Intervention de Guillaume Gontard

Réunion du 20 juillet 2021 à 15h00
Développement solidaire et lutte contre les inégalités mondiales — Adoption définitive des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire sur un projet de loi

Photo de Guillaume GontardGuillaume Gontard :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le mois dernier, nous nous réjouissions des avancées obtenues sur cette programmation qui nous tient particulièrement à cœur.

C’était l’occasion pour nous d’exprimer toutes nos attentes autour de ce pilier, encore si fragile, de la politique étrangère française. Car cette aide n’est pas facultative, elle n’est pas un geste de charité : c’est une responsabilité.

Il s’agit d’une responsabilité qui nous incombe, dès lors que nous faisons partie des vingt pays qui cumulent 90 % de la richesse mondiale.

Quel est le résultat aujourd’hui de ce modèle de développement économique que nous avons imposé à de nombreux pays de l’hémisphère sud il y a plusieurs décennies ?

Nous n’avons pas, loin de là, réussi à éradiquer la faim dans le monde : aujourd’hui, ce sont encore 690 millions d’êtres humains, soit 10 % de l’humanité, qui souffrent de la faim. Ce chiffre est en augmentation à cause de la crise climatique, tout comme celui de l’extrême pauvreté.

Ces données, vous les connaissez, ce sont celles qui ont motivé l’effort budgétaire important inscrit dans la présente programmation qui doit nous amener à consacrer 0, 7 % du RNB à l’aide publique au développement en 2025 – un engagement pris par la France avant même ma naissance…

Réjouissons-nous, après une décennie de baisse de l’APD, qu’elle augmente de nouveau et qu’elle prenne mieux en compte les recommandations de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et des ONG en matière de canaux de répartition et d’objectifs.

Ainsi, l’augmentation de l’aide bilatérale et des dons est désormais chiffrée. Le rôle des organisations de la société civile est formellement reconnu – cela a été rappelé – et les financements qui transitent par elles sont voués à augmenter.

L’égalité des genres est enfin consacrée comme une priorité transversale, une place accrue est accordée à la jeunesse et les peuples autochtones sont pris en compte.

Le groupe écologiste, qui défendait tous ces points et bien d’autres, tient à saluer les améliorations apportées par le Sénat. Nous voterons donc majoritairement en faveur de ce projet de loi, bien que les conclusions de la commission mixte paritaire se soient traduites par des reculs regrettables.

Ces reculs portent d’abord sur des demandes des ONG : je pense à la disparition du principe de non-discrimination et à la suppression de la référence au Fonds de soutien aux organisations féministes. En outre, l’objectif de financement des ONG reste bien trop fragile.

Ensuite, je note que la programmation budgétaire est atrophiée. L’objectif de 0, 7 % reste mollement inscrit, mais cette programmation n’est fixée en valeur absolue que jusqu’à l’année prochaine, et non plus, comme nous l’avions proposé, jusqu’en 2025. Peut-on encore parler dans ces conditions de loi de programmation ? Ce manque de visibilité est particulièrement dommageable pour nos partenaires, en particulier les ONG.

Enfin, la trajectoire budgétaire en hausse, en quelque sorte esquissée au crayon à papier, ne peut endiguer la montée des inégalités mondiales que si elle s’accompagne d’une lutte contre les causes de ces inégalités, aux premiers rangs desquelles un modèle économique qui n’est favorable ni aux populations ni à l’environnement.

Sans cette dimension, l’APD demeure, je l’ai déjà dit, le pansement sur la jambe de bois du système capitaliste. La vision que nous portons en tant qu’écologistes est celle d’une APD libérée des logiques de rentabilité et des impératifs de la diplomatie économique française.

Nous regrettons profondément de n’avoir pu infléchir le texte en ce sens. Ainsi, nous avions souhaité y inscrire un principe de cohérence des politiques publiques avec les objectifs de développement durable. Ce principe, qui aurait pu, par exemple, nous permettre de ne pas financer des projets d’agro-industrie, a été supprimé.

Nous avions également comme objectif l’exigence d’une transparence et d’une responsabilité accrues pour tous les organismes qui contribuent à notre influence à l’étranger.

Enfin, le dépassement des logiques de rentabilité aurait dû nous permettre de consacrer davantage aux pays les plus pauvres, ce qui devrait être le premier but de notre APD.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires continuera de porter ces objectifs qui sont les seuls à même de faire de l’aide au développement un véritable pilier de notre politique extérieure.

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