'euros qu'il débloque pour financer les projets d'alimentation territoriaux (PAT).

Les cantines sont un lieu profondément républicain, qui nous permet de lutter contre les inégalités sociales nutritionnelles. Laissons le choix dans les menus, sans dogmatisme, car chacun a le choix de son régime alimentaire. Mais l'équilibre nutritionnel doit être garanti et mon combat, c'est celui de la qualité nutritionnelle dans les cantines, notamment des viandes dont près de 60 % sont importées : on sert parfois dans nos cantines du poulet ukrainien ou brésilien, qui ne présente pas le même apport nutritionnel qu'un poulet français. Nous avons donc renforcé les dispositions de la loi Egalim sur la qualité des viandes dans les cantines afin d'atteindre 60 % de produits sous label.

J'ai demandé à ce que l'étude d'impact prévue par la loi Egalim sur l'expérimentation obligatoire d'un menu végétarien par semaine soit rendue plus tôt que prévu afin que ses conclusions nous permettent de recommander une généralisation de cette expérimentation.

Les collectivités qui proposent un menu à choix multiple pourront expérimenter le menu végétarien et, dès 2023, l'État proposera, lui aussi, un menu végétarien dans tous ses menus à choix multiple.

Le projet de loi prévoit deux modifications des règles de la commande publique afin de faciliter l'approvisionnement des cantines en produits locaux : des critères additionnels environnementaux - fraîcheur, degré de transformation - sont institués et le seuil du gré à gré est relevé à 100 000 euros.

Les fruits et légumes de saison présentent une bien meilleure qualité nutritionnelle que les autres ; or nous nous sommes progressivement habitués à consommer tous les fruits et légumes toute l'année... Le projet de loi va dans le sens d'une meilleure prise en compte de la saisonnalité, mais nous pourrons encore progresser au Sénat sur ce sujet.

Enfin, je tiens à être très clair : le texte n'introduit aucune taxe ou redevance sur les engrais azotés. Mais si, deux années de suite à compter de 2024, la France ne respecte pas ses engagements européens en termes de trajectoire de réduction des émissions de protoxyde d'azote et d'ammoniaque et si le sujet n'a pas avancé au niveau européen, alors il sera envisagé d'instaurer une telle taxe, votée par le Parlement. Il ne s'agit donc absolument pas d'une surtransposition comme on l'entend souvent !

Enfin, le projet de loi introduit des dispositions sur la forêt et sur l'eau : l'eau est un élément essentiel en agriculture, sur lequel nous devrons avancer avec courage. Nous pourrons continuer à travailler sur ce volet.

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