Intervention de Annie Jarraud-Vergnolle

Réunion du 27 novembre 2008 à 9h45
Revenus du travail — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Annie Jarraud-VergnolleAnnie Jarraud-Vergnolle :

… l’irréalisme de ce projet de loi en faveur des revenus du travail renforce notre inquiétude.

Monsieur le secrétaire d'État, avec ce texte, vous réitérez, en vain, votre remue-ménage habituel, comme vous le fîtes, sans succès, avec la loi TEPA en 2007, dont les dispositions sur la majoration des heures supplémentaires et les exonérations fiscales n’ont convaincu personne. Leur extrême complexité, doublée d’allégements généraux, a provoqué la réticence des employeurs, puis de nombreux effets d’aubaine – quelle ironie, et quel aveu d’échec ! –, avec les conséquences que l’on connaît, le tout pour plusieurs milliards d’euros à la charge de l’État.

Au début de l’année, le Gouvernement revenait avec le projet de loi pour le pouvoir d’achat, visant, notamment, à permettre le rachat des RTT.

Je vous épargnerai les commentaires qu’inspire un tel désaveu – seule une entreprise sur cinq propose le rachat des jours de RTT, et peu de salariés le demandent –, pour ne retenir qu’un volet du texte, à savoir le déblocage de la participation jusqu’à 10 000 euros pour les demandes formulées avant le 30 juin dernier, qui annonce le projet de loi dont nous sommes aujourd'hui saisis.

Avec votre promesse, vous vouliez nous faire croire que cela favoriserait la consommation. Pas de chance, le miracle ne s’est pas produit ! Les sommes débloquées ont été principalement placées en assurance vie.

De plus, le déblocage de la participation est totalement contradictoire et, partant, fortement critiquable. En effet, il est difficile de prôner une épargne de longue durée en vue d’une retraite par capitalisation, par ailleurs facteur de stabilité pour le financement des entreprises, et, dans le même temps, de multiplier les mesures de déblocage pour inciter les salariés à soutenir la consommation en dépensant immédiatement ladite épargne !

Enfin, en enfonçant le clou avec le RSA, vous prétendez, une fois de plus, vous occuper du pouvoir d’achat des Français, en l’occurrence des plus démunis, mais sans vraiment convaincre. D’ailleurs, convaincu, l’êtes-vous vous-même ? Sans doute pas assez puisque, au même moment, vous envisagez de créer un comité d’observation du SMIC – ce bon vieux SMIC ! –, afin d’apprécier la nécessité ou non de revaloriser le revenu établi par un dispositif pérenne, qui n’a pas à prouver son utilité et son importance.

C’est à n’y rien comprendre !

Le bon sens eût voulu que l’on cessât ces gesticulations.

Entre-temps, la crise que l’on connaît est survenue. Loin de vous persuader de l’urgence qu’il y avait à revoir vos copies, toutes vos copies, elle a au contraire fait germer dans votre esprit une nouvelle idée : réinventer le capitalisme. Et vous voilà avec le projet de loi en faveur des revenus du travail !

Avant d’entrer dans le détail des dispositions qui suscitent la réticence de mes collègues du groupe socialiste et la mienne, je souhaite attirer votre attention sur la dimension symbolique d’une telle coïncidence.

Monsieur le secrétaire d'État, pour entrer dans le vif du sujet, je me suis simplement interrogée sur le sens de la formule « en faveur des revenus du travail ». Figurez-vous qu’en ouvrant simplement un dictionnaire mon pressentiment s’est confirmé. Il y a au mieux une confusion, au pire de l’imposture, dans le titre même de ce projet de loi.

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