Je veux à cette occasion présenter un dernier argument contre ces contrôles d’identité. Savez-vous, mes chers collègues, combien il faut de temps pour former un officier de police judiciaire ? Il faut dix-huit mois ! En effet, la police est la seule institution à laquelle nous confions l’exercice de la violence légitime de l’État. Nous n’acceptons cette violence que dans le cadre d’un contrat social : les policiers sont les seuls qui peuvent nous contraindre, nous arrêter, nous demander nos papiers.
D’ailleurs, un débat se pose : nous estimons que cette formation devrait être approfondie, parce que dix-huit mois sont encore insuffisants. Nous jugeons aussi que les officiers de police judiciaire manquent dans nos commissariats, qu’il en faudrait davantage. Mais si ces dispositions devaient être adoptées, nous permettrions à chacune et chacun, en l’espace d’une nuit, de devenir officier de police judiciaire et de contrôler tout le monde ! Quel manque de discernement !
Évidemment, certains le feront bien, mais c’est donner, sans formation aucune, une fraction de pouvoir à des centaines de milliers de personnes. Cela donnera lieu à des abus, mais cela causera aussi des difficultés à ces personnes elles-mêmes, car elles ne seront pas formées pour effectuer ces contrôles en toute sécurité. Si la personne refuse de se soumettre au contrôle effectué du fait d’un doute légitime, que se passera-t-il ? Fera-t-on peser cette responsabilité sur les restaurateurs, sur les agents de sécurité des événements sportifs et culturels ?
Faisons bien attention, car – je le redis – si nous mettons le doigt dans cet engrenage, nous aurons la plus grande difficulté à en sortir ! On aura bien du mal, à la fin de la gestion de la crise sanitaire, à retirer ce droit à ceux auxquels nous l’aurons confié un soir de janvier !