« L’image de la France à l’étranger représente un enjeu considérable. Des pistes doivent être étudiées pour l’améliorer ».
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, même si je partage pleinement cette analyse très juste, je n’en suis pas l’auteur. Il s’agit en effet du constat que dresse le Conseil économique, social et environnemental, dans une étude présentée le 15 avril par sa section du cadre de vie, sur l’importance de l’image de la France dans le monde.
Cruelle ironie d’une actualité brûlante : la réforme du Conseil économique, social et environnemental, dont nous sommes amenés à débattre aujourd’hui, prévoit la suppression pure et simple des représentants des Français de l’étranger en son sein !
Dans son étude, le Conseil économique, social et environnemental suggère des pistes intéressantes pour pallier les carences de l’image de la France à l’étranger.
La première d’entre elles est de mettre en évidence l’intérêt de cette image en tant qu’outil au service d’objectifs non seulement culturels, patrimoniaux et d’art de vivre, mais également politiques, économiques et scientifiques.
Pour le Conseil économique, social et environnemental, l’action doit porter sur l’image du pays en lui-même, l’image des entreprises françaises, l’image des produits français à l’étranger et le degré d’attractivité.
Mais alors, qui mieux que les Français de l’étranger eux-mêmes peuvent être les acteurs de cette volonté politique ?
L’exposé des motifs du projet de loi organique initial, présenté par le Gouvernement, indiquait : « Il s’agit de faire du Conseil une institution qui soit plus en phase avec les réalités sociologiques du pays comme avec les débats qui le traversent, qui se montre plus réactive et qui sera mieux écoutée parce que davantage représentative. »
Dans ce contexte, l’argument selon lequel la suppression de la représentation des Français de l’étranger au sein du Conseil économique, social et environnemental se justifierait par le fait que les Français établis hors de France ont leur propre assemblée, que douze sénateurs les représentent, et qu’ils disposeront, à compter de 2012, de onze députés, témoigne d’une méconnaissance coupable du rôle de l’Assemblée des Français de l’étranger, des sénateurs et du futur rôle des députés.
Pour conserver cette « logique », le Gouvernement aurait été bien inspiré de prévoir la suppression des députés de métropole et d’outre-mer…
La présence française dans le monde est devenue une problématique centrale à l’heure de la mondialisation.
Le Conseil économique, social et environnemental assure la participation et la collaboration des différents acteurs de la vie économique, sociale et environnementale du pays à la politique du Gouvernement. C’est à ce titre que les Français établis hors de France y sont représentés depuis 1984.
Les Français d’outre-mer sont estimés à 2 400 000 et représentés au Conseil par onze membres. La population française résidant à l’étranger est, quant à elle, estimée à plus de 2 300 000 personnes. Il y a aujourd’hui presque trois fois plus de Français établis hors de France qu’en 1984, date à laquelle une représentation leur a été accordée au Conseil économique et social.
La représentation de nos compatriotes de l’étranger a, au cours des décennies, trouvé sa traduction à travers les douze sénateurs représentant les Français établis hors de France, les 155 conseillers de l’Assemblée des Français de l’étranger et la présence de deux représentants des expatriés au sein du Conseil économique et social.
La réforme constitutionnelle de 2008 a permis de compléter ce dispositif en instaurant, à compter de 2012, onze députés représentant les Français établis hors de France.
La communauté des Français de l’étranger est donc parvenue à constituer une collectivité représentée dans les plus importantes institutions de la République, et ce au même titre que les Français de métropole et d’outre-mer.
Au regard de cette avancée, je ne peux admettre – comme la très grande majorité des élus des Français de l’étranger – que la réforme du Conseil économique, social et environnemental se fasse par la suppression des deux représentants des Français de l’étranger.
Les Français établis hors de France sont en nombre croissant depuis 1958. Cette augmentation de la présence de nos communautés à l’étranger constitue un atout indiscutable pour notre pays et pour son influence dans le monde.
La suppression des représentants des expatriés au sein du Conseil économique, social et environnemental serait considérée comme un recul démocratique considérable.
Nos compatriotes résidant hors de France ne doivent pas être sacrifiés sur l’autel « de la jeunesse, du dialogue social et de l’environnement », d’une part, tout simplement parce que les expatriés sont plus jeunes que la moyenne nationale et, d’autre part, parce que se trouvent parmi eux des acteurs majeurs du dialogue social et de la lutte pour la protection de l’environnement.
J’en viens maintenant au cœur de la problématique soulevée par l’article 6 du projet de loi organique.
Le texte proposé pour l’article 7 de l’ordonnance du 29 décembre 1958 prévoit la nomination de personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine économique, dans le domaine social, culturel, sportif ou scientifique, dans le domaine environnemental et du développement durable ou en raison de leur action en faveur des personnes handicapées.
En premier lieu, l’avenir économique de notre pays se joue aujourd’hui sur la scène internationale, que les Français de l’étranger connaissent mieux que d’autres en contribuant largement au rayonnement international et européen de la France à l’étranger.
Supprimer purement et simplement, à l’heure de la mondialisation, la place des Français expatriés dans l’assemblée représentant les forces vives de la nation, plus qu’une erreur, ce serait une faute : cela reviendrait à nier que le commerce extérieur fait vivre aujourd’hui un Français sur quatre.
Dans la mesure où le texte prévoit que, parmi les dix personnalités qualifiées siégeant au titre du pôle de la vie économique et du dialogue social, doivent figurer trois personnalités issues des entreprises publiques, il nous a paru opportun d’inscrire dans la loi organique cette représentation spécifique des Français de l’étranger en indiquant expressément que parmi ces personnalités qualifiées ne figurent que deux personnalités issues des entreprises publiques mais également une personnalité représentant les activités économiques françaises à l’étranger.
Deuxièmement, les questions sociales, aujourd’hui, se situent de plus en plus souvent au niveau international : plus que quiconque, les Français de l’étranger sont en première ligne pour la défense et le développement de notre modèle social.
Dans une mondialisation déshumanisée, où la question des relations sociales internationales devient de plus en plus sensible, ce serait une faute que de priver le Conseil économique, social et environnemental de l’apport des Français de l’étranger, qui vivent au contact des réalités sociales d’un monde qui change. De plus, deux grandes associations reconnues d’utilité publique, l’Union des Français de l’étranger, créée en 1927, et l’Association démocratique des Français de l’étranger, créée en 1981, concourent à maintenir le lien social entre la France et ses expatriés.
C’est l’une des raisons pour lesquelles il nous a paru opportun d’inscrire dans la loi organique cette représentation spécifique en indiquant expressément que, parmi les quinze personnalités qualifiées siégeant au titre du pôle de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative, figure une personnalité résidant hors de France.
Troisièmement, la défense de l’environnement est devenue aujourd’hui un aspect majeur de la mondialisation. En la matière, l’expertise et l’action des Français de l’étranger – qui vivent quotidiennement avec les citoyens d’autres pays – ne font aucun doute. Nos concitoyens expatriés sont les mieux placés pour expliquer et faire partager les expériences positives de sauvegarde de l’environnement conduites à travers le monde par des organismes qui, quelquefois, ont été créés par des Français de l’étranger.
Les questions environnementales deviennent de plus en plus sensibles. Se priver de l’apport des Français qui vivent au contact des réalités du monde qui nous entoure serait une faute pour notre pays.
Dans la mesure où le texte prévoit que, parmi les quinze personnalités qualifiées siégeant au titre du pôle de la protection de la nature et de l’environnement, doivent figurer au moins trois dirigeants des entreprises exerçant une action significative dans ces matières, il nous a paru opportun d’inscrire dans la loi organique cette représentation spécifique des Français de l’étranger en indiquant expressément que parmi ces personnalités qualifiées figure également une personnalité résidant hors de France. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans la discussion des articles.
Monsieur le ministre, je vous demande de donner un avis favorable sur ces trois amendements, qui proposent que soit expressément prévue une personnalité qualifiée résidant à l’étranger au titre de chacun de ces pôles.
Je reste persuadé, monsieur le ministre, que vous comprendrez cette position de bon sens et que vous vous rallierez à mes arguments, afin que les Français de l’étranger ne soient pas exclus du futur Conseil économique, social et environnemental.