Intervention de Nathalie Goulet

Réunion du 1er juin 2021 à 14h30
Modification du règlement du sénat — Adoption d'une proposition de résolution dans le texte de la commission modifié

Photo de Nathalie GouletNathalie Goulet :

Madame la présidente, mes chers collègues, depuis quatorze ans que je siège dans cette maison j’ai régulièrement constaté l’atrophie du débat en séance publique. L’examen du projet de loi de finances tourne même à la caricature : trois minutes pour les rapporteurs, deux minutes par-ci, deux minutes par-là… Ce débat, absolument ridicule, ne rime à rien au regard du travail réalisé par nos rapporteurs au sein de la commission des finances et de ce qu’il en reste en séance publique. Nous n’arrivons pas à le rationaliser ni à le rendre efficace.

En ce qui concerne la question des deux minutes trente, il ne faut pas confondre le débat en commission et celui en séance publique. Le public n’est pas le même, monsieur le président de la commission des lois : la séance publique s’adresse à ceux de nos collègues qui n’appartiennent pas à la commission saisie au fond et qui ont envie de s’exprimer sur le texte concerné. La réduction de leur temps de parole n’est donc pas compensée par celui des membres de la commission saisie au fond. Cette légère inflexion de la réflexion ne me semble pas très logique.

Le pouvoir de contrôle devrait être l’ADN du Parlement. Je soutiens qu’il faut augmenter le droit de tirage pour les commissions d’enquête et les missions d’information. Il s’agit du cœur de notre métier, et nous le faisons très bien. Las, cet excellent travail est immédiatement enterré une fois les commissions terminées. Et quand le sujet rejaillit quelques années plus tard, tout le monde a oublié que le Sénat avait travaillé sur cette question. Je pense notamment aux deux commissions d’enquête demandées par le groupe communiste républicain citoyen et écologiste sur la fraude fiscale : nous n’avons jamais pu obtenir de suivi, alors qu’il s’agit d’un vrai sujet. Il a fallu se battre pour la mise en place d’un groupe de travail au sein de la commission des finances, mais l’instauration d’une délégation dédiée permettrait de mettre en valeur la modernité du Sénat autrement qu’un temps de parole réduit. On montrerait alors l’exemple à l’Assemblée nationale sur un sujet éminemment citoyen et éminemment important, surtout en cette période de crise.

Par ailleurs, certaines de nos commissions d’enquête ont été absolument formidables. Je pense notamment à celles sur le Mediator et sur le Vioxx : chaque fois que nous avons un débat sur la sécurité sanitaire, on en revient aux préconisations retenues par ces deux commissions d’enquête.

Il me semble préférable de réfléchir au suivi de nos travaux plutôt que de les enterrer. Cela pourrait sans doute profiter à beaucoup d’autres commissions d’enquête. C’est à la mise en place d’un tel dispositif qu’il faut tendre.

Il faut être deux pour danser le tango : l’ordre du jour partagé, qui ressemblait à une très bonne idée sur le papier en 2008, devient un problème totalement inextricable quand on l’applique de façon rigoureuse. Cet ordre du jour saucissonne nos débats jusqu’à les rendre parfois complètement inintelligibles : des discussions très importantes sont interrompues par des débats de contrôle ou d’initiative parlementaire, faute de souplesse.

La réflexion sur la modernisation de notre travail doit se poursuivre, mais pas au détriment de la séance publique, ni des groupes minoritaires ni des parlementaires minoritaires au sein de leur groupe, lesquels sont alors deux fois minoritaires !

J’attendrai le sort qui sera fait à mes amendements pour me prononcer sur la proposition de résolution.

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