Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 20 juillet 2021 à 15h00
Respect des principes de la république — Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons aurait pu être un texte de notre commission, dans la continuité des travaux et débats approfondis ayant animé notre Haute Assemblée lors de l’examen de ce projet de loi en première lecture.

Il aurait pu être un texte de notre commission, aussi, en cohérence avec le diagnostic majoritairement partagé sur nos travées de la nécessité de se doter des outils juridiques pour répondre à la dynamique de fragmentation exercée par les lois particulières sur la norme commune.

La commission des lois a toutefois fait un choix différent, en adoptant une motion de ses rapporteures, ce qui nous conduit, aujourd’hui, à examiner le texte adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Certes, nous ne le déplorons pas sur le fond, car cette version nous semble intégrer des dispositions utiles et équilibrées pour concourir à l’objectif de conforter les principes de notre République.

Je pense aux articles relatifs au service public, avec notamment le nouveau délit de séparatisme, au contrat d’engagement républicain qui donnera une assise légale aux décisions des élus locaux, au renforcement de la lutte contre la haine en ligne en cohérence avec la dynamique européenne. Je pense aussi à certaines mesures techniques particulièrement bienvenues visant la transparence des financements étrangers et l’incitation des associations à rejoindre le régime de la loi de 1905 pour leurs activités cultuelles, afin de permettre un meilleur contrôle de l’utilisation des subventions publiques.

Sur tous ces points, on a d’ailleurs pu constater, dès la première lecture, une convergence entre les deux assemblées. Les modifications apportées par le Sénat sur ces sujets, si elles n’ont pas toutes été conservées lors de l’examen à l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, n’étaient pas de nature à fonder, à elles seules, un désaccord entre les deux chambres.

Ce constat ne peut que nous faire regretter le dépôt par les rapporteures d’une motion tendant à opposer la question préalable, qui sera mise aux voix dans quelques instants.

Il nous ramène en fait à l’un des principaux points de désaccord ayant conduit à l’échec de la commission mixte paritaire : l’extension, par la majorité du Sénat, du champ d’application de l’obligation de neutralité et de l’interdiction du port des signes religieux dans l’espace public.

Le choix de poursuivre le travail en nouvelle lecture aurait certes exposé la majorité sénatoriale au risque d’un nouveau rejet en commission, comme en première lecture, de ces dispositions relatives à l’interdiction des signes ostensibles. Mais, dans le même temps, ce parti pris audacieux aurait permis d’approfondir un débat sur des mesures dont la majorité reconnaît l’utilité.

Nous regrettons donc vivement le rejet du texte qui donne, au détriment d’un examen approfondi de dispositions sur lesquelles nous sommes en mesure de nous accorder, la priorité à des mesures faisant à notre sens dévier le projet de loi de son objet et le fragilisant juridiquement.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe RDPI soutient le texte, tel qui nous arrive de l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Ses mesures sur la neutralité du service public, l’école républicaine, la lutte contre la haine en ligne, la protection de la dignité de la personne humaine ou encore le contrôle des financements s’inscrivent dans la continuité de l’esprit libéral de la loi de séparation, dans le respect de sa conception du principe de laïcité – une acception qui implique la neutralité de l’État et la liberté de conscience, non le silence des opinions religieuses de chacun ou l’éviction du religieux de l’espace public.

Par cohérence, le groupe RDPI votera donc contre la motion tendant à opposer la question préalable.

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