Le rapporteur Philippe Bas a parfaitement expliqué les choses.
Je le redis brièvement : il y a deux types d’immunité. Notre système immunitaire a au moins deux modes d’action – davantage, en réalité, mais deux pour ce qui est du vaccin.
L’immunité humorale, premièrement, c’est-à-dire les anticorps en circulation qui sont capables d’aller « bastonner » le virus, d’y reconnaître une cible et de l’empêcher d’entrer dans les cellules, est reflétée notamment par le taux d’anticorps dans le sang, dont vous parlez, madame la sénatrice. Quant à l’immunité dite cellulaire, c’est la mémoire conservée par vos cellules, qui sont capables, lorsque vous êtes exposé au virus et lorsqu’il « entre », de fabriquer des armes pour le bastonner et l’empêcher de se multiplier, donc de provoquer une infection – d’où la prévention des formes graves.
Si, à la suite d’une prise de sang, on constate que vous avez des anticorps, c’est que, vraisemblablement, ou vous avez été exposé au virus ou vous avez été vacciné, ou les deux. Il peut d’ailleurs arriver que le test ne détecte pas d’anticorps bien que vous ayez été immunisé. Or on ne va pas proposer des vaccins ad vitam aeternam, cinq, six, huit doses, au motif que le taux d’anticorps ne grimpe pas… à l’exception notable, j’y reviendrai rapidement, des immunodéprimés.
L’immunité cellulaire, elle, on ne peut en juger par une prise de sang. Ce n’est pas un taux d’anticorps : la capacité de vos cellules à réagir en cas d’agression, on ne peut pas l’estimer. Or, comme je vous l’ai dit, c’est bien l’immunité cellulaire qui entre en jeu, en cas d’infection, pour éviter qu’elle ne s’aggrave.
Madame la sénatrice, vous pouvez donc avoir un taux d’anticorps élevé parce que vous avez été exposée au virus ; mais, à supposer que vous soyez réinfectée par le virus, ce taux ne dit rien de la capacité de votre organisme à se défendre et donc à éviter une forme grave, une hospitalisation, une réanimation, ou pire encore.
C’est ce que nous disent les scientifiques : il existe, comme le dit le rapporteur Bas, un consensus à ce sujet. Peut-être le temps viendra-t-il où nous disposerons d’études qui permettront de déterminer un lien entre le taux d’anticorps et le niveau de protection. Aujourd’hui, de telles études, si elles existent, ne sont validées ni par la communauté scientifique nationale ni par la communauté scientifique internationale.
Croyez bien qu’il serait beaucoup plus agréable pour tout le monde que nous puissions nous contenter d’une sérologie et éviter ainsi des passages en centre de vaccination, avec toute la logistique afférente. Je précise que les « risques » du vaccin ne sont pas en cause, madame la sénatrice : il n’y a pas de risque à vous faire vacciner. Reste que si nous pouvions l’éviter les choses gagneraient en simplicité.
Mais, actuellement, nous n’avons aucune certitude ni même aucune indication scientifique en ce sens.
La seule restriction à ce que je viens de dire concerne les grands immunodéprimés : vous pouvez les vacciner autant que vous voulez, leur système immunitaire, hélas, n’en garde pas la mémoire. Leurs cellules ayant du mal à apprendre, on peut leur faire faire des tests spécifiques de détection d’anticorps. Si le résultat se situe en dessous d’un certain niveau, il est nécessaire de leur administrer un traitement complexe, qui peut se faire par perfusion, afin d’éviter qu’ils ne contractent des formes graves de la maladie. De tels cas existent : nous traitons des milliers de malades de ce type dans les services spécialisés des hôpitaux.
Avis défavorable.