Intervention de Patrick Ollier

Réunion du 17 février 2011 à 9h00
Présomption d'intérêt à agir des parlementaires en matière de recours pour excès de pouvoir — Rejet d'une proposition de loi

Patrick Ollier, ministre :

…. je suis trop attaché à l’exercice de ses prérogatives pour accepter qu’il se « dépouille », comme l’a dit M. Anziani, ou se départisse de celles qui lui reviennent.

Nous parlons ici de l’équilibre des pouvoirs choisi par le constituant en 2008, voilà un peu plus de deux ans. L’article 24 de la Constitution a été modifié dans le sens d’un renforcement du rôle du Parlement, notamment pour le contrôle de l’exécution des lois.

Le Gouvernement est prêt à aider au maximum ceux qui souhaiteront s’investir dans cette mission, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat.

La séparation des pouvoirs, monsieur Sueur, est affirmée depuis bien plus longtemps que vous n’êtes sénateur et que je n’ai été député.

Si un parlementaire agit en son seul nom, pourquoi son action serait-elle forcément recevable, alors qu’il ne peut faire état d’aucun intérêt personnel ? Cela pose aussi un problème de fond : les rapporteurs des lois sont-ils dans la même situation que tous les autres parlementaires ? La réponse est non, et j’en reviens à la démonstration que j’ai faite tout à l’heure.

Enfin, monsieur Sueur, vous évoquez la volonté de coercition à l’égard du Gouvernement. Tel est bien le fond du problème. Un instrument de coercition entrant dans le cadre des relations entre les pouvoirs ne peut trouver sa place que dans la Constitution. Dès lors, proposez-nous une réforme constitutionnelle, ce serait légitime !

Monsieur le rapporteur, vous en conviendrez avec moi, ce n’est pas une simple loi qui peut modifier ce qui est de nature constitutionnelle et concerne notamment la séparation des pouvoirs.

Du travail reste à faire. Si vous le voulez, nous pouvons œuvrer ensemble, mais je suis obligé de vous dire que cette proposition de loi ne répond pas aux principes qui vous incitent tous à agir.

Madame Borvo Cohen-Seat, vous regrettez une dégradation de la qualité de la loi. L’initiative de la loi appartient au Gouvernement, mais c’est le Parlement qui vote la loi. Il revient donc à ce dernier d’en améliorer la qualité. Quand vous passez des heures et des heures dans cette enceinte, comme je l’ai fait à l’Assemblée nationale, c’est bien pour faire votre travail de parlementaire. Les amendements sont destinés à améliorer la qualité de la loi. Cela relève du fonctionnement normal du Parlement. Par conséquent, si la qualité du travail est dégradée, ce n’est pas le Gouvernement qui peut vous répondre, madame Borvo Cohen-Seat.

Vous avez dit tout à l’heure que les parlementaires trépignaient dans l’hémicycle. §La formule est amusante, et je veux bien rire avec vous ; mais permettez-moi d’en revenir à l’exemple que j’ai cité concernant la loi de modernisation de l’économie en 2008 : en deux heures, les modifications ont été introduites. Il s’agit donc non pas de trépigner, mais de travailler ; il s’agit non pas de lancer des invectives, mais d’organiser des actions de conviction, qui sont aussi des moyens de contrainte à l’égard du Gouvernement. On peut effectivement l’obliger à avancer et à prendre des décrets d’application. À cet égard, je prendrai des initiatives et j’espère, madame la sénatrice, que vous les soutiendrez.

Monsieur Zocchetto, je vous remercie de vos propos que j’ai appréciés car, malgré nos quelques divergences, nous sommes sur la même ligne.

Vous avez souhaité, comme M. Béteille, que nous continuions à travailler ensemble pour que le Gouvernement s’engage dans la voie d’un meilleur contrôle de l’application des lois. Je réponds par l’affirmative et, je l’ai dit, je prendrai des initiatives en ce sens. Je souhaite que vous soyez des gardiens vigilants de la manière dont le Gouvernement envisage les choses dans ce domaine. J’ai évoqué tout à l’heure les débats que nous organiserions dans cette enceinte. Ils seront la conclusion de tout ce que je souhaite que nous puissions faire d’ici là.

Vous avez insisté sur le fait qu’un recours des parlementaires devant le Conseil d’État risquait de troubler l’opinion et d’entretenir une certaine confusion. Je suis sensible à cet argument.

Le Gouvernement ne dit pas que la question posée par la proposition de loi n’a pas de réponse. Il considère que ce texte n’est pas la bonne réponse. Nous pourrons en rediscuter.

Monsieur Béteille, je partage votre analyse et vos arguments. Je le redis à vous et à celles et ceux qui veulent poursuivre la réflexion avec nous, le Gouvernement est à votre disposition pour mettre en commun des moyens, des actions, et améliorer encore l’application des lois par le pouvoir exécutif. J’y suis tout à fait favorable et je vous remercie de vos propositions.

Monsieur Anziani, d’un côté, vous vous demandez à quels droits vous renonceriez en votant cette proposition de loi et, de l’autre, vous ne comprenez pas que le Sénat veuille se dépouiller de ses prérogatives. Cela me paraît quelque peu contradictoire.

Par ailleurs, si des obstacles doivent être levés, c’est dans le cadre du contrôle exercé non par un parlementaire isolé, comme vous l’avez évoqué, mais par les commissions et leurs présidents. Un dialogue constructif doit avoir lieu en permanence entre le Parlement – la majorité et l’opposition – et le Gouvernement.

Je n’ai pas dit que le Parlement était au-dessus de l’autorité judiciaire. C’est une mauvaise interprétation de mes propos. J’ai affirmé que vous étiez souverains et que l’on ne peut pas vous retirer cette qualité. De ce fait, vous pouvez exercer la plénitude de tous vos pouvoirs, y compris celui qui consiste à contrôler l’application des lois.

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