Nous souhaitons sous-amender l’excellent amendement que vient de présenter notre collègue Raoul.
La rémunération des dirigeants de La Poste, une fois décidé le passage du statut d’établissement public industriel et commercial à celui de société anonyme, est une question d’importance, surtout en ces temps où le salaire des chefs d’entreprise fait particulièrement débat dans l’opinion.
Dans la mesure où La Poste se rapproche de plus en plus, au fil de la discussion des articles, du fonctionnement habituel d’une société de capitaux ordinaire, il nous semble nécessaire de fixer de manière plus précise les règles qui régiront à l’avenir ces questions.
Il est à peu près évident, au point où nous en sommes, que la modification statutaire qui devrait affecter La Poste, si ce projet de loi était adopté, servira aussi de tremplin au déroulement de carrière de ses dirigeants. Dans son organisation interne, nous pensons même que La Poste va connaître, au fil de la mise en œuvre de cette loi, une évolution organique particulièrement importante.
Les missions de service public une fois réduites à l’état de principes sans grande application concrète, on assistera également à une autonomisation renforcée des différentes directions actuelles de La Poste.
La direction de l’immobilier deviendra en effet un marché de biens, optimisant autant que faire se peut la gestion du patrimoine, en devenant bailleur des locaux occupés par la direction du courrier, c’est-à-dire les centres « Cap qualité courrier », par exemple, et procédant, au plus haut possible sur la crête du marché immobilier, à la cession de locaux désaffectés.
La direction du courrier, après avoir été aux limites de la croissance externe et de la segmentation des activités, entrera lentement, mais sûrement, en déshérence, ne survivant que grâce au relèvement systématique du prix du timbre de base et à l’émergence d’une jungle tarifaire de plus en plus touffue sur les produits ouverts à la concurrence entre opérateurs.
La direction des colis continuera de travailler son implantation à l’étranger, notamment sur les marchés émergents et profitera de son expertise pour tailler autant de croupières que possible à des concurrents locaux affaiblis par sa force de frappe.
La direction des services financiers, et la Banque postale par la même occasion, visera une autonomie de plus en plus grande, passant des accords avec d’autres établissements de crédit, abandonnant le seul champ expérimental des filiales logistiques communes pour les participations croisées dans des fonds d’investissement, dans la gestion de fonds d’épargne, dans la distribution de crédits en direction d’une clientèle de plus en plus professionnelle. Viendra d’ailleurs peut-être le jour où la Banque postale fusionnera avec un autre établissement de crédit, quittant par là même le giron de la maison mère.
Politique fiction, me direz-vous ? Pas du tout, car ces processus sont inscrits dans le projet de loi, notamment la question sensible de la rémunération des dirigeants. Plus vite on avancera dans la voie de la banalisation de l’activité de La Poste, plus vite on aura ouvert le capital et favorisé l’augmentation continue du titre, plus vite les dirigeants seront en situation d’exiger une rémunération plus forte.