Intervention de Philippe Bas

Réunion du 11 janvier 2022 à 14h30
Gestion de la crise sanitaire — Question préalable

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

C’est presque un débat philosophique que vient de lancer notre très estimé collègue Loïc Hervé : devrait-il être interdit par principe à la République, tellement attachée qu’elle est à l’État de droit fondé sur la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, de restreindre ou de limiter temporairement des libertés pour faire face à une crise majeure ?

Cette question a été posée à de nombreuses reprises au cours de notre histoire, dans des contextes qui dépassent largement la crise épidémique actuelle. Elle l’a été lors de ce que l’on appelait à l’époque les événements d’Algérie ; elle l’a été, plus récemment, lors des émeutes qui ont éclaté dans les banlieues en 2005 ; elle l’a encore été lors de la récente vague terroriste ; elle l’est enfin dans le cadre de la lutte contre l’épidémie actuelle.

Voyez-vous, mon cher collègue, dans notre pays, patrie des droits de l’homme, toutes les libertés sont sacrées, mais aucune liberté n’est un absolu. Le fondement de la liberté dans notre pays, l’article IV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, le dit bien : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. » On n’est jamais allé plus loin dans la définition de la liberté que dans ce texte, qui a valeur constitutionnelle en France. À le lire, on voit clairement que la liberté se rapporte toujours à des limites qu’il appartient au législateur de poser.

C’est bien ce que le Sénat fait depuis le début de la crise sanitaire, comme il l’avait fait les années précédentes dans le cadre de la lutte contre le terrorisme : rechercher le meilleur équilibre possible pour que les restrictions apportées aux libertés soient strictement nécessaires à la poursuite d’une fin supérieure, en l’occurrence aujourd’hui l’éradication de l’épidémie de covid-19.

C’est pourquoi, mon cher collègue, quoique je vous aie écouté, comme toujours, avec beaucoup d’intérêt et d’attention, je ne peux pas partager le point de vue philosophique que vous avez exposé en défense de cette motion.

Je dois vous dire que je préfère de beaucoup que notre assemblée, plutôt que de refuser le débat, s’y engage pour jouer son rôle, qui consistera précisément à déplacer le point d’équilibre trouvé à l’Assemblée nationale pour que les restrictions à nos libertés soient limitées, pour qu’aucune de ces restrictions ne soit conservée dans le texte si elle n’est pas strictement nécessaire à l’atteinte de l’objectif de santé publique que le Gouvernement, à juste titre, nous demande de poursuivre avec lui en examinant ce texte.

C’est pourquoi la commission…

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