Intervention de Brigitte Micouleau

Commission des affaires sociales — Réunion du 30 juin 2021 à 9h35
Audition du professeur didier pittet président de la mission indépendante nationale sur l'évaluation de la gestion de la crise covid-19 et sur l'anticipation des risques pandémiques

Photo de Brigitte MicouleauBrigitte Micouleau :

Monsieur le professeur, les conclusions de votre rapport ne sont pas tendres. Vous indiquez que notre pays aurait connu des faux pas en matière de pilotage. Vous soulignez toutefois - et nous en sommes très conscients ici - que la mobilisation du personnel hospitalier a permis de compenser toutes ces erreurs. Votre mission préconise trois axes de travail dans la préparation aux nouvelles crises. Quelles anticipations préconisez-vous concernant le variant delta ?

Pr Didier Pittet. - Tous les pays ont manqué d'anticipation. Tous avaient prévu des plans pandémie à la suite de la grippe et pourtant très peu d'entre eux les ont utilisés pour la covid ; je suppose que ceux qui les ont mis en place n'étaient plus là.

Pour répondre à la question concernant le variant delta, il faut savoir que tous les virus évoluent naturellement sous forme de variants. C'est un processus darwinien qui leur permet de survivre. Beaucoup de ces variants ne comportent aucun avantage sélectif et disparaissent. Comme tous les autres variants, celui dénommé delta est né de la pression de sélection que le virus subit. Dès que des séquençages ont pu être réalisés, on a compris que le SARS-CoV-2, qui est un coronavirus, mutait assez souvent. Par la suite, il a augmenté sa cadence de mutation parce qu'il a senti la pression de sélection de l'entourage qui se renforçait. Le variant alpha est par exemple apparu et a pris de la place au Royaume-Uni.

Le variant delta, comme le variant alpha, est plus contagieux que la forme première du virus. C'est tout à fait normal puisque pour qu'un variant prenne le dessus sur les autres, il faut qu'il soit plus contagieux. Le variant delta l'est aujourd'hui de 50 à 60 % en comparaison au variant alpha qui, lui-même, était plus contagieux de 40 à 50 % que les formes de virus qui courraient à l'époque. Actuellement, on estime qu'entre 10 % et 20 % des contaminations ont lieu par le variant delta en France. Il va progressivement prendre le dessus mais la bonne nouvelle demeure que le vaccin et l'immunité protège contre le variant delta.

Les variants qui sont le plus à craindre naissent dans les pays où les taux de vaccination sont les plus élevés parce qu'il s'agit d'une course entre les variants et les vaccins. Parce qu'il sent de plus en plus de résistance, le virus est logistiquement programmé pour s'adapter et ainsi survivre.

Je rappelle tout de même qu'aucun variant ne résiste à l'hygiène des mains, à la distance sociale et au masque. Bien que la vaccination permette de reprendre des activités, il faudra de toute manière garder les gestes barrières. La clef du succès réside dans le faible nombre de cas de contamination permettant ainsi de remonter les chaînes de transmission et d'y mettre fin. Le virus ne va jamais disparaître et nous allons devoir apprendre à vivre avec lui. Nous sommes tous infectés dans l'enfance par quatre grandes familles de coronavirus contre lesquelles nous développons presque tous des anticorps avant l'âge de vingt ans.

Pr Didier Pittet. - Ce sont des virus qui vivent avec nous, qui malheureusement nous font des petits rhumes ou des petits accès de pneumonie de temps en temps. Nous allons devoir vivre avec ce virus. Il faudra des années pour que 99 ou 100 % d'entre nous soient immunisés contre la covid-19 et après on n'en parlera plus. C'est pour cela que la vaccination nous aide à accélérer ces étapes de la vie avec le virus.

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