La commission des lois, saisie au fond sur ce texte, a délégué à notre commission le titre III sur l'urbanisme et le logement à l'exception des articles 27 et 29 et trois autres articles sur les colonnes montantes de gaz, sur les chambres d'agriculture et sur le Haras du Pin.
Le projet de loi touche des sujets extrêmement variés. Pour faciliter la compréhension, je limiterai mon intervention liminaire aux trois sujets « politiques ». Les autres points seront traités lors de l'examen des articles, car souvent un sujet correspond à un article. Les trois sujets « politiques » sont la révision de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), l'évolution des règles d'attribution des logements et l'extension ou non des compétences des organismes de foncier solidaire (OFS).
Sur tous ces points, j'ai travaillé en commun avec Valérie Létard, avec qui j'avais rédigé un rapport d'évaluation de la loi SRU. Nous avions également examiné conjointement la proposition de loi visant à réduire le coût du foncier et à augmenter l'offre de logements accessibles aux Français, dite proposition de loi Lagleize, au printemps 2020, où étaient traités les OFS. C'est la raison pour laquelle, sans pouvoir être corapporteur en raison du calendrier électoral, elle a présenté des amendements identiques aux miens.
Concernant l'examen de la réforme de la loi SRU qui est traitée aux articles 15 à 20 du projet de loi, nous avons suivi la ligne que nous vous avions exposée lors de la remise de notre rapport.
Nous considérons que le projet de loi comporte plusieurs avancées attendues et positives : la prolongation de la loi sans date butoir, la mise en place d'un rattrapage différencié et contractualisé grâce à un contrat de mixité sociale signé entre le maire et le préfet, et une réforme des exemptions. Cependant, cette réforme ne va pas assez loin dans la différenciation, la déconcentration et la décentralisation.
Comme vous le savez, nous avons souhaité au travers des amendements renforcer le couple maire-préfet et les possibilités de différenciation, sortir de la dimension infantilisante de la loi en supprimant les sanctions inutiles, et faire confiance aux communes en ne les appauvrissant pas par des sanctions financières, mais en fléchant ces sommes pour le logement social sur le territoire. Nous avons aussi voulu renforcer le pilier relatif à la mixité sociale en luttant contre les ghettos, par le biais d'un plafond de logements très sociaux, en incitant à la construction des logements les plus sociaux financés par des prêts locatifs aidés d'intégration (PLAI), et en protégeant les résidences les plus fragiles.
En ce qui concerne les évolutions relatives aux règles d'attribution des logements sociaux, le projet de loi est beaucoup moins riche que l'on aurait pu s'y attendre ou l'espérer. Outre le report des réformes techniques de la cotation des demandes et de la gestion en flux lancées par la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN), le principal point est la création d'un nouveau public prioritaire, les travailleurs clefs. L'article 22 du projet de loi les définit comme « exerçant une activité professionnelle qui ne peut être assurée en télétravail dans un secteur essentiel pour la continuité de la vie de la Nation ».
C'est une avancée importante à un double titre. Tout d'abord, il était nécessaire de tirer les conséquences de ce qui a été constaté pendant la crise sanitaire : on doit avoir le souci de loger plus près de leur travail les personnes essentielles au fonctionnement de la société. Ensuite, je suis convaincue que le lien entre le logement et l'emploi est l'une des clefs du soutien de la population et des élus au développement du logement social. Nous avons enrichi le texte à ce sujet. Il peut sans doute l'être encore avec des amendements parlementaires.
Enfin, le troisième point que je souhaite évoquer est la réforme des OFS.
L'article 28 permet certaines avancées comme la sécurisation de la vente de logement d'HLM sous forme de bail réel solidaire (BRS), mais, surtout, il vise une nouvelle fois, par ordonnance, à transformer cet outil social en un instrument généraliste d'aménagement pour un large spectre de revenus et d'activités professionnelles et commerciales. C'est le retour masqué de l'office foncier libre et du bail réel libre que nous avions quasi unanimement rejetés au printemps 2020. Nous n'avons pas changé d'avis. Les OFS et le BRS sont des outils prometteurs pour faciliter l'accession sociale à la propriété, avec le très grand avantage de conserver la maîtrise du foncier à la différence d'une vente « sèche ». Mais ce sont des organismes qui existent depuis peu de temps. Un petit nombre de logements a vu le jour sous cette forme. Il ne faut pas dénaturer leur vocation sociale en multipliant leurs missions.
Les amendements que nous vous proposerons vont dans ce sens. Ils sont issus de nos travaux sur la PPL Lagleize et traduisent le sentiment largement partagé de l'association des OFS, du mouvement d'HLM et d'un très grand nombre d'élus de terrain.
Nous nous inscrivons dans une démarche constructive avec le Gouvernement. Nous reconnaissons les avancées du texte et nous avons travaillé avec les cabinets de Mmes Gourault et Wargon sur plusieurs points. Mais il y a aussi, bien entendu, des différences importantes de points de vue et d'approches, qui se reflètent dans les amendements que je vais vous présenter.