Intervention de Céline Brulin

Réunion du 27 janvier 2022 à 10h30
Combat contre le harcèlement scolaire — Discussion générale

Photo de Céline BrulinCéline Brulin :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on estime qu’entre 6 % et 12 % des élèves, soit environ 1 million d’enfants et de jeunes adultes, sont victimes de harcèlement au cours de leur scolarité. L’actualité illustre régulièrement les dramatiques conséquences du harcèlement, qui peuvent aller jusqu’au suicide, comme pour la jeune Dinah en octobre dernier.

Ces chiffres alarmants appellent une mobilisation générale dans l’école, mais aussi dans l’ensemble de la société.

Le phénomène n’est pas nouveau, mais il a pris ces dernières années une intensité nouvelle avec le développement des réseaux sociaux et des applications d’échange. De fait, le harcèlement ne s’arrête plus jamais et s’engouffre partout, jusque très tard, dans la chambre de ces enfants. Il y a donc un nouveau défi à relever pour protéger ces jeunes. Ainsi, le Sénat ne se trompe pas en ajoutant la mention de « cyberharcèlement » dans le titre de cette proposition de loi.

Notre amendement visant à insérer un article additionnel après l’article 7 s’inscrit dans cette logique : nous proposons de renforcer les obligations des services de communication électronique, et notamment de messageries instantanées, afin de faciliter le blocage de numéros.

Dans sa version initiale, cette proposition de loi avait surtout un caractère symbolique, car elle apportait peu aux instruments juridiques existants.

À l’inverse, la création d’un délit spécifique de harcèlement scolaire initialement prévue à l’article 4 était à la fois trop déséquilibrée et peu applicable. Elle pouvait même se révéler contre-productive, compte tenu de la nécessité d’une prise de conscience collective sur le sujet.

Je tiens à saluer le travail de mise en cohérence autour de la réponse pénale qu’ont réalisé Mme la rapporteure de la commission des lois, saisie pour avis, et M. le rapporteur de la commission de la culture.

La définition du harcèlement scolaire dans le texte adopté par l’Assemblée nationale mettait sur le même plan des adultes et des enfants. Ce point a été récrit, et le délit pénal a été supprimé, car il était à la fois inapplicable – la notion de discernement déterminant l’adaptation de la réponse pénale à l’auteur des faits – et disproportionné dans son quantum de peine.

Sans déresponsabiliser les établissements et les personnels dans la détection, le traitement et le suivi du harcèlement, nous devons prendre en compte les limites de leurs moyens et de leurs missions.

La proposition de loi vient d’ailleurs renforcer la formation de l’ensemble des personnels de l’éducation nationale et des différents acteurs mobilisés face à ce fléau. Les enseignants sont déjà sensibilisés dans les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé), mais il est nécessaire d’aller plus loin et de renforcer cette formation. Nous défendrons à ce sujet un amendement à l’article 3 tendant à permettre à l’ensemble de la communauté éducative d’y accéder.

Une des difficultés en matière de harcèlement scolaire tient à l’interprétation des signes et au repérage de l’isolement progressif des victimes, qui doivent leur permettre de se confier.

Mais pour cela, comme vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur, il faut davantage de moyens pour la médecine scolaire. Les médecins scolaires suivent en moyenne 12 500 jeunes, et les infirmières sont débordées, particulièrement dans le contexte de la crise sanitaire.

Les assistants d’éducation, tout comme les directeurs d’école, les principaux de collège et les proviseurs de lycée voient leurs missions sans cesse élargies. Les psychologues scolaires se font de plus en plus rares. Et enfin, il est toujours question de confier aux départements la gestion des infirmières scolaires, via les services de protection maternelle et infantile (PMI), ce qui risquerait de priver la médecine scolaire d’un peu plus de moyens.

Je m’interroge également sur l’obsession, si vous me permettez cette expression, consistant à surcharger systématiquement tant l’enseignement moral et civique, qui ne bénéficie que d’une demi-heure par semaine, que les comités d’éducation à la santé, à la citoyenneté et à l’environnement, qui doivent traiter de sujets et d’enjeux toujours plus vastes.

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