Intervention de Alain Marc

Réunion du 5 juillet 2021 à 16h00
Article 1er de la constitution et préservation de l'environnement — Adoption en deuxième lecture d'un projet de loi constitutionnelle modifié

Photo de Alain MarcAlain Marc :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la prise de conscience de l’urgence face au péril que constitue le dérèglement climatique doit être mondiale.

Ses effets sont visibles dans tous les recoins de notre planète. Le Canada enregistrait, la semaine dernière, une température de 49, 6 degrés Celsius, rendant l’air irrespirable, provoquant de nombreux décès et écrasant tout le vivant sous ce phénomène de « dôme de chaleur ».

Des effets météorologiques violents sont répertoriés à intervalles très réguliers ; la France les a subis en nombre cette année : ils ont des impacts sur tous nos concitoyens, dans leur vie, mais aussi dans leur travail. Je pense notamment à nos agriculteurs, qui vivent encore les conséquences du gel du début du printemps dernier.

Sur mon territoire, nous vivons, depuis une vingtaine d’années, une sécheresse toujours plus précoce et grave, ainsi que des saisons de moins en moins prévisibles. Plus personne ne nie aujourd’hui ces changements, que nous cherchons à enrayer.

Le projet de loi constitutionnelle, que nous retrouvons dans cet hémicycle en deuxième lecture, a encadré l’étude d’un autre projet, celui du projet de loi Climat et résilience. Les centaines d’articles qu’il contient concernent des domaines très variés, ayant pour objectif principal la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre dans un avenir très proche.

Le Sénat a travaillé à insérer ce texte dans une logique réaliste et pragmatique. Nous ne pouvons pas orienter notre pays avec la seule logique environnementale. Notre transition, pour être efficace, doit être ancrée dans le réel.

L’article unique dont nous faisons une nouvelle étude est arrivé de l’Assemblée nationale avec des termes encore différents de ceux que nous avions modifiés lors de notre première lecture. L’examen que nous en avons fait la semaine dernière en commission des lois soulève presque les mêmes problèmes qu’à l’origine. Je tiens, à cet égard, à saluer le travail de la commission, ainsi que nos échanges.

Le verbe « garantir » a refait son apparition, ce que nous avons encore une fois dénoncé. Nous lui préférons le verbe « agir », pourtant préservé en première lecture à l’Assemblée nationale. La vision du groupe Les Indépendants reste la même qu’en première lecture : nous ne pouvons faire entrer l’incertitude dans notre Constitution.

S’il y a une urgence, c’est surtout celle de faire les choses bien. Ce n’est pas la rédaction issue de l’Assemblée nationale qui nous semble issue de l’Assemblée nationale qui nous semble répondre à cela, ni aux besoins ni aux doutes quant à l’avenir.

Au lieu d’opposer nos libertés, nous devons les concilier. La protection de l’environnement impliquera inévitablement les volets sociaux et économiques de notre système. Une écologie humaniste et libérale fera de nos investissements et de nos innovations autant de moteurs primordiaux de la lutte contre le changement climatique.

Demain, nous circulerons dans des transports propres, ce qui représente l’un de nos plus grands défis. Nous aurons décarboné des pans entiers de nos industries les plus polluantes, comme celles de l’acier ou du ciment, très émettrices de CO2. Notre économie sera beaucoup plus circulaire. Nos bâtiments, tout au long de leur vie, nous permettront des économies d’énergie. Le numérique, qui prend une place grandissante dans nos habitudes, sera également moins énergivore. Notre mode de vie aura évolué et sera beaucoup plus respectueux.

Néanmoins, cela ne se fera que si l’on s’en donne la possibilité et si notre relance et notre croissance sont vertes. Cela ne se produira que si la protection de l’environnement est pensée dans son ensemble, avec tous les acteurs et citoyens, pas seulement français, mais du monde entier.

Pour cela, notre Constitution doit rester une alliée. Nous ne sommes pas contre le fait d’inscrire la préservation de notre environnement dans son article 1er. Nous souhaitons simplement le faire efficacement en en mesurant toutes les conséquences. Il faut écarter le flou autour de la définition future du verbe « garantir ».

Il faut également se préserver d’un potentiel glissement vers un gouvernement des juges. Je le répète, les arbitrages éminemment politiques ne peuvent être confiés aux juges. Ces arbitrages doivent rester le lieu de discussion des élus.

Les sénateurs, qui sont les représentants des collectivités locales et qui, pour beaucoup, ont été ou sont encore des élus locaux, savent les contraintes qui pèsent sur les maires ou sur les conseillers généraux lorsque l’on veut construire des routes, par exemple. Ces contraintes, nous les acceptons, nous faisons avec et sommes même heureux de les accepter.

La France doit donc « agir pour lutter contre le changement climatique et en faveur de la préservation de l’environnement et de la diversité biologique ». Elle doit le faire dans les conditions que la Charte de l’environnement nous propose.

Cette Charte, qui fait de la protection de l’environnement un objectif de valeur constitutionnelle, est un trésor de notre bloc de constitutionnalité sur lequel nous avons la chance de pouvoir nous appuyer. Ne l’oublions pas.

Tel est le sens de la rédaction que propose notre rapporteur, via un amendement dont nous allons discuter. Sous réserve de l’adoption de cet amendement, dont je ne doute pas, le groupe Les Indépendants votera à l’unanimité en faveur de ce texte, dans sa rédaction modifiée.

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